Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 14.djvu/611

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ment célebre, & c’est, selon quelques savans, sur les ruines de Rutupiæ, qu’on a bâti Sandwich.

Quoi qu’il en soit, la ville située sur ce port, fut ruinée par les Danois, retablie depuis, & incendiée sous le roi Jean ; on la releva de ses cendres ; mais sous le regne de la reine Marie, l’entrée de son havre fut tellement bouchée dans une nuit, par un gros navire qui y coula à fond à l’insçu de tout le monde, qu’on n’a jamais pu depuis y rémédier.

M. Moore, avant qu’on eût connu la cause de cet événement singulier, fut envoyé sur les lieux par la reine Marie, pour la découvrir ; les habitans peu capables de l’éclairer, lui députerent un vieillard qui se flattoit d’avoir là-dessus plus de lumieres que ses compatriotes. « Je suis bien âgé, dit-il, & je me rappelle d’avoir vu bâtir le clocher de Tinterton ; il n’étoit question alors ni de bancs de sables, ni de bas fonds, qui empêchassent l’entrée du havre de Sandwich ; ainsi je pense que le clocher de Tinterton en est la cause ». M. Moore rit beaucoup de cette idée, & depuis lors elle est devenue un proverbe anglois, qui s’emploie quand quelqu’un rend une raison absurde d’un fait dont on demande l’explication. (D. J.)

SANDYX, (Hist. nat. Peinture.) on ne connoît point quelle est la substance que les Grecs appelloient sandyx. Quelques-uns ont cru qu’ils désignoient sous ce nom une couleur d’un rouge éclatant, dont on se servoit dans la peinture ; d’autres ont dit que c’étoit un verd tirant sur le bleuâtre. Strabon dit que les Peintres de son tems faisoient usage d’une couleur appellée Armenium pictoriam ; & que quelques autres donnoient à cette même couleur le nom de sandycis metalluri : elle étoit d’un bleu tirant sur le verd. On croit que la couleur appellée zarnich, par les Arabes, est le sandyx des anciens : Avicenne dit qu’elle étoit ou jaune, ou rouge, ou verte. On présume que par celui qui étoit jaune ou rouge, il a voulu désigner l’orpiment ; & par celui qui étoit verd, le lapis Armenus.

SANÉ, (Géog. anc.) ville de Thrace, entre le mont Athos, & la presqu’île de Pallene, selor. Hortelius. Hérodote, lib. VII. c. xxij. la met dans l’isthme du mont Athos, auprès du fossé creuse par Xerxès. Thucydide, parlant des villes du mont Athos, met au bord du fossé même Sane, qu’il dit être une colonie de l’île d’Andros. Etienne le géographe, l’abbréviateur de Strabon & Plutarque, quæest. græc. en font aussi mention. (D. J.)

SANED, (Hist. mod.) c’est le nom que l’on donne dans l’Indostan, à des patentes ou privileges, accordés par le grand-mogol, à certaines provinces ou districts.

SANG, s. m. (Anat. & Physiol.) est le nom que l’on donne à la liqueur renfermée dans les arteres qui battent, & dans les veines correspondantes à ces arteres. Voyez Artere & Veine.

Le sang paroît à la premiere inspection, homogene, rouge & susceptible de coagulation dans toutes les parties du corps ; mais différentes expériences nous ont appris qu’il a différens caracteres.

L’hydrostatique nous fait découvrir qu’il y a dans le sang quelque chose de volatil, qui s’exhale continuellement du sang en forme de vapeur, & dont l’odeur tient le milieu entre la mauvaise odeur de l’urine, & celle de la sueur. Cette vapeur contenue dans ses propres vaisseaux, paroît aqueuse, & comme chargée d’une couleur qui tire sur l’alkali.

Le sang de l’homme le plus sain se coagule en une masse tremblante, facile à rompre : il s’épaissit davantage si on l’expose à une chaleur moindre que celle de l’eau bouillante, & même de 150 degrés. On l’a vu se réunir en forme de gelée dans les veines pendant la vie, & dans ceux qui mouroient de fievres violentes. La

partie rouge du sang constitue la partie principale de ce coagulement, auquel cette couleur rouge est propre, & qui la communique à toutes les autres parties du sang. Cette même partie du sang, qui peut se réunir en une masse confuse lorsqu’elle est en repos, exposée à un petit froid, à une chaleur de 150 degrés, & mêlée avec l’esprit de vin, avec les acides minéraux, est cependant molle, à-moins qu’elle ne soit endurcie par une trituration pareille à celle qu’elle supporte pendant la vie, ou par quelques secousses semblables. Elle est pesante, & presque plus d’un onzieme qu’un pareil volume d’eau ; elle est toute inflammable lorsqu’elle est dépouillée de son phlegme : la partie rouge fait la moitié & plus de la masse du sang dans les tempéramens sanguins, & le séreux un tiers de la masse ; dans la fievre il se réduit à la quatrieme ou la cinquieme partie.

Ce qui se présente ensuite, c’est la partie blanchâtre & jaunâtre du sang ; & quoiqu’elle paroisse aussi homogene, elle ne l’est cependant pas. Elle est en général plus pesante d’un trente-huitieme qu’un égal volume d’eau ; & plus légere d’un douzieme que le coagulum. Elle se coagule si on l’expose à une chaleur de 150 degrés, qu’on la mêle avec les acides & l’esprit de vin, & qu’on l’agite, ses caillots sont plus durs que ceux de la partie rouge du sang. Ils sont si glutineux, qu’on ne peut les résoudre, en membrane, & enfin en un corps aussi solide que de la corne. C’est cette humeur qui produit la couënne que l’on remarque dans le sang des pleurétiques, les polipes & les membranes artificielles. On découvre dans ce séreux, outre la partie albumineuse qui peut se coaguler, une eau simple qui en constitue la plus grande portion, & quelque chose de muqueux qui file, & qui néanmoins ne se coagule pas comme la partie albumineuse, par le feu, ni par les acides.

Il n’est que la pourriture & la force de l’air échauffé à 96 degrés, qui puissent occasionner une dissolution fétide dans toute la masse du sang, & sur-tout dans le serum ; car la partie séreuse en est la plus susceptible : la partie rouge l’est moins. A la longue, la partie rouge & la lymphe se changent enfin en une exhalaison fétide & volatile, & déposent un sédiment au fond du vase dans lequel elles se sont corrompues.

Le sang une fois dissous par la pourriture ne peut plus se coaguler ; & lorsqu’une fois il a été coagulé par l’esprit de vin, il ne peut plus se dissoudre.

Outre toutes ces parties que l’on découvre avec facilité dans le sang, il est encore chargé d’une assez grande quantité de sel marin, que l’on distingue par sa saveur légèrement salée, & quelquefois avec le microscope. La nutrition, de même que l’analyse chimique, font voir qu’il est aussi chargé de terre, mêlée avec les parties les plus fluides, & sur-tout avec l’huile. Enfin il y a dans le sang un air non élastique qui est en assez grande quantité, & on s’en assure par la pourriture du sang & du serum, & en pompant l’air qui l’environne. Il ne s’ensuit pas de-là que les globules soient des bulles aériennes, puisqu’elles sont spécifiquement plus pesantes que le serum.

La Chimie nous a fourni différens moyens pour découvrir la nature du sang. Si on expose le sang que l’on a tiré d’un homme sain à un petit feu, il s’en évapore une grande quantité d’eau qui faisoit plus des de toute la masse ; elle est presque insipide, & cependant empreinte d’une huile fétide qui se fait sentir de plus en plus, à mesure que la distillation approche plus de sa fin. En exposant le reste à un feu plus fort, il fournit des liqueurs alkalines de différentes especes, dont la premiere est fétide, âcre, rousse & formée d’un sel volatil dissous dans de l’eau, fait environ la douzieme partie de tout le sang.

Il s’éleve avant, & pendant que l’huile s’en détache, un sel volatil sec, qui s’attache par flocons ra-