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on sait qu’il n’est pas possible sans elles d’avancer d’un pas assûré dans les Mathématiques, ou du-moins dans les parties de cette science qui ont l’étendue pour objet.

Il rejettoit le sentiment en musique, & ne considéroit que la proportion harmonique. Ayant en vue d’établir une constance invariable dans les arts en général & dans la musique en particulier, il essaya d’en soustraire les préceptes aux témoignages & aux rapports infideles des sens pour les assujettir aux seuls jugemens de la raison.

Ce philosophe, conformément à ce dessein, voulut que les consonnances musicales, loin d’être soumises au jugement de l’oreille (qu’il regardoit comme une mesure arbitraire & trop peu certaine), ne se reglassent qu’en vertu des seules proportions des nombres qui sont toujours les mêmes. Ainsi, comme dans l’octave le nombre des vibrations de la corde la plus aigue étoit précisément le double de celles de la plus grave, il en concluoit que cette consonnance étoit en raison double, ou de 2 à 1 ; &, en suivant toujours le même principe, que la quinte étoit en raison sesquialtere, ou de 3 à 2 ; la quarte, en raison sesquitierce, ou de 4 à 3 ; & le ton en raison sesquioctave, ou de 9 à 8. Ainsi dans son système, le ton qui faisoit la différence de la quarte à la quinte, ne pouvoit se partager en deux demi-tons égaux ; & par conséquent la quarte avoit d’étendue un peu moins de deux tons & demi, la quinte moins de trois tons & demi, l’octave moins de six tons, & ainsi des autres accords contre ce qu’établissoient là-dessus les Aristoxéniens, en suivant le seul rapport des sens.

Il est étonnant que ce grand personnage ait proposé ses préceptes de morale sous le voile des énigmes. Ce voile étoit si épais, que les interpretes y ont trouvé autant de sens mystiques qu’il leur a plû.

Quant à ce qui regarde sa philosophie, voyez Italique, secte, & Pythagoriciens.

Melissus vivoit vers la lxxxiv. olympiade, c’est-à-dire vers l’an 444 avant Jesus-Christ, disciple de Parmenide d’Elée, il en suivit les principes ; mais à la Philosophie, il joignit la connoissance de la marine, & obtint dans sa patrie la charge d’amiral, avec des privileges particuliers.

Conon, mathématicien & astronome, fleurissoit vers la cxxx. olympiade. Il mourut avant Archimede son ami, qui l’estimoit beaucoup, lui communiquoit ses écrits & lui envoyoit des problèmes. Il inventa une sorte de volute qui différoit de celle de Dinostrate ; mais comme Archimede en exposa plus clairement les propriétés, il fit oublier le nom de l’inventeur, car on l’a nommée non pas la volute de Conon, mais la volute d’Archimede. Nous ne devons pas douter des connoissances astronomiques de Conon, Catulle lui-même, épigr. 67. les a décrites en beaux vers à l’entrée de son poëme sur la chevelure de Bérenice, sœur & femme de Ptolomée Evergetes ; voici le commencement de sa description poétique.

Omnia qui magni dispexit lumina mundi,
Qui stellarum ortus comperit, atque obitus :
Flammeus ut rapidi solis nitor obscuretur,
Ut cedant certis sidera temporibus,
Ut triviam furtim sub Latimia Saxa relegans
Dulcis amor gyro devocet aërio :
Idem me ille Conon coelesti lumine vidit
E Bereniceo vertice coesariem
Fulgentum clarè……

(Le chevalier de Jaucourt.)

Samos, l’île de, (Géog. mod.) île de l’Archipel, sur la côte de l’Anatolie, au midi du golfe d’Ephese.

Il ne s’agira dans cet article que de décrire cette île d’après Tournefort, c’est-à-dire telle qu’elle est de nos jours. Ce savant voyageur en a donné le plan.

L’île de Samos est éloignée de Nicaria de 18 milles de cap en cap, & de 25 milles de Scalanova. On ne compte aujourd’hui dans cette île que dix à douze mille habitans presque tous grecs ; ils ont un évêque qui l’est aussi de Nicaria, & qui réside à Cora. Les Turcs y tiennent seulement un cadi & un vaivode, pour exiger la taille réelle.

Les Samiens ne ressemblent pas à ceux qui vivoient du tems de Cléopatre ; car ils n’ont plus de fêtes, de théatres & de jeux pour les amuser. Les femmes sont mal-propres, & ne prennent de linge blanc qu’une fois le mois. Leur habit consiste en un doliman à la turque avec une coëffe rouge, bordée d’une sesse jaune ou blanche qui leur tombe sur le dos, de même que leurs cheveux, qui le plus souvent sont partagés en deux tresses, au bout desquelles pend quelquefois un trousseau de petites plaques de cuivre blanchi ou d’argent bas, car on n’en trouve gueres de bon aloi dans ce pays-là. On y recueille néanmoins beaucoup de grain & de fruits ; les raisins muscats y sont admirables, & le vin en seroit délicieux, si l’on savoit le faire ; les figues y sont blanches, trois ou quatre fois plus grosses que celles de Marseille, mais moins délicates ; la soie de cette île est fort belle, ainsi que le miel & la cire. Pour la scamonée de Samos, elle ne vaut guere, & il est surprenant que du tems de Dioscoride on la préférât à celle de Syrie. L’île est pleine de gibier excellent, & les perdrix y sont en prodigieuse quantité.

La ville de Samos, autrefois capitale de l’île, est entierement détruite. Environ à cinq cens pas de la mer, & presque à pareille distance de la riviere Imbrassus vers le cap de Cora, sont les ruines du fameux temple de Junon la samienne, ou la protectrice de Samos.

A onze milles des ruines de ce temple est un grand couvent de la Vierge, situé à mi-côte de montagnes agréables, couvertes de chênes verts, de pins à pignons, de pins sauvages, de philaria & d’adrachné.

Samos ayant été saccagée & dépeuplée après la paix de Constantinople, fut donnée par l’empereur Selim au capitan Bacha Ochialt, lequel y fit passer divers peuples de Grece pour en cultiver les terres. Depuis la mort de cet amiral, le revenu de Samos a été affecté à une mosquée qu’il avoit fait bâtir à Topana, l’un des fauxbourgs de Constantinople.

Voilà l’histoire de cette île. J’en dirois davantage, si j’avois pu trouver la description que Joseph Georgirene, évêque de Samos, en a fait en grec vulgaire, & qui a été traduite en anglois ; mais je n’ai pu en découvrir aucun exemplaire, & cet ouvrage manque à la bibliotheque du roi. Latit. 37d. (Le chevalier de Jaucourt.)

Samos, terre de, (Hist. nat. Minéralog.) c’est une terre ou marne très-blanche qui se trouvoit dans l’île de Samos, on la regardoit comme un grand remede contre les hémorrhagies, les diarrhées, & extérieurement contre les inflammations. On formoit aussi des vases avec une terre de Samos, mais il y a apparence que ce n’étoit point avec celle qui vient d’être décrite, puisqu’une marne n’est point propre à faire de la poterie. M. Tournefort croit que c’étoit avec une terre bolaire d’un rouge foncé qui se trouve dans la même île, & sur-tout près de Bavonda.

Il y avoit encore une terre que Dioscoride a appellée aster samius, que M. Hill croit être une marne, d’un gris de cendre mêlée de talc. Voyez d’Acosta natural history of fossils.

SAMOSATE, (Géog. anc.) Samosata, au pluriel génitif, orum ; ancienne ville d’Asie sur l’Euphrate,