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L’impériale 21 est posée sur ces montans. L’impériale est une espece de toit ou carcasse de menuiserie couverte de cuir, & ornée de clous & de pomettes dorées, selon le goût de l’ouvrier. Elle est un peu convexe pour rejetter les eaux de la pluie. Elle est composée d’un chassis qui assemble tous les montans, & de plusieurs barreaux courbes de bois de hêtre, qui se réunissent à son centre, où ils sont assemblés sur un disque de bois qui en occupe le milieu & qu’on appelle l’ovale. Ces barreaux sont recouverts de voliches fort menues & bien collées de colle-forte ; ensorte que le tout ne forme, pour ainsi dire, qu’une seule piece. C’est sur cet appareil que le cuir est tendu.

La hauteur de ce coffre est comme divisée en deux par des traverses 22, 22, 22, qui en font tout le tour, excepté par-devant. On appelle ces traverses, ceintures. Elles sont assemblées avec les montans à tenons & à mortoises, & sont ornées de diverses moulures. La partie inférieure de la chaise est fermée par des panneaux 23, 23, enrichis de peintures ou chargés des armes du propriétaire. Ces panneaux sont de bois de noyer, & ont deux lignes d’épaisseur au plus. Il faut qu’ils soient d’une seule piece pour être solides. On les garnit intérieurement de nerfs ou ligamens de bœufs, battus, peignés, & appliqués avec de la bonne colle-forte, de maniere que les filets de ligamens traversent le fil du bois. On unit cet apprêt par le moyen d’une lissette. Voyez l’art. Lissette. On se sert de la lissette pendant que la colle est encore chaude ; le tout est ensuite couvert avec de bonne toile forte, neuve, & pareillement lissée & collée. Les bandes de toile qu’on employe à cet usage, ont quatre à cinq pouces de large ; on les trempe dans la colle chaude, & on les applique sur les panneaux, de maniere que les fils de la chaîne soient perpendiculaires aux fils du bois. Ces bandes sont écartées les unes des autres de deux pouces ou environ. Mais les panneaux ne sont pas les seules parties qu’on fortifie de cette maniere. On couvre de pareilles bandes tous les assemblages en général, & on en étend dans tous les endroits qui doivent être garnis de clous. Cette opération faite, & la colle sechée, on fait imprimer la caisse de la chaise d’une couleur à l’huile ; ensuite on la fait ferrer ; c’est-à-dire garnir de plaques de taule, fortes & capables d’affermir les assemblages. On y place encore différentes pieces de fer dont nous parlerons dans la suite.

Le dessus des panneaux de côtés est quelquefois tout d’une piece, & d’autres fois il est divisé en deux parties par un montant qui s’assemble dans la ceinture & dans le chassis de l’impériale : si le côté n’est pas divisé en deux panneaux, la chaise en sera plus solide. La partie du côté de devant qu’on appelle fenêtre 24, est occupée par une glace qui se leve & se baisse dans des coulisses pratiquées aux montans ; ensorte que quand la glace est baissée, elle est entierement renfermée dans un espace pratiqué derriere le panneau qu’on appelle la coulisse. Il y a à ces glaces, ainsi qu’à celle de devant, en-dedans de la chaise, un store de taffetas, & en-dehors un store de toile cirée 25, 25 placés sous la gouttiere de la corniche de l’impériale. Le store du dedans garantit du soleil ; celui de dehors, de la pluie, de la grêle, & autres injures du tems. La partie 26 de la chaise au-dessus de la ceinture & à côté de la fenêtre s’appelle custode. Elle est fermée à demeure, ainsi que le dossier, & couverte de cuir tendu sur les montans & entouré de clous de cuivre doré ; il n’y a point là de panneaux. Le cuir bien tendu est seulement matelassé de crin, & les matelas soutenus par des sangles qui empêchent que le cuir ne soit enfoncé. Les

sangles sont placées en travers & fixées sur les montans.

Le siege est appuyé au dossier, un peu au-dessous de la ceinture. C’est un véritable coffret dont le couvercle se leve à charniere, & est recouvert d’un coussin, sur lequel on s’assied. Tout l’intérieur de la chaise est matelassé de crin, & tendu de quelque étoffe précieuse, mais de résistance, comme velours, damas, &c.

La porte 27 est sur le devant. Cette porte qu’on appelle porte à la Toulouse, a ses couplets à charniere dans une ligne horisontale, & s’ouvre par le haut en se renversant du côté du cheval de brancard sur la courroie qu’on appelle support de porte, & qui est tendue au-travers du brancard, à un pié environ au-dessus de la traverse des soupentes. Cette porte differe principalement des portes ordinaires, en ce que celles-ci ont leurs gonds & sont mobiles dans une ligne verticale.

Les panneaux 28 du côté de cette porte sont des especes de triangles séparés en deux parties par un joint. La partie inférieure qui est adhérente au brancard de chaise s’appelle gousset. C’est vis-à-vis un de ces goussets que le brancard dérobe dans notre figure, que doit être le marche-pié 29. Ce marchepié est de cuir ; il est fixé sur le brancard qu’il entoure. C’est là, ainsi que le mot l’indique assez, que le propriétaire met le pié pour entrer dans sa chaise.

La porte à la Toulouse ne monte guere plus haut que la ceinture de la chaise. Elle s’applique contre les montans de devant. Ces montans sont renforcés au-dessus de la porte, d’une piece de bois où l’on a pratiqué une rainure appellée apsiché, dans laquelle la glace du devant peut glisser : lorsque cette glace est baissée, elle est entierement renfermée dans la porte. La porte est composée extérieurement d’un panneau semblable à ceux de côté & de derriere, & intérieurement d’une planche matelassée de crin & recouverte de la même étoffe que le reste du dedans de la chaise. On voit évidemment qu’il n’est pas possible d’entrer dans la chaise, sans avoir abaissé la glace dans la portiere. Il y a encore à la portiere sur le milieu, une serrure à deux pêles, avec un bouton à olive ; ces deux pêles vont se cacher dans un des montans. On peut aussi remarquer au-dessus de la ceinture, dans le montant de devant, contre lequel la porte s’applique en se fermant, une poignée M, que celui qui veut entrer dans la chaise saisit, & qui l’aide à s’élever sur le brancard.

Le dessus de l’impériale, outre les clous dorés dont il est enrichi, & qui attachent sur la carcasse de menuiserie dont nous avons parlé, le cuir qui la couvre, est encore orné de quatre ou six pommettes 30, 30, 30, de cuivre ciselées & dorées. Ces pommettes sont fixées à plomb au-dessus des montans des angles, quand il n’y en a que quatre. Quand il y en a six, les deux autres sont au-dessus des montans qui séparent les glaces des côtés, des custodes : mais dans ce cas la corniche de l’impériale est cintrée au-dessus des glaces.

Le fond ou le dessous de la chaise est occupé par un coffre qu’on appelle cave. Ce coffre 31 a environ six pouces de profondeur ; il est fortement uni au chassis de la chaise par plusieurs bandes de fer ; il est revêtu extérieurement de cuir cloué avec des clous dorés, & intérieurement d’une peau blanche ; il s’ouvre en-dedans de la chaise ; & c’est sur son couvercle pareillement revêtu de cuir que sont posés les pieds du voyageur.

Il ne nous reste plus maintenant qu’à expliquer comment la chaise est suspendue dans le brancard du train, & comment elle y est tenue dans une liberté telle qu’elle ne se ressent presque pas des chocs ou cahos que les roues peuvent éprouver dans les chemins pierreux.