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sil : 2°. la couronne de marquis, qui est de fleurons & de perles mêlées alternativement : 3°. celle de comte, composée de perles sur un cercle d’or : 4°. celle de vicomte est aussi un cercle, avec neuf perles entassées de trois en trois : 5°. celle de baron, qui est une espece de bonnet avec un colier de perles en bandes.

Mais tout cela varie & pour la forme des fleurons & pour le nombre des perles, suivant les différentes nations ; & même, à l’exception des couronnes des ducs & pairs, les autres sont ordinairement au choix de ceux qui les mettent sur le timbre de leurs armes. A Venise, les nobles ne mettent aucune couronne sur leurs armes ; celles du doge seul sont surmontées du bonnet ducal : à Genes, les vingt-huit familles principales portent sur leurs armoiries la couronne ducale : à Rome, nul cardinal, quoique prince, n’en met aucune sur son écusson. Au reste, toutes ces couronnes de la noblesse sont ouvertes, même celles des princes du sang en France, qui sont composées d’un cercle d’or surmonté de fleurs-de-lis. Le dauphin portoit autrefois une couronne rehaussée de fleurs-de-lis, & fermée de deux cercles en croix avec une fleur-de-lis au sommet : maintenant elle est fermée par quatre dauphins, dont les queues aboutissent à un bouton qui soûtient la fleur-de-lis à quatre angles.

Les Romains avoient diverses couronnes pour récompenser les exploits militaires. La couronne ovale qui étoit la premiere, étoit faite de myrthe ; on la donnoit aux généraux qui avoient vaincu des esclaves ou d’autres ennemis, peu dignes d’exercer la valeur romaine, & à qui on décernoit les honneurs du petit triomphe appellé ovation. Voyez Ovation.

La seconde étoit la navale ou rostrale, qui étoit un cercle d’or relevé de proues & de poupes de navires, qu’on donnoit au capitaine ou soldat, qui le premier avoit accroché ou sauté dans un vaisseau ennemi. Voyez Rostral & Naval.

La troisieme nommée vallaire ou castrense, étoit aussi un cercle d’or relevé de paux ou pieux, que le général donnoit au capitaine ou soldat qui avoit franchi le premier le camp ennemi, & forcé la palissade.

La quatrieme appellée murale, étoit un cercle d’or surmonté de creneaux ; elle étoit le prix de la bravoure de celui qui avoit monté le premier sur la muraille d’une ville assiégée, & y avoit arboré l’étendart : c’est aussi sur les médailles l’ornement des génies & des déités qui protégeoient les villes, & en particulier de Cybele.

La cinquieme appellée civique, faite d’une branche de chêne verd, s’accordoit à un citoyen qui avoit sauvé la vie à un autre dans une bataille ou un assaut. Voyez Civique.

La sixieme étoit la triomphale, faite de branches de laurier ; on l’accordoit au général qui avoit donné quelque bataille ou conquis quelque province : mais l’an 569 de Rome, le consul Claudius Pulcher introduisit l’usage de dorer le cercle de la couronne ; bientôt elles furent converties en or massif. Les Grecs en décernerent une à T. Quintius Flaminius. Voyez Triomphe.

La septieme étoit l’obsidionale ou graminée, parce qu’elles se faisoit de gramen, ou des herbes qui se trouvoient dans la ville ou le camp assiégé ; elle étoit décernée aux généraux qui avoient délivré une armée ou une ville romaine assiégée des ennemis, & qui les avoient obligés à décamper.

La huitieme étoit aussi une couronne de laurier, que les Grecs donnoient aux athletes, & les Romains à ceux qui avoient ménagé ou confirmé la paix avec les ennemis : c’étoit la moins estimée. C’est une chose digne de remarque, que chez les Romains, qui connoissoient, dit-on, la véritable gloire, cel-

le d’avoir donné la paix à son pays, fût la moindre

de toutes.

Chez les Romains on donnoit encore une couronne ou bandelette de laine aux gladiateurs qu’on mettoit en liberté. Tout le monde sait que les anciens, dans les sacrifices, se couronnoient d’ache, d’olivier, de laurier ; qu’ils portoient dans leurs festins & autres parties de plaisir, des chapeaux de lierre, de mirte, de roses, &c. mais que dans les funérailles ils ne portoient que des couronnes de ciprès.

Le P. Daniel dit que S. Louis dégagea à ses frais la couronne d’épines de N. S. qui avoit été engagée par Baudouin, empereur de Constantinople, pour une très-grosse somme d’argent, & qu’il la fit transporter en France avec beaucoup de pompe & de cérémonie. On la garde encore aujourd’hui dans la Sainte-Chapelle. L’auteur de l’histoire de S. Louis assûre qu’elle subsistoit de son tems, & que les épines en étoient toûjours vertes. Quelques auteurs après Clément Alexandrin, prétendent qu’elle étoit de ronce, ex rubo ; d’autres, qu’elle étoit de nerprun, ex rhamno ; d’autres, d’épine blanche ; & d’autres, de jonc marin.

On prétend que ce mot couronne vient de corne parce que les couronnes anciennes étoient en pointe, & que les cornes étoient des marques de puissance, de dignité, de force, d’autorité, & d’empire ; & dans la sainte Ecriture, les mots de cornu, & cornua sont souvent pris pour la dignité royale : delà vient que corne & couronne en hébreu sont expliqués par le même mot. Charles Pascal a donné un traité particulier des couronnes. Baudelot, dans son histoire de Ptolomée Auletes, a fait beaucoup de remarques qui avoient échappé à Pascal. Nous avons de M. Ducange une savante & curieuse dissertation sur les couronnes de nos rois ; & d’un Allemand nommé Shmeizelle, un traité sur les couronnes royales tant anciennes que modernes.

Couronne royale,
Couronne électorale,
Voyez
Royal.
Électoral.

Couronne se dit aussi de la tonsure cléricale, qui est la marque & le caractere des ecclésiastiques. Voyez Tonsure. C’est un petit rond de cheveux qu’on rase au sommet de la tête, & qui est plus ou moins grand, selon la qualité des ordres qu’on a reçus : celle des clercs est la plus petite, celle des prêtres & des moines est la plus grande. Voyez Ordre.

La couronne cléricale n’étoit autrefois qu’un tour de cheveux qui représentoit véritablement une couronne : on le remarque aisément dans plusieurs statues & autres monumens anciens. Quelques religieux la portent encore ainsi, comme ceux de saint Dominique & de saint François. Chambers. & Trév.

Couronne, (Hist. mod.) ordre de la couronne royale, ou ordre de la couronne, ou les chevaliers Frisons ou de Firse ; il y en a qui prétendent que cette institution est imaginaire ; d’autres la datent de l’an 802, & disent que les chevaliers portoient une couronne en broderie d’or sur un habit blanc.

Ordre de la couronne (autre), institué par Enguerrand VII. sire de Couci & comte de Soissons. On a plusieurs monumens de sa réalité, mais aucun de ses statuts.

Couronne, en termes d’Architecture, est le plus fort membre quarré d’une corniche à qui on a donné ce nom, parce qu’il couronne non-seulement la corniche, mais encore l’entablement & l’ordre entier.

Les François l’appellent larmier, & nos ouvriers gouttiere ; parce que sa grande saillie garantit l’édifice des injures de la pluie. Voyez Larmier.

Il y en a d’autres qui l’appellent corniche, parce qu’il en forme le principal membre. Vitruve employe souvent le mot corona, pour désigner toute la corniche. Voyez Corniche. (P)