Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/605

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faires & son épouse : elle languit long-tems séchant du chagrin de voir le délabrement de sa santé & de sa petite fortune. La mort de son mari jointe à son âge & à ses infirmités, rendoit son état pitoyable ; mais l’excès de son malheur devint, en quelque façon, sa ressource, parce qu’il la priva de son bon sens & de sa raison.

Je me suis étendu sur cet homme célebre en son genre, parce que tous ceux qui excellent dans quelqu’un des beaux-arts, méritent l’estime & les éloges des gens de lettres.

Lee (Nathanael), célebre poëte, naquit à Westminster vers le milieu du dernier siecle, & fit onze pieces de théatre, qui ont été jouées avec beaucoup d’applaudissement. Sa derniere tragédie, intitulée le massacre de Paris, fut représentée sur le théatre royal en 1690. Les pensées de cet auteur sont admirables pour le tragique, mais si noyées dans une multitude de paroles, qu’elles perdent la plus grande partie de leur beauté. Il réussit merveilleusement dans le pathétique, lorsqu’il ne s’abandonne point à la violence de son imagination. Le comte de Rochester dit plaisamment que ce poëte ne chantoit pas mal, mais qu’il forçoit sa voix, de maniere qu’il s’enrouoit. Il perdit l’esprit à l’âge de cinquante ans, & fut confiné quelques années à l’hôpital de Bethlem. Il en sortit sans s’être parfaitement rétabli, & mourut pendant la nuit dans une des rues de Londres.

Beveridge (Guillaume), en latin Beverigius, né à Westminster en 1638, fut nommé évêque de S. Asaph en 1705, & s’attira la vénération de toute l’Angleterre par ses vertus & par son savoir. Il mourut en 1708, à 71 ans.

Ses ouvrages de piété sont en grand nombre. On a publié ses sermons en 1709, & ce recueil forme dix volumes in-8°. Ses pensées secretes sur la religion ont souffert plusieurs éditions. La traduction françoise de cet ouvrage parut à Amsterdam en 1731 en deux volumes in-12.

En 1662, il publia à Londres ses institutionum chronologicarum libri duo, qui ont été réimprimés pour la troisieme fois en 1721 ; c’est un traité simple & méthodique d’un grand usage classique, parce qu’il fournit un système abrégé de toute la chronologie. Dans le premier livre, l’auteur traite de la nature & des parties de la chronologie ; du tems, des heures, des minutes & des secondes ; des jours, des semaines, des mois, de l’année céleste, de l’année julienne, grégorienne, égyptienne, éthiopienne, persane, syrienne & greque ; de l’année astronomique, civile & solaire des juifs ; de l’année des Arabes. Dans le second livre, il traite des syzygies ou mois lunaires, & des éclipses, des équinoxes & des solstices ; du cycle du soleil & de la lettre dominicale, du cycle de la lune & du nombre d’or ; de l’indiction ; de l’épacte ; du cycle de Méton & de Callippe ; de la période dionysienne & julienne ; de l’ere chrétienne & de Dioclétien ; des années du monde ou du comput des Grecs ; de l’ére judaïque ; de l’époque de la prise de Troie, de la fondation de Rome & de celle d’Antioche ; des olympiades & des jeux capitolins ; des années juliennes, de l’ére d’Espagne & de la victoire d’Actium ; des éres de Nabonassar, de Philippe, & de Yezdegird le dernier roi de Perse, de l’Hégire ou ére mahométane. Dans l’appendix, il donne les noms des mois hébreux, syriens, persans, éthiopiens & arabes, dans les caracteres mêmes de ces langues, & autres choses pareilles.

En 1678, il fit imprimer son codex canonum ecclesiæ primitivæ vindicatus, recueil des canons de la primitive église justifiée. M. Daillé étoit dans une opinion différente ; car, dans son traité de pseudepigraphis, imprimé en 1652, il tâche de prouver que le

recueil des canons n’a point été fait par des personnes qui ayent vécu près du tems des apôtres, & qu’il n’a été publié que vers la fin du v. siecle.

Le thesaurus theologicus, ou système de théologie du docteur Beveridge n’a paru qu’en 1710, in-8°. c’est-à-dire trois ans après la mort de l’auteur.

Un illustre savant a mis au jour en 1711 une courte revue des écrits du docteur Beveridge ; & l’on doit convenir qu’il y a trouvé un grand nombre d’erreurs en fait de systèmes & de raisonnemens. Mais il faut oublier les erreurs spéculatives du vertueux évêque de S. Asaph, & considérer seulement les preuves éclatantes qu’il a donné de sa piété pendant sa vie & à sa mort, ayant légué la plus grande partie de son bien pour l’avancement de la religion chrétienne, tant au-dedans qu’au-dehors du royaume britannique.

Folkes (Martin) naquit à Westminster en 1690, & fut nommé de la société royale en 1714, à l’âge de 24 ans. Au retour de ses voyages, il lut à la société des antiquaires de Londres une savante dissertation sur le poids & la valeur des anciennes monnoies romaines, à laquelle étoit jointe une table des monnoies d’or d’Angleterre depuis le regne d’Edouard III. sous lequel on a commencé à en fabriquer de cette espece, avec leurs poids & leurs valeurs intrinseques. On trouvera dans les transactions philosophiques les observations de M. Folkes sur les polypes d’eau douce découverts par M. Tremblay ; sur les bouteilles de Florence, qui résistent au choc d’une balle de plomb, & ne peuvent soutenir celui d’un petit gravier sans se rompre ; comme aussi sur des os humains revêtus d’une couche pierreuse, & qu’il avoit vu près de Rome à Villa-Ludovisia.

Il succéda à M. Sloane à la place de président de la société royale ; & en 1742, il fut nommé associé étranger à l’académie des Sciences de Paris.

En 1745, il publia son traité des monnoies d’argent d’Angleterre, depuis la conquête de cette île par les Normands, jusqu’au tems où il écrivoit. Cet ouvrage, avec la seconde édition de celui qu’il avoit déja donné sur les monnoies d’or, étoit certainement le morceau de ce genre le plus parfait & le plus intéressant qu’on eût encore vu ; il est même plus intéressant qu’il ne le paroît au premier coup-d’œil. Les monnoies sont les signes des valeurs de tout ce qui peut faire l’objet du commerce & des besoins de la société ; ces signes doivent donc eux-mêmes changer de valeur, suivant que la quantité du métal qui sert de signe, ou celle des choses représentées vient à changer, & encore, suivant la facilité qu’une nation trouve à se les procurer par son commerce ; d’où il suit qu’un tableau fidele de la variation des monnoies d’une nation présente à ceux qui sont en état de connoître cette espece d’hiéroglyphe, non les événemens qui appartiennent aux histoires ordinaires, mais l’effet de ces mêmes événemens sur le corps politique, & les avantages ou les maux intérieurs qu’ils y ont pu causer.

En 1750, M. Folkes fut nommé président de la société des antiquaires de Londres, & ce fut le dernier honneur qui lui fut déféré, étant mort en 1754. (Le chevalier de Jaucourt.)

Westminster, église de, (Topogr. de Londres.) l’église de Westminster fut fondée dans le vij. siecle par Sébert, roi des Saxons orientaux, qui s’étant converti au christianisme, changea le temple du dieu Thor qui étoit dans cet endroit en une église chrétienne, laquelle fut depuis ruinée par les Danois.

Edouard le confesseur rebâtit à neuf cette église dans le onzieme siecle, & voulut qu’elle fût sous l’invocation de S. Pierre. Il employa à cette fondation la dixieme partie de ses revenus, & joignit à sa nouvelle église un monastere ou une abbaye, dans