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dit, par exemple, dissolution d’argent, pour exprimer la dissolution de l’argent par l’acide nitreux, & dissolution d’or, pour exprimer la dissolution de l’or par l’eau régale. Ces menstrues ne sont pas pourtant les uniques dissolvans de l’argent & de l’or ; mais ils ont été regardés comme leurs dissolvans propres, leurs dissolvans par excellence, ce qui a suffi pour autoriser cette façon de parler. (b)

Dissolution, terme employé en Médecine, qui a différentes significations. On s’en sert en Pathologie, pour exprimer la décomposition des humeurs. Voyez Décomposition.

Dissolution signifie aussi quelquefois la même chose que défaillance, animi defectus. Voyez Défaillance, Syncope.

Ce terme est encore usité en Chimie & en Pharmacie. (d)

Dissolution, (terme de Morale.) signifie débauche excessive. On entend assez que ce mot emporte l’oubli de toute retenue. Il s’employe particulierement pour exprimer la fréquentation des femmes prostituées. On dit aussi que le carnaval est un tems de dissolution. Nous avons entendu plus d’une fois nos prédicateurs appeller les spectacles des lieux de dissolution ; c’est peut-être user de trop de sévérité envers quelques-uns d’entr’eux.

Dissolution, (Jurispr.) est la rupture d’un acte : la dissolution des engagemens valablement contractés, ne peut être faite que de la même maniere qu’ils ont été formés, c’est-à-dire par le consentement des parties. (A)

Dissolution de Communauté, est la cessation de la communauté de biens qui avoit lieu entre conjoints. Cette dissolution arrive par la mort naturelle ou civile de l’un des conjoints, par la séparation de biens. Pour opérer la dissolution de la communauté, quand il y a des enfans mineurs du conjoint prédécédé, il faut que le survivant fasse inventaire avec un légitime contradicteur, & qu’il le fasse clore dans les coûtumes qui exigent cette formalité ; quand le tout est fait dans le tems reglé par la coûtume, la dissolution de la communauté a un effet rétroactif au jour du décès : faute d’inventaire & de clôture dans les coûtumes où elle est nécessaire, la communauté continue. Voyez Clôture, Communauté, Continuation de Communauté, & Inventaire, Mineur. (A)

Dissolution de Mariage, est la déclaration qu’un mariage est nul : cette expression est impropre ; car un mariage valablement contracté est indissoluble ; la séparation de biens ni même celle de corps n’operent pas la dissolution du mariage. Les causes qui operent ce que l’on appelle la dissolution du mariage, sont les nullités de mariage, comme empêchemens dirimans pour cause d’impuissance, force, violence, parenté, ou alliance en degré prohibé, & autres semblables.

La profession monastique de l’un des conjoints, peut aussi opérer la dissolution du mariage, quand il n’a pas été consommé. Voyez Abus, Divorce, Empêchemens, Mariage, Nullité. (A)

Dissolution de Société, est la rupture d’une société qui étoit établie entre plusieurs personnes.

Cette dissolution arrive par la mort d’un des associés.

L’infidélité d’un des associés est aussi un moyen pour demander la résolution de la société. Voyez Société. (A)

DISSONNANCE, s. f. en Musique, est tout accord desagréable à l’oreille, tout intervalle qui n’est pas consonnant ; & comme il n’y a point d’autres consonnances que celles que forment entr’eux les sons de l’accord parfait, (Voyez Consonnance), il s’ensuit que tout autre intervalle est une véritable dissonnance : les anciens ajoûtoient même à ce nombre les tierces & les sixtes qu’ils n’admettoient point pour accords consonnans.

Il y a donc une infinité de dissonnances possibles ; mais dans la Musique, comme il faut exclure tous les intervalles que le système reçu ne fournit pas, elles se réduisent à un assez petit nombre ; encore pour la pratique ne doit-on choisir parmi celles-là que celles qui conviennent au genre & au mode, &

enfin exclure même de ces dernieres toutes celles qui ne peuvent s’employer selon les regles prescrites.

Le principe physique de l’harmonie se trouve dans la production de l’accord parfait par un son quelconque. Toutes les consonnances en naissent, & c’est la nature même qui les fournit. Il n’en est pas ainsi de la dissonnance. Nous trouvons bien, si l’on veut, sa génération dans les différences des consonnances, mais nous n’appercevons point de raison physique qui nous autorise à les introduire dans le corps même de l’harmonie. Le P. Mersenne se contente de montrer la génération & les divers rapports des dissonnances, tant de celles qui sont rejettées, que de celles qu’on admet, mais il ne dit rien du droit de les employer. M. Rameau dit en termes formels que la dissonnance n’est pas naturelle à l’harmonie, & qu’elle n’y peut être employée que par le secours de l’art. Cependant dans un autre ouvrage, il essaie d’en trouver le principe dans les rapports des nombres & les proportions harmonique & arithmétique. Mais après avoir bien épuisé des analogies, après bien des métamorphoses de ces diverses proportions les unes dans les autres, après bien des opérations, après bien des calculs, il finit par établir sur de legeres convenances les dissonnances qu’il s’est tant fatigué à chercher. Ainsi, parce que dans l’ordre des sons harmoniques la proportion arithmétique lui donne, à ce qu’il prétend, une tierce mineure au grave ; il ajoûte au grave de la soû-dominante une nouvelle tierce mineure : la proportion harmonique lui donne la tierce mineure à l’aigu, & il ajoûte à l’aigu une nouvelle tierce mineure. Ces tierces ajoûtées ne font point, il est vrai, de proportion avec les rapports précédens ; les rapports mêmes qu’elles devroient avoir se trouvent altérés. Mais M. Rameau croit pouvoir tout concilier : la proportion lui sert pour introduire la dissonnance, & le défaut de proportion lui sert pour la faire sentir.

Personne donc n’ayant trouvé jusqu’ici le principe physique de la dissonnance employée dans l’harmonie, nous nous contenterons d’expliquer mécaniquement sa génération, & nous laisserons-là les calculs.

Je suppose la nécessité de la dissonnance reconnue. (Voyez Harmonie & Cadence.) Il s’agit de voir où l’on doit la prendre, & comment il faut l’employer.

Si l’on compare successivement tous les sons de l’échelle diatonique avec le son fondamental dans chacun des deux modes, on n’y trouvera pour toute dissonnance que la seconde & la septieme qui n’est qu’une seconde renversée, & qui fait réellement seconde avec l’octave. Quelques-autres intervalles altérés peuvent devenir dissonnans ; mais si la seconde ne s’y trouve pas exprimée ou sous-entendue, ce sont seulement des accidens de modulation auxquels l’harmonie n’a aucun égard, & ces dissonnances ne sont point alors traitées comme telles. Ainsi c’est une chose certaine qu’où il n’y a point de seconde, il n’y a point de dissonnances, & la seconde est proprement la seule dissonnance qu’on puisse employer.

Pour réduire toutes les consonnances à leur moindre intervalle, ne sortons point des bornes de l’octave. Prenons l’accord parfait, sol, si, ré, sol, & voyons en quel lieu de cet accord nous pourrions placer une dissonnance, c’est-à-dire une seconde, pour la rendre le moins choquante à l’oreille qu’il est possible. Sur le la entre le sol & le si, elle feroit seconde avec l’une & avec l’autre, & par conséquent dissonneroit doublement. Il en seroit de même entre le si & le , comme entre tout intervalle de tierce ; reste l’intervalle de quarte entre le & le