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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/85

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Sulpitius (Jean), surnommé Verulanus du nom de Véroli sa patrie, florissoit sur la fin du xv. siecle. Il cultiva les belles-lettres avec succès. Il fit imprimer Végèce, & publia le premier Vitruve ; ce que M. Perrault n’auroit pas dû ignorer. C’est encore Sulpitius qui a rétabli l’usage de la musique sur le théatre. Rome qui l’avoit comme perdue, pour donner à la déclamation des acteurs ce que les Grecs donnoient au chant & à l’harmonie, la vit reparoître vers l’an 1480, par les soins & le génie de Sulpitius. Il commença par donner au peuple le plaisir de la musique des opéra sur des théatres mobiles ; ensuite il en amorça le pape & les cardinaux ; enfin son invention fut goûtée de tout le monde, & ce goût se soutiendra long-tems. (D. J.)

VEROMANDUI, (Géog. anc.) Viromandui, Veromandi, & dans Ptolomée Ρομανδυὲς ; peuples de la Gaule belgique, selon Pline, l. IV. c. xvij. Ils habitoient au midi des Nerviens, au nord des Suessones, dont ils étoient séparés par la riviere d’Oise, à l’orient des Ambiani, & au couchant de la forêt d’Ardenne. On juge que leur pays étoit d’une petite étendue, parce que César, bel. gal. l. II. c. iv. dit qu’ils ne promirent que dix mille hommes pour la guerre commune contre les Romains, tandis que les Suessones & les Nervii promirent de fournir chacun cinquante mille hommes.

Le pays conserve encore présentement le nom de ses peuples. On l’appelle le Vermandois. (D. J.)

VEROMETUM, (Géog. anc.) ville de la grande Bretagne. Elle est placée par l’itinéraire d’Antonin sur la route de Londres à Lindum, entre Ratæ & Maridunum, à treize milles de chacun de ces lieux. Cette même ville dans la route d’Yorck à Londres, est nommée Vernemetum. Quelques-uns ont voulu que ce fût présentement Willonghby ; mais Camden & d’autres géographes soutiennent que c’est Burrowhill.

L’auteur des délices d’Angleterre dit, p. 376 : à deux ou trois milles au midi de Bonton-lazera, entre Burrow-hill & Ead-Burrow, s’éleve une colline fort roide & escarpée de toutes parts, à la réserve du côté du sud-est, où elle est accessible. On y voit au sommet les débris d’une ville ancienne, qu’on juge être Vernemetum. Il y a un double fossé & une enceinte de murailles qui occupe environ dix-hait acres d’étendue. On pourroit croire qu’il y avoit dans ce lieu quelque temple fameux dédié à quelque divinité payenne, parce que Vernemetum, en vieux gaulois, signifie un grand temple.

Il y a long-tems que cette remarque est faite. On la doit à Fortunat, l. I. carm. 9, qui explique ainsi le nom de Vernemetum.

Nomine Vernemetis voluit vocitare vetustas ;
Quod quasi fanum ingens gallia lingua refert.


(D. J.)

VERONA, (Géog. anc.) ville d’Italie, sur l’Adige, dans les terres, aux confins de l’ancienne Rhétie. Elle fut fondée, selon Pline, l. III. c. xix. par les Rhétiens & par les Euganéens en commun ; mais Tite-Live, l. V. c. xxxv. fait entendre qu’elle fut bâtie par une troupe de gaulois, qui après avoir passé les Alpes sous la conduite d’Elitovius, s’établirent, ubi nunc, dit-il, Brixia ac Verona urbes sunt. Tout cela néanmoins peut se concilier, en disant que Verone doit ses commencemens aux Rhétiens & aux Euganéens, & que les Gaulois s’étant emparés du Bressan, se rendirent ensuite maîtres du Véronèse. Martial, l. XIV. epigr. 195, parle de Verone comme d’une ville considérable.

Tantùm magna suo debet Verona Catullo,
Quantùm parva suo Mantua Virgilio.

Tacite qui lui donne le nom de colonie romaine, fait l’eloge de sa beauté & de son opulence. Cn. Pompeius Arabo, pere du grand Pompée, avoit été le conducteur de la colonie, qui fut renouvellée sous Gallien, & honorée du titre de colonia augusta. Un double arc-de-triomphe, qui a été autrefois une des portes de la ville, conserve l’inscription suivante :

Colonia Augusta Verona Nova Gallieniana
Valeriano II. & Lucilio Cons.
Muri Veronensium Fabricati ex die III.
Non. April.
Dedicati Pr. Non. Decembris
Jubente Sanctissimo Galueno. Aug. N.

Les habitans de cette ville sont communément appellés Veronenses par les anciens auteurs ; cependant on a d’anciennes inscriptions où ils sont nommés Verones.

Verone fut heureuse sous les empereurs ; mais elle éprouva de tristes malheurs lors de la chûte de l’empire d’Occident, & elle a souffert depuis plusieurs révolutions qui l’ont dépouillée de toute son ancienne splendeur.

Elle fut pillée par Attila, & possédée successivement par Odoacre, roi des Herules, par Théodoric, roi des Goths, & par ses successeurs jusqu’à Totila, par les Lombards, par Charlemagne & par sa postérité ; mais lorsque ses descendans perdirent l’empire, il s’eleva plusieurs seigneurs qui tâcherent de se rendre souverains dans plusieurs villes d’Italie. Cela dura jusqu’à Othon I. qui réunit à l’empire divers états qui en avoient été détachés. Verone rentra alors dans la masse, mais elle reçut le pouvoir d’élire ses magistrats ; de sorte qu’elle étoit proprement une république libre sous le nom de ville impériale.

Cet état dura jusqu’à ce qu’Actiolin se fût emparé de la puissance souveraine : ce qui ne se fit qu’avec beaucoup d’effusion de sang. Il jouit de la tyrannie trente-trois ans, & mourut l’an 1269. Après cela les Véronois élurent pour général Martin de l’Escale, & se trouverent si bien de sa conduite, qu’ils le creerent dictateur perpétuel.

Ses descendans commanderent dans Verone avec beaucoup de réputation, & en furent créés princes par l’empereur l’an 1310. Ils se rendirent formidables par leurs conquêtes, & furent chassés de Verone l’an 1387, par Jean Galéas, duc de Milan. Ils y rentrerent l’an 1404 ; mais ils ne la garderent guere ; car les Vénitiens s’en emparerent l’an 1409, & la possedent encore.

Cette ville se glorifie d’avoir produit des savans illustres depuis la renaissance des lettres, & sous l’ancienne Rome, Catulle, Cornelius Nepos, Macer, Vitruve & Pline le naturaliste.

Catulle (Caïus Valerius Catulus) naquit l’an 666 de Rome ; & quoique S. Jérôme le fasse mourir l’an 696, à l’âge de trente ans, il poussa sa carriere au moins dix ans de plus. Il ne fut pas gratifié des biens de la fortune ; cependant son esprit fin & délicat le fit rechercher de tous les grands de Rome. Ses poésies plaisent par une simplicité élégante, & par des graces naïves que la seule nature donne à ses favoris. Il imagina le vers hendécasyllabe, qui est si propre à traiter les petits sujets ; mais il en abusa pour y semer des obscénités qui révoltent la pudeur. Il devoit d’autant mieux s’en abstenir, que c’est dans la peinture des sentimens honnêtes que sa muse excelle. Il a l’art de nous attendrir, & il est parvenu à nous faire partager la vive douleur qu’il témoigne de la mort de son frere que nous n’avons jamais connu (épigr. 67, 69, 102.). Admirateur de Sapho, il transporta ou imita dans ses poésies plusieurs morceaux de celles de l’amante de Phaon.

Il savoit bien aussi, quand il le vouloit, aiguiser