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subdivision des conjugaisons, & la distinction des tems des verbes, se tire de cette lettre figurative, ou caractéristique.

3. La voyelle, ou la diphtongue qui précedent la terminaison.

4. Enfin, il faut observer l’augment. Les lettres que l’on ajoûte avant la premiere syllable du thême du verbe, ou le changement qui se fait au commencement du verbe, lorsqu’on change une breve en une longue, est ce qu’on appelle augment ; ainsi il y a deux sortes d’augments. 1. L’augment syllabique qui se fait en certains tems des verbes qui commencent par une consonne, par exemple, τύπτω verbero, est le thême sans augment ; mais dans ἔτυπτον, verberabam, est l’augment syllabique, qui ajoûte une syllabe de plus à τύπτω.

2. L’augment temporel se fait dans les verbes qui commencent par une voyelle breve, que l’on change en une longue, par exemple, ἐρύω traho, ἤρυον trahebam.

Ainsi non seulement les verbes grecs ont des terminaisons différentes, comme les verbes latins ; mais de plus, ils ont l’augment qui se fait en certains tems, & au commencement du mot.

Voilà une premiere différence entre les verbes grecs, & les verbes latins.

2. Les Grecs ont un mot de plus ; c’est l’optatif qui en grec a des terminaisons particulieres, différentes de celles du subjonctif ; ce qui n’est pas en latin.

3. Les verbes grecs ont le duel, au lieu qu’en latin ce nombre est confondu avec le pluriel. Les grecs ont un plus grand nombre de tems ; ils ont deux aoristes, deux futurs, & un paulò-post futur dans le sens passif, à quoi les latins suppléent par des adverbes.

5. Enfin les Grecs n’ont ni supins, ni gérondifs proprement dits ; mais ils en sont bien dédommagés par les différentes terminaisons de l’infinitif, & par les différens participes. Il y a un infinitif pour le tems présent, un autre pour le futur premier, un autre pour le futur second, un pour le premier aoriste, un pour le second, un pour le prétérit parfait ; enfin il y en a un pour le paulò-post futur, & de plus il y a autant de participes particuliers pour chacun de ces tems-là.

Dans la langue Allemande, tous les verbes sont terminés, en en à l’infinitif, si vous en exceptez seyn, être, dont l’e se confond avec l’y. Cette uniformité de terminaison des verbes à l’infinitif, a fait dire aux Grammairiens, qu’il n’y avoit qu’une seule conjugaison en Allemand ; ainsi il suffit de bien savoir le paradigme ou modele sur lequel on conjugue à la voix active, tous les verbes réguliers, & ce paradigme, c’est lieben, aimer ; car telle est la destination des verbes qui expriment ce sentiment, de servir de paradigme en presque toutes les langues : on doit ensuite avoir des listes de tous les verbes irréguliers.

J’ai dit que lieben, étoit le modele des verbes à la voix active ; car les Allemands n’ont point de verbes passifs en un seul mot, tel est aussi notre usage, & celui de nos voisins ; on se sert d’un verbe auxiliaire auquel on joint, ou le supin qui est indéclinable, ou le participe qui se décline.

Les Allemands ont trois verbes auxiliaires ; haben, avoir ; seyn, être ; werden, devenir. Ce dernier sert à former le futur de tous les verbes actifs ; il sert aussi à former tous les tems des verbes passifs, conjointement avec le participe du verbe ; surquoi il faut observer qu’en Allemand, ce participe ne change jamais, ni pour la différence des genres, ni pour celle des nombres ; il garde toujours la même terminaison.

A l’égard de l’Anglois, la maniere de conjuguer les verbes de cette langue n’est point analogue à celle des autres langues : je ne sçai si elle est aussi facile qu’on le dit, pour un étranger qui ne se contente pas

d’une simple routine, & qui veut avoir une connoissance raisonnée de cette maniere de conjuguer. Wallis, qui étoit Anglois, dit que comme les verbes anglois ne varient point leur terminaison, la conjugaison qui fait, dit-il, une si grande difficulté dans les autres langues, est dans la sienne une affaire très-aisée, & qu’on en vient fort aisément à bout, avec le secours de quelques mots ou verbes auxiliaires. Verborum flexio seu conjugatio, quæ in reliquis linguis maximam sortitur difficultatem, apud anglos levissimo negotio peragitur… verborum aliquot auxiliarium adjumento ferè totum opus perficitur. Wallis, Gramm. ling. Angl. ch. viij. de verbo.

C’est à ceux qui étudient cette langue à décider cette question par eux-mêmes.

Chaque verbe anglois semble faire une classe à part ; la particule prépositive to, est comme une espece d’article destiné à marquer l’infinitif ; desorte qu’un nom substantif devient verbe, s’il est précédé de cette particule, par exemple, murder, veut dire meurtre, homicide ; mais to murder, signifie tuer : lift, effort, to lift, enlever ; love, amour, amitié, affection, to love, aimer, &c. Ces noms substantifs qui deviennent ainsi verbes, sont la cause de la grande différence qui se trouve dans la terminaison des infinitifs ; on peut observer presque autant de terminaisons différentes à l’infinitif, qu’il y a de lettres à l’Alphabet, a, b, c, d, e, f, g, &c. to flea, écorcher ; to rob, voler, dérober ; to find, trouver ; to love, aimer ; to quaff, boire à longs traits ; to jog, secouer, pousser ; to cath, prendre, saisir ; to thank, remercier ; to call, appeller ; to lam, battre, frapper ; to run, courir ; to help, aider ; to wear, porter ; to toss, agiter ; to rest, se reposer ; to know, savoir ; to box, battre à coups de poing ; to marry, marier, se marier.

Ces infinitifs ne se conjuguent pas par des changemens de terminaison, comme les verbes des autres langues ; la terminaison de ces infinitifs ne change que très-rarement. Ils ont deux participes ; un participe présent toûjours terminé en ing, having, ayant, being, étant ; & un participe passé terminé ordinairement en ed ou ’d, loved, aimé : mais ces participes n’ont guere d’analogie avec les nôtres, ils sont indéclinables, & sont plûtôt des noms verbaux qui se prennent tantôt substantivement & tantôt adjectivement : ils énoncent l’action dans un sens abstrait, par exemple, your marrying signifie votre marier, l’action de vous marier plûtôt que votre mariant. Coming est le participe présent de to come, arriver, & signifie l’action d’arriver, de venir, ce que notre participe arrivant ne rend point. Les Anglois disent his coming, son arrivée, sa venue, son action d’arriver ; & l’idée qu’ils ont alors dans l’esprit, n’a pas la même forme que celle de la pensée que nous avons quand nous disons venant, arrivant. C’est de la différence du tour, de l’imagination, ou de la différente maniere dont l’esprit est affecté, que l’on doit tirer la différence des idiotismes & du génie des langues.

C’est avec l’infinitif & avec les deux noms verbaux ou participes dont nous venons de parler, que l’on conjugue les verbes Anglois, par le secours de certains mots & de quelques verbes auxiliaires. Ces verbes sont proprement les seuls verbes. Ces auxiliaires sont to have, avoir ; to be, être ; to do, faire, & quelques autres. Les personnes se marquent par les pronoms personnels i, je ; thou, tu ; he, il ; she, elle : & au pluriel, we, nous ; you, vous ; they, ils ou elles, sans que cette différence de pronoms apporte quelque changement dans la terminaison du nom verbal que l’on regarde communément comme verbe.

Les grammaires que l’on a faites jusqu’ici pour nous apprendre l’Anglois, du-moins celles dont j’ai