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moignage. Le Décalogue ne contient donc que les principaux chefs, ou les fondemens du gouvernement politique des Juifs ; mais néanmoins ces fondemens (mettant à part ce qui regardoit en particulier la nation judaïque) renferment des lois qui sont naturellement imposées à tous les hommes, & à l’observation desquelles ils sont tenus dans l’indépendance de l’état de la nature, comme dans toute société civile. Art. de M. le Chevalier de Jaucourt.

DÉCALQUER, voyez Calquer.

DÉCAMÉRIDE, s. f. est, en Musique, le nom des élémens du système de M. Sauveur, qu’on peut voir dans les Mémoires de l’académie des Sciences, année 1702.

Pour former un système général qui fournisse le meilleur tempérament, & qui se puisse accommoder à tous les systèmes ; cet auteur, après avoir divisé l’octave en 43 parties qu’il appelle mérides, & subdivisé chaque méride en 7 parties qu’il appelle eptamérides, divise encore chaque eptaméride en 10 autres parties, auxquelles il donne le nom de décamérides. L’octave se trouve ainsi divisée en 3010 parties aliquotes, par lesquelles on peut exprimer sans erreur sensible les rapports de tous les intervalles de la Musique. Ce mot est formé de δέκα, dix, & de μερὶς, partie. (S)

DÉCAMERON, s. m. (Littérat.) ouvrage contenant des actions qui sont passées, ou des conversations tenues pendant l’espace de dix jours. Le décaméron de Bocace est composé de cent nouvelles, qu’on suppose racontées en dix journées. Ce mot est composé des deux termes grecs, δέκα, dix, & ἡμέρα, jour. (G)

DÉCAMPER, v. n. c’est, dans l’Art milit. quitter un camp pour en aller occuper un autre. Ainsi lorsqu’une armée quitte son camp ou qu’elle leve le siége d’une place, on dit qu’elle décampe. On se servoit autrefois du terme de déloger pour dire décamper.

Il est dangereux de décamper devant l’ennemi, parce qu’il peut tomber sur l’arriere-garde, & la mattre en desordre. Lorsqu’on est obligé de le faire, on met toutes les troupes en bataille, & l’on fait marcher la premiere ligne par les intervalles de la seconde : on fait ensorte de lui faire passer diligemment les défilés & les ponts, & de la mettre en situation de protéger & de soûtenir la marche de la seconde ligne qui passe par les intervalles de la premiere. Comme il est difficile d’exécuter sûrement cette manœuvre lorsqu’on est à portée de l’ennemi, & qu’il en est instruit, on décampe ordinairement la nuit & sans bruit, pour lui en dérober la connoissance.

Quand on veut décamper de jour & dérober ce mouvement aux ennemis, on envoye sur leur camp un gros corps de cavalerie avec les étendards, comme si l’on avoit dessein d’en attaquer quelque partie ; & pendant le tems que l’armée ennemie employe à se préparer pour s’opposer aux attaques de ce corps, & qu’elle cherche à pénétrer son dessein, l’armée qui décampe fait son mouvement tranquillement en arriere ; elle fait occuper les différens postes qui se trouvent sur sa route les plus propres à arrêter l’ennemi. Lorsqu’il y a des défilés, on en fait garder l’entrée par des corps de troupes, capables de soûtenir l’arriere-garde en cas qu’elle soit poursuivie par l’ennemi.

M. le marquis de Feuquieres prétend que la bataille de Senef ne fut occasionnée que par l’oubli de cette attention de la part du prince d’Orange. « Il voulut, dit ce célebre officier, décamper de Senef & marcher à Binche, en prétant le flanc à l’armée du Roi dans le commencement de sa marche. Il avoit à passer 2 ou 3 petits défilés, séparés les uns des autres par de petites plaines, capables pour-

tant de contenir un corps assez puissant pour recevoir son arriere-garde, en cas qu’elle fût chargée & renversée. Si ce Prince avoit eu la précaution de laisser des troupes dans la premiere petite plaine, pour y recevoir son arriere-garde qui étoit dedans & derriere le village de Senef, il est certain que M. le prince de Condé n’auroit pû entreprendre que sur cette arriere-garde, dans le tems qu’elle se seroit mise en mouvement pour quitter ce village & la petite plaine qui étoit derriere, & qu’il n’auroit pû pousser les troupes que jusqu’au premier défilé. Mais l’ennemi présomptueux, dit toûjours M. de Feuquieres, à qui M. le prince, à la faveur d’une petite hauteur qui étoit au-dessus du village de Senef, cachoit toute sa disposition pour l’attaquer, méprisant les attentions particulieres & judicieuses sur cette constitution de pays, continua sa marche comme si la colonne n’avoit pas été occupée par ces défilés, & qu’elle n’eût pas à craindre un ennemi voisin de qui on ne pouvoit pas voir les mouvemens : faute dont M. le prince profita sur le champ par le succès que tout le monde a sû qu’avoit eu la bataille de Senef ». Mém. du marq. de Feuquieres.

M. le maréchal de Puysegur prétend, dans son livre de l’Art de la guerre, que c’est une opinion vulgaire de croire que toute armée qui se retire étant campée très-proche d’une autre, soit toûjours en risque d’être attaquée dans sa retraite avec desavantage pour elle, & qu’il y a fort peu d’occasions où l’on se trouve exposé au danger lorsqu’on a étudié cette matiere, & qu’on s’y est formé sur le terrein. Voyez Marche & Retraite. (Q)

DÉCAMYRON, s. m. (Pharm.) c’est le nom d’un cataplasme dont il est parlé dans Oribase, à qui on a donné ce nom, parce qu’il est composé de différens aromats. Chambers & James.

DÉCAN, (Géog. mod.) royaume des Indes dans la presque île en deçà du Gange, au midi du Mogol dont il est une province considérable. Hamenadagor en est la capitale.

DÉCANAT, s. m. (Jurisp. & Hist.) est la qualité & la fonction de doyen d’une compagnie ; dans un chapitre on dit le doyenné ; dans les compagnies laïques on dit le décanat. Dans les chapitres, le doyenné est ordinairement une dignité ; dans les compagnies laïques, le décanat n’est communément attaché qu’à la qualité de plus ancien. On parvient à son tour au décanat ; & quoiqu’il n’y ait point d’autre mérite à être plus ancien que les autres, & qu’en ce sens la qualité de doyen ne soit point du tout flatteuse ni honorable, si ce n’est parce qu’elle peut faire présumer plus d’expérience que dans ceux qui sont moins anciens, cependant comme l’homme tire vanité de tout, celui qui est le plus ancien d’une compagnie ne manque point de prendre la qualité de doyen. Voyez ci-après Doyen & Doyenné. (A)

DÉCANISER, v. n. (Jurispr.) signifie remplir la place de doyen, en faire les fonctions. Il n’y a que le doyen d’une compagnie qui ait droit de décaniser ; mais en son absence le sous-doyen, ou à défaut de celui-ci, le plus ancien suivant l’ordre du tableau, décanise. Voyez Décanat & Doyen, (A)

DÉCANTER, v. act. & DÉCANTATION, s. f. (Chimie & Pharmacie.) on se sert de ce terme pour exprimer l’action de verser doucement & sans troubler, une liqueur qui s’est clarifiée d’elle-même par le dépôt qui s’est formé au fond du vase où elle est contenue ; c’est ce qu’on nomme aussi verser par inclination.

La décantation est employée, soit pour séparer une liqueur dont on a besoin de dessus des feces que l’on veut rejetter ; soit qu’on ait le dépôt on