Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 14.djvu/925

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M. Margraff, c’est qu’étant mêlé avec un inflammable subtil & distillé dans un vaisseau fermé, il produit le phosphore. M. Margraff pense que l’acide du sel microcosmique est essentielle à la production du phosphore, & il faut, suivant lui, que cet acide soit mêlé dans plusieurs végétaux, parce que la semence de roquette, de cresson, de moutarde, & même le blé, lorsqu’on les distille à un feu violent, donnent à la fin le phosphore, quand le feu est poussé au plus haut degré. Voyez Phosphore. Il est dans l’opinion que le sel microcosmique, & sur-tout son acide, se trouve mêlé à quelques-uns des végétaux qui composent les alimens & les boissons des hommes, & qu’il passe de-là dans le corps humain : car il a remarqué que l’urine d’été, saison où les hommes mangent beaucoup plus de végétaux, fournit toujours une plus grande quantité de ce sel, que l’urine d’hiver ; mais une semblable preuve paroît extrêmement foible, quoiqu’elle n’ait laissé aucun doute à M. Margraff.

On a attribué différentes vertus médicinales au sel microcosmique, mais elles ne sont pas assez constatées, quoique ceux qui l’ont employé, semblent se réunir à dire que ce sel est un puissant apéritif.

Sel principe, (Chimie & Physique.) les anciens chimistes crurent reconnoître que la decomposition des corps étoit arrêtée, lorsqu’ils étoient parvenus à les reduire en esprit, huile, sel, terre, & eau ; ils nommerent ces substances principes ou élemens ; ils appellerent les trois premiers actifs, les deux autres passifs ; ils ont été successivement contredits par leurs successeurs. Paracelse les reduisit à trois, le mercure ou l’esprit, le soufre ou l’ame, & le sel ou le corps ; Vanhelmont n’admit que l’eau pour tout principe ; Becher joignit la terre, dont il fit trois especes, à l’eau ; Stahl adopta ces maximes ; les chimistes, plus modernes que ces deux grands hommes, trouvant des défauts dans cette partie de leur doctrine, ont varié dans la division qu’ils ont faite de ces mêmes principes. Il seroit trop long de rendre compte de tous les sentimens qui se sont élevés à ce sujet, nous nous bornerons à examiner ce qu’on doit penser de ce prétendu élement.

Il est évident que le titre de principe ne peut convenir à aucun sel neutre ; il ne l’est guere moins que les alkalis en doivent être exclus ; quant aux acides, une suite d’analogies, de vraissemblances, leur transmutation, sont des preuves qu’ils dérivent tous d’un seul, du vitriolique, sulphureux ou universel : c’est donc lui seul qu’on pourroit nommer principe, mais n’est-il pas encore susceptible de décomposition ? doit-on penser avec Becher, Stahl & Juncker, qu’il est formé par l’union de l’eau & de la terre vitrescible ? c’est ce qui ne sauroit être mis en évidence que par des expériences nouvelles & repétées ; heureusement l’incertitude qui regne sur cet objet, n’est d’aucune conséquence pour la pratique de la chimie, elle ne peut en arrêter les découvertes, elle doit au-contraire exciter à tenter la décomposition des corps qui paroissent les plus simples, ceux qui veulent avoir des points fixes sur cette matiere. On peut renvoyer aux écoles toutes les disputes semblables, & se borner à soutenir que l’opinion la plus vraissemblable est celle d’Aristote, qui admet pour élement, l’eau, l’air, la terre, & le feu, en attendant qu’un jour plus grand soit répandu par l’expérience sur la théorie d’un art que nous regardons comme la clé de la vraie physique. Voyez Élemens, Principes.

Sel sédatif, (Chimie.) le borax (Voyez Borax) est un sel composé, qui reconnoît pour ses principes constituans, un alkali de l’espece de celui qui sert de base au sel muriatique, appellé alkali minéral, parce que c’est le seul alkali fixe qui existe tout formé dans la nature, & que l’art ne crée pas ; ce sel alka-

li est neutralisé par une autre espece de sel, qui fait

fonction d’acide, connu sous le nom de sel sédatif, par rapport aux effets qu’a cru lui remarquer Homberg, un de ses inventeurs.

Ce sel se retire du borax de deux manieres, par sublimation & par crystallisation ; dans l’un & l’autre cas il faut toujours employer une addition d’acide, au borax, lequel s’unit à l’alkali minéral, pour former un sel neutre différent, suivant le genre d’acide. Ils sont tous indistinctement propres à opérer cette décomposition, selon les observations de M. Baron ; (Voyez Mémoire des savans étrangers.) alors le sel sédatif, qui est encore affoibli par l’eau que l’on ajoute au mélange, a moins d’affinité avec l’alkali, que n’en ont les acides employés, il se trouve libre & en état d’être séparé du nouveau sel qu’a formé l’addition de l’acide, ce qui pourra s’exécuter par la voie qui se trouvera la plus convenable.

Non-seulement, selon les expériences de M. Lémeri, les acides purs & concentrés operent la décomposition du borax, mais encore ces mêmes acides engagés dans des bases terreuses & métalliques, ce qui a été la source de plusieurs erreurs ; par exemple, M. Homberg obtint le sel sédatif, par l’intermede du colcotar, & pensant que c’étoit la matrice de ce sel, il le nomma sel volatil de colcotar, ou de vitriol, &c.

La méthode qui nous a paru la meilleure pour retirer le sel se datif, est la suivante.

L’on arrose quatre onces de borax réduit en poudre, avec une once & deux gros d’huile de vitriol très-concentrée, l’on ajoute peu de tems après au mélange, deux onces d’eau commune, & l’on distille le tout dans une cornue luttée, dont le col soit large, en poussant le feu jusqu’à faire rougir la partie inférieure de la cornue.

Il est à remarquer que l’acide vitriolique très-concentré, ne décomposeroit pas sans addition d’eau le borax ; il est même connu que le sel sédatif très-pur & très-sec, décompose en partie, par une proprieté très-singuliere, tous les sels neutres à bases alkalines, s’unissant à ces mêmes bases lorsqu’il en a précipité l’acide, pour reproduire avec elles du borax ; mais lorsque dans la décomposition du borax, on ajoute une certaine quantité d’eau, le sel sédatif ne peut plus agir avec la même activité, & la réaction de l’acide sur l’alkali n’en est pas diminuée ; le sel sédatif devenu libre, & étant naturellement fort divisé, présente à l’eau un grand nombre de surfaces, ce qui lui facilite la propriété d’être enlevé avec elle : aussi arrive-t-il que dans les procedés où l’on emploie une moindre quantité d’eau, il faut en ajouter de nouvelle pour enlever tout le sel sédatif qu’une quantité donnée de borax peut fournir ; lorsque l’on diminue la quantité d’huile de vitriol, on tombe encore dans l’inconvénient de ne pas décomposer tout le borax, non qu’il n’y ait assez d’acide pour saturer tout l’alkali minéral, mais c’est que la décomposition ne s’en fait jamais si rapidement, que l’eau n’enleve une certaine quantité même nécessaire de cet acide, de la même maniere qu’il enleve & tient en dissolution une petite partie du sel sédatif, de-là l’acidité de l’eau du récipient : quant au sel sédatif qui n’a pas la même affinité avec l’eau que l’acide, & qui d’ailleurs n’en est pas dissous, mais seulement humecté, il est enlevé à la faveur de cette eau, & de la chaleur qui le tient dans un état de fusion, jusqu’au col de la cornue, qui est la partie qui sort du reverbere, & que le contact de l’air a refroidi ; mais l’eau qui n’est pas susceptible d’un si grand degré de chaleur, ne se condense pas également à un froid si peu sensible ; elle s’étend & se raréfie jusque dans le balon où elle s’accumule, avec une légere portion de sel sédatif, qui avoit été exactement dissous, & qui se crystallise