Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 15.djvu/411

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un souper où l’on dit quantité de bons mots pour se divertir.

Il y avoit de plus cæna adventitia, intervallata, novemdialis, & duodenaria, appellée en grec δωδεκάθεος, parce que les conviés étoient au nombre de douze, habillés en dieux & en déesses.

Enfin, il y avoit un souper pontifical, que le souverain prêtre donnoit le jour de son inauguration.

Abacus étoit le buffet sur lequel on mettoit les verres, le dessert, &c.

Urnarium, étoit une table quarrée sur laquelle on posoit les vases, les flacons, les bassins, &c.

Cartibulum, signifie la table sur laquelle on découpoit les viandes qu’on servoit ensuite aux conviés.

Antecæna ou gustatio, désignoit le premier service ou les entrées. Le second s’appelloit caput cænæ, & le troisieme ou le dessert, se nommoit bellaria. Auguste n’avoit ordinairement que ces trois services, cænam ternis ferculis præbebat, dit Suétone.

A-l’entour de la grande table des conviés, il y avoit une espece de marche-pié un peu élevé, sur lequel étoient assis les enfans d’un certain âge qui soupoient avec la compagnie. Suétone nous dit dans la vie de l’empereur Claude, ch. xxxij. Adhibebat omni cænae liberos suos cum pueris, puellisque nobilibus, qui more veteri ad fulcra lectorum sedentes, vescerentur. (Le chevalier de Jaucourt.

Souper ; (Hist. des usag. de France.) on soupe dans ce siecle à dix heures à la cour, & dans les grandes maisons de Paris ; dans le quinzieme siecle, & même sous la minorité de Charles IX, c’étoit l’usage à la cour de France de souper à six heures du soir, & de dîner à onze du matin. Il n’étoit que 8 heures quand le duc d’Orléans fut assassiné le 23 Novembre 1407. & cependant à cette heure, il avoit déja soupé avec la reine ; c’est qu’alors les princes, ainsi que les bourgeois, n’aimoient point à se déheurer, pour me servir de l’expression du cardinal de Retz. (D. J.)

SOUPHRIERE la, (Géogr. mod.) montagne de l’Amérique septentrionale, dans l’île de la Guadaloupe. C’est une des plus hautes montagnes de l’île, qui vomit presque toujours du souphre, des cendres & des pierres brûlées, quoiqu’il fasse un froid continuel sur son sommet ; mais le milieu & le bas de cette montagne, sont couverts d’une agréable verdure, & arrosés d’une infinité de ruisseaux. (D. J.)

SOUPIER, s. m. (terme de Carrier.) c’est une espece de banc ou de lit de pierre, qui ne se trouve que dans les carrieres de S. Maur, village à deux lieues de Paris, & qui y tient lieu de ce qu’on appelle le souchet dans les autres carrieres ; avec cette différence que du soupier, il se tire d’excellens moillons, & que le souchet n’est souvent qu’un amas de gravois & de terre, sur lesquels est posé le grand banc. (D. J.)

SOUPIR, SANGLOT, GÉMISSEMENT, CRI PLAINTIF, (Synonymes.) tous ces mots peignent les accens de la douleur de l’ame ; en voici la différence selon l’explication physiologique donnée par l’auteur de l’histoire naturelle de l’homme.

Lorsqu’on vient à penser tout-à-coup à quelque chose qu’on desire ardemment, ou qu’on regrette vivement, on ressent un tressaillement ou serrement intérieur ; ce mouvement du diaphragme agit sur les poumons, les éleve, & y occasionne une inspiration vive & prompte qui forme le soupir ; lorsque l’ame a réfléchi sur la cause de son émotion, & qu’elle ne voit aucun moyen de remplir son desir, ou de faire cesser ses regrets, les soupirs se répetent, la tristesse qui est la douleur de l’ame, succede à ses premiers mouvemens.

Lorsque cette douleur de l’ame est profonde & subite, elle fait couler les pleurs ; si l’air entre dans la poitrine par secousses, il se fait plusieurs inspirations

réitérées par une espece de secousse involontaire ; chaque inspiration fait un bruit plus fort que celui du soupir, c’est ce qu’on appelle sanglots. Les sanglots se succedent plus rapidement que les soupirs, & le son de la voix se fait entendre un peu dans le sanglot.

Les accens en sont encore plus marqués dans le gémissement. C’est une espece de sanglot continué, dont le son lent se fait entendre dans l’inspiration, & dans l’expiration ; son expression consiste dans la continuation & la durée d’un ton plaintif, formé par des sons inarticulés : ces sons du gémissement sont plus ou moins longs, suivant le degré de tristesse, d’affliction, & d’abattement qui les cause, mais ils sont toujours répétés plusieurs fois ; le tems de l’inspiration est celui de l’intervalle du silence, qui est entre les gémissemens, & ordinairement ces intervalles sont égaux pour la durée, & pour la distance.

Le cri plaintif est un gémissement exprimé avec force & à haute voix ; quelquefois ce cri se soutient dans toute son étendue sur le même ton, c’est sur-tout lorsqu’il est fort élevé & très-aigu ; quelquefois aussi il finit par un ton plus bas ; c’est ordinairement lorsque la force du cri est modérée. (D. J.)

Soupir, s. m. en Musique, est un caractere qui se fait ainsi soupir, & qui marque un silence, dont le tems doit être égal à celui d’une noire ou de la moitié d’une blanche. Voyez Silences, valeur des Notes, &c. (S)

SOUPIRAIL, s. m. (Archit.) ouverture en glacis entre deux jouées rampantes, pour donner de l’air & un peu de jour, à une cave, à un cellier, à un aquéduc. Le glacis d’un soupirail doit ramper de telle sorte, que le soleil ne puisse jamais y entrer. (D. J.)

Soupirail d’aquéduc, (Archit. hydraul.) on appelle ainsi une certaine ouverture en abajour, dans un certain aquéduc couvert, ou à plomb, dans un aquéduc souterrein, laquelle se fait d’espace en espace, pour donner échappée aux vents qui, étant renfermés, empêcheroient le cours de l’eau. (D. J.)

SOUPIRER, (Lang. franç.) Malherbe, Gombaut, Sarrazin, Despréaux & autres poëtes, ont employé ce mot dans une signification active, pour signifier produire au-dehors.

Tantôt vous soupiriez mes peines,
Tantôt vous chantiez mes plaisirs.

Malh.

Mille esprits abusés en leur sujétion
Vont soupirer leur flâme éloquente & muette.

Gomb.

Tout dort dans la nature, & Daphnis seulement,
Privé de ce repos, soupire son tourment.

Sarrasin.

Ce n’étoit pas jadis sur ce ton ridicule
Qu’amour dictoit les vers que soupiroit Tibule.

Despréaux.

Soupirer dans le sens de desirer pasionnément, rechercher avec ardeur, se met avec la préposition après & pour. Je soupire après ma délivrance ; comme la biche soupire après le courant des eaux, ainsi mon ame soupire après vous, ô mon Dieu. Port royal. C’est une chimere que de soupirer pour des richesses qui ne sont point le prix de la vertu, & qu’on n’emporte point dans la tombe. (D. J.)

SOUPLE, adj. (Gram.) maniable, flexible, qui cede facilement sous l’action des doigts, & qui n’y excite aucune sensation de roideur & de résistance. On rend les peaux souples en les maniant ; les jeunes branches des arbres sont souples ; les ressorts minces sont souples : on dit au figuré, un caractere souple, un esprit souple, une humeur souple. Celui qui a de la souplesse se plie facilement à tout ce que les circons-