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donnent de la voix, & quêtent bien. Ils sont longs de corsage, très-bas, & assez bien coeffés.

Les braques sont de toute taille, bien coupés, vigoureux, legers, hardis, infatigables, & ras de poil : ils ont le nez excellent : ils chassent le lievre sans donner de la voix, & arrêtent fort bien la perdrix, la caille, &c.

Les chiens couchans chassent de haut nez, & arrêtent tout, à moins qu’ils n’ayent été autrement élevés. Ils sont grands, forts, legers : les meilleurs viennent d’Espagne. Ils sont tous sujets à courir après l’oiseau, ce qu’on appelle piquer la sonnette.

Les épagneuls sont plus fournis de poil que les braques, & conviennent mieux dans les pays couverts. Ils donnent de la voix ; ils chassent le lievre & le lapin, & arrêtent aussi quelquefois la plume. Ils sont assez ordinairement foibles. Ils ont le nez excellent, & beaucoup d’ardeur & de courage. On range dans cette classe une espece de chiens qui vient d’Italie & de Piémont, à poil hérissé droit, assez haut, & chassant tout, & qu’on appelle chien grison.

Les barbets sont fort vigoureux, intelligens, hardis, ont le poil frisé, & vont à l’eau.

Les limiers sont hauts, vigoureux, & muets ; ils servent à quêter & à détourner le cerf.

Les dogues servent quelquefois à assaillir les bêtes dangereuses. On met les mâtins dans le vautrait pour le sanglier.

Les levriers sont hauts de jambes, chassent de vîtesse & à l’œil, le lievre, le loup, le sanglier, le renard, &c. mais sur-tout le lievre. On donne le nom de charnaigres à ceux qui vont en bondissant, soit qu’ils soient francs soit qu’ils soient métifs ; de harpés, à ceux qui ont les côtes ovales & peu de ventre ; de gigotés, à ceux qui ont les gigots courts & gros, & les os éloignés ; de nobles, à ceux qui ont la tête petite & longue, l’encolure longue & déliée, le rable large & bien fait ; d’œuvrés, à ceux qui ont le palais noir, &c.

Les chiens courans chassent le cerf, le chevreuil, le lievre, &c. On dit que ceux qui chassent la grande bête sont de race royale ; ceux qui chassent le chevreuil, le loup, le sanglier, sont de race commune ; & que ceux qui chassent le lievre, le renard, le lapin, le sanglier, sont chiens baubis ou bigles.

On a quelque égard au poil pour les chiens : on estime les blancs pour le cerf ; après eux les noirs ; on néglige les gris & les fauves : au reste de quelque poil qu’on les prenne, il faut qu’il soit doux, délié, & touffu.

Quant à la forme, il faut que les chiens courans ayent les naseaux ouverts ; le corps long de la tête à la queue ; la tête legere & nerveuse ; le museau pointu ; l’œil grand, élevé, net, luisant, plein de feu ; l’oreille grande, souple, pendante, & comme digitée ; le cou long, rond, & flexible ; la poitrine large ; les épaules éloignées ; la jambe ronde, droite, & bien formée ; les côtés forts ; le rein large, nerveux, peu charnu ; le ventre avalé ; la cuisse détachée ; le flanc sec & écharné ; la queue forte à son origine, mobile, sans poil à l’extrémité, velue ; le dessous du ventre rude ; la patte seche, & l’ongle gros.

Pour avoir de bons chiens, il faut choisir des lices de bonne race, & les faire couvrir par des chiens beaux, bons, & jeunes. Quand les lices sont pleines, il ne faut plus les mener à la chasse, & leur donner de la soupe au moins une fois le jour. On ne châtrera que celles qui n’ont point encore porté, ou l’on attendra qu’elles ne soient plus en amour, & que les petits commencent à se former. On fera couvrir les lices en Décembre & Janvier, afin que les petits viennent en bonne saison. Quand les lices

ne sont pas alors en chaleur, on les y mettra par la compagnie d’une chienne chaude, & on les y laissera trois jours avant que de les faire couvrir. On tient sur la paille dans un endroit chaud ceux qui viennent en hyver ; on nourrit bien la mere : on coupe le bout de la queue aux petits au bout de quinze jours, & le tendon qui est en-dessous de l’oreille, pour qu’elle tombe bien, & au bout d’un mois le filet. On les laisse avec la mere jusqu’à trois mois ; on les sevre alors ; on ne les met au chenil qu’à dix : alors on les rendra dociles ; on les accouplera les uns avec les autres ; on les promenera ; on leur sonnera du cors ; on leur apprendra la langue de la chasse : on ne les menera au cerf qu’à seize ou dix-huit mois, & l’on observera de leur faire distinguer le cerf de la biche, de ne les point instruire dans les toiles, & de ne les point faire courir le matin.

Le jour choisi pour la leçon des jeunes chiens, on place les relais ; on met à la tête de la jeune meute quelques vieux chiens bien instruits, & cette harde se place au dernier relais ; quand le cerf en est là, on découple les vieux pour dresser aux jeunes les voies ; on lâche les jeunes, & les piqueurs armés de foüets les dirigent, foüettant les paresseux, les indociles, les vagabonds : lorsque le cerf est tué, on leur en donne la curée comme aux autres. Les essais se réiterent autant qu’il le faut. Cette éducation a aussi sa difficulté.

Il faut qu’un chenil soit proportionné à la meute, que les chiens y soient bien tenus & bien pansés : il est bon qu’il y ait un ruisseau d’eau vive. Les valets de chiens doivent être logés dans le voisinage. Il y aura une cheminée dans chaque chambrée de chiens ; car ces animaux ont besoin de feu pour les sécher quand ils ont chassé dans des tems froids & humides, & pour les délasser. Il ne faut pas que l’exposition du chenil soit chaude ; la chaleur est dangereuse pour les chiens ; il faut qu’il soit bien airé.

L’éducation du chien couchant consiste à bien quêter, à obéir, à arrêter ferme. On commence à lui faire connoître son gibier : quand il le connoît, on le lui fait chercher ; quand il le sait trouver, on l’empêche de le poursuivre ; quand il a cette docilité, on lui forme tel arrêt qu’on veut ; quand il sait cela, il est élevé, car il a appris la langue de la chasse en faisant ces exercices. La docilité, la sagacité, l’attachement, & les autres qualités de ces animaux, sont surprenantes.

On leur montre encore à rapporter, ce qu’ils exécutent très-facilement ; on les accoûtume à aller en trousse, & on les enhardit à l’eau.

Leurs allures & leurs défauts leur ont fait donner différens noms. On nomme chiens allans, de gros chiens employés à détourner le gibier ; chiens trouvans, ceux d’un odorat singulier, sur-tout pour le renard, dont ils reconnoissent la piste au bout d’un long tems ; chiens batteurs, ceux qui parcourent beaucoup de terrein en peu de tems ; ils sont bons pour le chevreuil ; chiens babillards, ceux qui crient hors la voie ; chiens menteurs, ceux qui celent la voie pour gagner le devant ; chiens vicieux, ceux qui s’écartent en chassant tout ; chiens sages, ceux qui vont juste ; chiens de tête & d’entreprise, ceux qui sont vigoureux & hardis ; chiens corneaux, les métifs d’un chien courant & d’une mâtine, ou d’un mâtin & d’une lice courante ; clabauds, ceux à qui les oreilles passent le nez de beaucoup ; chiens de change, celui qui maintient & garde le change ; d’aigail, qui chassent bien le matin seulement ; étouffé, qui boite d’une cuisse, qui ne se nourrit plus ; épointé, qui a les os des cuisses rompus ; allongé, qui a les doigts du pié distendus par quelque blessure ; armé, qui est couvert pour attaquer le sanglier ; à belle gorge, qui