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L’attribution qui lui fut faite par une déclaration du 15 Septembre 1576, de la connoissance des droits de franc-fiefs & nouveaux acquêts, est une suite de la part qu’il a pris de toute ancienneté à l’administration & régie des domaines du Roi, ainsi que l’attribution des affaires concernant les droits de tabellionage, par déclaration du 7 Août 1548.

Les contestations pour le payement des dix livres tournois qui sont dûes par les prélats après leur nomination, celles concernant les oblats, ainsi que la réformation des hôpitaux & maladreries, ont été attribuées au grand-conseil du chef du grand aumônier.

De même toute la police des eaux minérales, & des brevets pour vendre les remedes, & de la chirurgie & barberie, lui ont été attribués du chef du premier medecin & du premier chirurgien.

Le Roi a encore de tout temps employé le grand-conseil pour établir une jurisprudence uniforme dans tout le royaume sur certaines matieres, telles que les usures, les banqueroutes, les recélés des corps morts des bénéficiers.

C’est par une raison à-peu-près semblable que la plûpart des grands ordres ont obtenu le droit d’évocation au grand-conseil, afin que le régime & la discipline de ces grands corps ne soit point interverti par la diversité de jurisprudence, & qu’ils ne soient pas obligés de disperser leurs membres dans tous les tribunaux

Les secrétaires du Roi ont de tout tems joüi du même droit : les trésoriers de France l’ont aussi obtenu.

Enfin le grand-conseil a souvent suppléé les cours souveraines pour le jugement de certaines affaires qui en ont été évoquées : on lui attribua même au mois de Février 1659 tous les procès du ressort du parlement de Dijon.

Il ne seroit pas possible d’entrer ici dans le détail de toutes les différentes attributions dont le grand-conseil a joüi plus ou moins long-tems ; il suffit d’avoir donné par quelques exemples l’idée de celles qui conviennent à son institution.

On doit seulement encore ajoûter que la jurisdiction de la prevôté de l’hôtel y ressortit en matiere civile ; & cette attribution fort ancienne, est en même tems un privilége pour les officiers de la maison du Roi, la conséquence de sa destination à connoître des matieres qui sont sous la direction des grands & principaux officiers, & la preuve de la confiance que les rois ont eue de tout tems en ce tribunal pour les affaires de leur cour & suite.

Le grand-conseil a continué d’être ambulatoire à la suite de nos rois, & il joüit en conséquence du droit d’avoir à sa suite un marchand & un artisan privilégiés de chaque art & métier.

Il a tenu ses séances à Paris en différens endroits, notamment au Louvre, aux Augustins, & dans le cloître de S. Germain de l’Auxerrois.

Par un arrêt du conseil d’état du 6 Juillet 1686, le roi permit aux officiers du grand-conseil d’établir leur séance en l’hôtel d’Aligre, & d’en passer bail aux clauses & conditions qu’ils aviseroient bon être ; il y eut le 17 du même mois des lettres patentes pour la translation du grand-conseil, & depuis ce tems il a toujours tenu ses séances en ce lieu.

Ce tribunal est présentement composé de M. le chancelier, qui est le seul chef & président né de cette compagnie ; d’un conseiller d’état commis par lettres patentes du Roi pour y présider pendant un an ; de huit maîtres des requêtes, qui sont aussi présidens par commission pendant quatre années ; il y en a quatre dans chaque semestre ; les anciens présidens honoraires, dont les offices ont été supprimés, qui ont rang de maîtres des requêtes ; les con-

seillers d’honneur, dont le nombre n’est pas fixe,

mais qui sont présentement au nombre de trois ; cinquante-quatre conseillers qui sont distribués également dans les deux semestres, & dont deux sont en même tems grands rapporteurs & correcteurs des lettres du sceau ; deux avocats généraux, un procureur général, un greffier en chef, douze substituts du procureur général ; un greffier de l’audience, un pour la chambre, un pour les présentations & affirmations, un greffier des dépôts civil & criminel ; cinq secrétaires du Roi servans près le grand-conseil ; un premier huissier, un trésorier payeur des gages, trois contrôleurs, vingt-trois procureurs, dix-neuf huissiers ; un medecin & un chirurgien pour les visites & rapports ; un maréchal des logis, un fourrier, un juré trompette, & autres officiers subalternes.

Tous ces officiers joüissent de plusieurs priviléges, notamment de ceux de commensaux de la maison du Roi & des officiers des cours souveraines.

Les audiences des grand & petit rôle se tenoient ci-devant le lundi & mardi matin ; elles ont été transférées au vendredi & samedi par une déclaration du 6 Mars 1738.

L’audience des placets qui se tenoit autrefois les jeudis, a été transférée par la même déclaration aux mercredis.

Après les grandes audiences qui finissent à onze heures, les mêmes juges donnent une audience pour les causes d’instruction.

Le lieu destiné à faire les exécutions des arrêts rendus au grand-conseil en matiere criminelle, & qui emportent peine afflictive, est la place de la Croix-du-Trahoir.

Le Roi adresse souvent à cette compagnie ses ordonnances, édits, déclarations, pour y être enregistrés.

Lorsqu’il s’agit de quelque réception d’officier, ou de délibérer sur quelque point de discipline de la compagnie, les deux semestres s’assemblent.

Le grand-conseil n’est point dans l’usage d’assister en corps ni par députés aux cérémonies publiques ; mais il va en députation nombreuse complimenter le Roi, la Reine, & les Princes & Princesses de la famille royale sur les évenemens remarquables, & jetter l’eau-benite à ceux qui sont décédés.

Présidens. Le chancelier a été de tout tems & est encore le seul premier président du grand-conseil.

Suivant l’édit de 1497, il devoit être assisté des maîtres des requêtes, lesquels avoient droit de présider en son absence suivant leur rang d’ancienneté.

En l’absence des maîtres des requêtes, c’étoit le plus ancien conseiller-lai qui présidoit à l’audience, & le plus ancien conseiller d’église qui présidoit au conseil, comme on voit par un reglement qui fut fait par les conseillers en 1521.

Au mois d’Octobre 1540 il fut créé un office de président au grand-conseil en faveur de Guy de Breslay, pour présider en l’absence du chancelier : mais par un édit du 6 Mars 1543, cet office fut révoqué, & les maîtres des requêtes rétablis dans leur droit de présider au grand-conseil, comme ils faisoient auparavant.

Quelque tems après le Roi créa deux offices de présidens, & le premier Mai 1557 on en créa encore deux autres : mais au mois de Septembre 1559 François II. à son avenement à la couronne, supprima les offices de présidens au grand-conseil, jusqu’à ce qu’ils fussent réduits au nombre de deux, vacation arrivant par mort ou forfaiture.

L’ordonnance de Blois, art. 221. les fixa à deux : mais Henri III. par un édit du 12 Juillet 1586, créa quatre offices de présidens au grand-conseil.

En 1610 & en 1634 il y avoit huit présidens, &