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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 4.djvu/11

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ont rapport, soit entre le prince & ses sujets, soit entre ses sujets seulement ; enfin le conseil d’état privé ou des parties pour les autres affaires contentieuses, qui sont de nature à être portées au conseil du prince, telles que les cassations, évocations & autres, ainsi qu’on l’a expliqué en commençant.

L’origine du conseil de Dombes est aussi ancienne que la souveraineté même de Dombes, qui fut formée au commencement du xj. siecle des débris du second royaume de Bourgogne, lequel avoit été uni à l’empire ; les sires de Baugé & les sires de Villars auxquels succéderent ceux de Thoire, possédoient en souveraineté chacun une partie de la Dombes ; chacun d’eux avoit près de lui dans sa capitale un conseil souverain qui formoit son conseil d’état, & où il jugeoit aussi en dernier ressort les appels interjettés de ses juges inférieurs. Chacun de ces deux conseils étoit composé de quelques ecclésiastiques, de plusieurs gentilshommes & de quelques docteurs en droit.

Les seigneurs de Beaujeu acquirent peu-à-peu dans les xij. & xiij. siecles, tant par conquête que par alliance & à prix d’argent, tout ce que les sires de Baugé possédoient en Dombes à titre de souveraineté, & une partie de ce que les sires de Thoire & de Villars y possédoient aussi au même titre. Ils avoient d’abord leur conseil souverain à Villefranche en Beaujolois, où ils faisoient leur séjour ; mais ayant fait bâtir en Dombes la ville de Beauregard, présentement ruinée, ils y transporterent le siége de leur conseil souverain.

Louis de Bourbon II. du nom, prince de Dombes, transféra ce même conseil à Moulins où il faisoit sa demeure ordinaire.

Ce conseil subsista dans cet état jusqu’en 1522, que Charles de Bourbon, connétable de France & prince de Dombes, ayant pris le parti de Charles-Quint, le roi François I. s’empara de la Dombes par droit de conquête, & cassa aussi-tôt le conseil qui étoit à Moulins.

Par des lettres patentes du mois de Novembre 1523, le roi François I. créa pour le pays de Dombes un nouveau conseil souverain, qui dans la suite a été qualifié de parlement. Il ordonna que ce conseil auroit sa séance à Lyon, & lui attribua la connoissance de toutes les appellations qui étoient auparavant portées au conseil de Moulins : mais il n’attribua point à ce nouveau conseil de Dombes le pouvoir de juger les cassations, évocations, reglemens de juges, & autres affaires qui sont de nature à être portées directement au conseil du prince. Lorsqu’il se présentoit en Dombes quelques affaires de cette qualité, on les portoit au conseil du roi, attendu que la Dombes étoit alors soûmise à la France, & que le roi n’a qu’un seul conseil d’état & privé pour tous les pays de sa domination.

Ainsi les fonctions qu’avoit auparavant le conseil de Moulins furent alors partagées entre le conseil du roi & le nouveau conseil de Dombes, appellé depuis parlement ; ensorte que l’institution de ce parlement ne fut proprement qu’un démembrement de fonctions du conseil de Moulins, & que le conseil du roi prit alors la place de celui de Moulins pour les affaires qui sont naturellement du ressort du conseil du prince.

La principauté de Dombes ayant été délaissée en 1527 à Louise de Savoie, mere de François I. comme plus proche parente de Susanne de Bourbon femme du connétable, pour en jouir sa vie durant en toute souveraineté, le conseil de France cessa alors de prendre connoissance des affaires de Dombes, lesquelles furent portées au conseil souverain que la princesse avoit près de sa personne ; mais ce conseil fut supprimé après le decès de cette princesse arrivé

en 1531, & le conseil de France prit pour la seconde fois connoissance des affaires de Dombes.

Enfin par transaction du 27 Novembre 1560, le roi François II. restitua la principauté de Dombes à Louis de Bourbon duc de Montpensier, son légitime souverain, pour en joüir en tous droits de souveraineté, tels que les avoient Anne de France & Charles de Bourbon ses prédécesseurs ; souveraineté qui a encore été reconnue depuis dans tous les tems, notamment par Louis XIV. dans des lettres patentes du mois de Mars 1682, registrées au parlement.

Aussi-tôt que le duc de Montpensier fut rentré dans sa principauté de Dombes, il rétablit près de sa personne un conseil souverain ou conseil d’état & privé pour les affaires de sa principauté.

Il en est fait mention dans le premier édit ou ordonnance que ce prince donna le 15 Septembre 1561. Cet édit est adressé au parlement de Dombes, & le prince annonce qu’il l’a fait avec grande & mûre délibération du conseil étant lez nous ; & l’édit est donné à Champigny par monseigneur prince souverain de Dombes étant en son conseil. Ce Champigny est une ville de Touraine dont il étoit seigneur.

Dans un autre édit du mois de Juillet 1576, il qualifie son conseil de conseil d’état ; il fait mention de diverses ordonnances faites par lui & son conseil d’état, notamment une cottisation faite dans ce conseil pour les fortifications & réparations des murailles des villes. Il casse un arrêt du parlement de Dombes contraire à ces ordonnances.

L’édit par lui donné sur la même matiere, le premier Juin 1587, porte que le parlement de Dombes avoit envoyé faire des remontrances par le sieur de Langes conseiller, duquel le prince avoit entendu en son conseil le motif du parlement ; qu’il avoit fait dresser en son conseil des articles pour une information, laquelle avoit été envoyée pardevers lui & son conseil, auquel ayant été mûrement vûe & considérée, de l’avis de son conseil il fait un réglement.

L’ordonnance qu’il fit au mois de Juin de la même année, contenant un réglement général pour l’administration de la justice, n’est donnée qu’après avoir eu sur ce l’avis des principaux des ses officiers de justice & gens de son conseil.

Henry de Montpensier donna en 1594 trois ordonnances au sujet des monnoies qui se fabriquoient dans sa principauté, suivant le droit que les princes de Dombes en ont toujours eu : ces ordonnances sont faites en son conseil & par l’avis d’icelui.

On voit aussi par les minutes & registres du conseil de Dombes, que dès l’an 1642 ce conseil étoit déjà qualifié de conseil souverain ; que dans tous les actes de ce conseil mademoiselle de Montpensier souveraine de Dombes, est qualifiée Madame ; que depuis 1651, tems auquel elle étoit entrée en jouissance de ses biens, son conseil se tenoit souvent en sa présence ; qu’il y a même plusieurs arrêts qui sont signés de cette princesse ; & que l’on traitoit dans ce conseil de tout ce qui regardoit les finances, les monnoies, & généralement de toutes les affaires de la principauté tant du dedans que du dehors.

Les autres souverains de Dombes en ont tous usé de même à l’égard de leur conseil, auquel ils ont toujours fait l’honneur de le consulter sur les affaires les plus importantes de leur principauté. Il suffit, pour dernier exemple, de citer la déclaration du 17 Mai 1736, de Louis-Auguste de Bourbon actuellement prince de Dombes, sur son avenement à la souveraineté, qui est donnée de l’avis de son conseil ; ce qui confirme que ce conseil n’est pas seulement un conseil privé ou des parties, mais qu’il est aussi le conseil d’état du prince & qu’il en a toujours fait les fonctions.

Ce conseil étant à la suite du prince & près de sa personne, a tenu ses séances dans les différens lieux