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Il y a deux manieres de discerner le bon & le mauvais, le vrai & le faux.

Nous jugeons que la chose est ou n’est pas, par sensation, par expérience, ou par raisonnement.

La logique suppose l’homme qui juge, & une régle de jugement.

Cette regle suppose ou la sensation, ou l’imagination.

L’imagination est la faculté de se rappeller les images des choses qui sont.

La sensation naît de l’action des objets extérieurs, & elle suppose une communication de l’ame aux organes.

Ce qu’on a vu, ce qu’on a conçu reste dans l’ame, comme l’impression dans la vue, avec ses couleurs, ses figures, ses éminences, & ses creux.

La compréhension formée d’après le rapport des sens, est vraie & fidelle ; la nature n’a point donné d’autre fondement à la science ; il n’y a point de clarté, d’évidence plus grande.

Toute appréhension vient originairement des sens ; car il n’y a rien dans l’entendement qui n’ait été auparavant dans la sensation.

Entre les choses comprises, il y en a de plus ou de moins sensibles ; les incorporelles sont les moins sensibles.

Il y en a de rationelles & d’irrationelles, de naturelles & d’artificielles, telles que les mots.

De probables & d’improbables, de vraies & de fausses, de compréhensibles & d’incompréhensibles ; il faut pour les premieres qu’elles naissent d’une chose qui soit, qu’elles y soient conformes, & qu’elles n’impliquent aucune contradiction.

Il faut distinguer l’imagination du fantôme, & le fantôme du fantastique qui n’a point de modele dans la nature.

Le vrai est ce qui est, & ce qui ne peut venir d’ailleurs que d’où il est venu.

La compréhension, ou la connoissance ferme, ou la science, c’est la même chose.

Ce que l’esprit comprend, il le comprend ou par assimilation, ou par composition, ou par analogie.

L’homme reçoit la sensation, & il juge, l’homme sage refléchit avant que de juger.

Il n’y a point de notions innées ; l’homme vient au monde comme une table rase sur laquelle les objets de la nature se gravent avec le tems.

Il y a des notions naturelles qui se forment en nous sans art ; il y en a qui s’acquierent par industrie & par étude ; je laisse aux premieres le nom de notions, j’appelle celles-ci anticipations.

Le senti est dans l’animal, il devient le conçu dans l’homme.

Les notions communes le sont à tous ; il est impossible qu’une notion soit opposée à une notion.

Il y a la science, & l’opinion, & l’ignorance ; si l’on n’a pas éprouve la sensation, on est ignorant ; s’il reste de l’incertitude après cette épreuve, on est incertain ; si l’on est imperturbable, on sait.

Il y a trois choses liées, le mot, la chose, l’image de la chose.

La définition est un discours qui analysé, devient la réponse exacte à la question, qu’est-ce que la chose ? elle ne doit rien renfermer qui ne lui convienne ; elle doit indiquer le caractere propre qui la distingue.

Il y a deux sortes de définitions ; les unes des choses qui sont, les autres des choses que nous concevons.

Il y a des définitions partielles, il y en a de totales.

La distribution d’un genre dans ses especes les plus prochaines, s’appelle division.

Un genre s’étend à plusieurs especes ; un genre suprème n’en a point au-dessus de lui ; une espece

infime n’en a point au-dessous d’elle.

La connoissance complette se forme de la chose du mot.

Il y a quatre genres ; la substance, la qualité, l’absolu, le rapport.

Les énonciations qui comprennent sous un point commun des choses diverses, s’appellent catégories ; il y a des catégories dans l’entendement, ainsi que dans l’expression.

L’énonciation est ou parfaite, ou imparfaite & défectueuse ; parfaite, si elle comprend tout ce qui est de la chose.

Une énonciation est ou affirmative ou négative, ou vraie ou fausse.

Une énonciation affirmative ou négative, parfaite, est un axiome.

Il y a quatre catégories ; la directe, l’oblique, la neutre, & l’active ou passive.

Un axiome est ou simple ou composé ; simple, si la proposition qui l’énonce est simple ; composé, si la proposition qui l’énonce est composée.

Il y a des axiomes probables ; il y en a de rationels, il y en a de paradoxals.

Le lemme, le proslemme & l’épiphore, sont les trois parties de l’argument.

L’argument est concluant ou non ; syllogistique ou non.

Les syllogismes sont ou liés, ou conjoints, ou disjoints.

Il y a des modes, selon lesquels les syllogismes concluans sont disposés.

Ces modes sont simples ou composés.

Les argumens syllogistiques qui ne concluent pas, ont aussi leurs modes. Dans ces argumens, la conclusion ne suit pas du lien des prémisses.

Il y a des sophismes de différens genres ; tels, par exemple que le sorite, le menteur, l’inexplicable, le paresseux, le dominant, le voile, l’électre, le cornu, le crocodile, le réciproque, le déficient, le moissonneur, le chauve, l’occulte, &c.

Il y a deux méthodes, la vulgaire & la philosophique.

On voit en effet, que tout cette logique n’a rien de bien merveilleux. Nous l’avons dépouillée des termes barbares dont Zénon l’avoit revêtue. Nous aurions laissé à Zénon ses mots, que les choses n’en auroient pas été plus nouvelles.

Physiologie des stoiciens. Le cahos étoit avant tout. Le cahos est un état confus & ténébreux des choses, c’est sous cet état que se présenta d’abord la matiere, qui étoit la somme de toutes les choses revêtues de leurs qualités, le reservoir des germes & des causes, l’essence, la Nature, s’il est permis de s’exprimer ainsi, grosse de son principe.

Ce que nous appellons le monde & la nature ; c’est ce cahos débrouillé, & les choses ténébreuses & confuses prenant l’ordre & formant l’aspect que nous leur voyons.

Le monde ou la nature est ce tout, dont les êtres sont les parties. Ce tout est un ; les êtres sont ses membres ou parties.

Il faut y distinguer des principes différens des élémens.

De ces principes, l’un est efficient ; l’autre est passif. L’efficient est la raison des choses qui est dans la matiere, ou Dieu. Le passif est la matiere même.

Ils sont l’un & l’autre d’une nature corporelle. Tout ce qui agit ou souffre, est corporel. Tout ce qui est, est donc corps.

La cause efficiente ou Dieu, est un air très-pur & très-limpide, un feu artificiel, placé à la circonférence des cieux la plus éloignée, séjour de tout ce qui est divin.

Le principe passif ou la matiere, est la nature con-