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clergé les sommes qui leur seroient imposées, pourquoi le roi leur donnera main-forte.

La guerre qui se préparoit contre la France en 1534, obligea encore François I. de s’aider du revenu temporel de l’église : il témoigne à la vérité par ses lettres patentes du 12 Février, que c’est à son très-grand regret ; mais il marque en même tems le danger qui menaçoit le royaume, & le service auquel seroient tenus les propriétaires des fiefs s’ils étoient hors les mains des ecclésiastiques ; & par ce motif il enjoint à tous officiers royaux de faire saisir pour cette fois seulement, & sans tirer à conséquence, le tiers du temporel des chapitres, colléges & communautés, & la moitié de celui des archevêques, évêques, abbés, prieurs, & de leurs couvens.

Les ecclésiastiques n’eurent main-levée de cette saisie qu’en offrant, suivant leur usage, trois décimes, payables moitié à la Toussaints, & moitié à Noël ; & le roi par une déclaration du 28 Juillet 1535 en exempta les conseillers-clercs du parlement.

Il est vrai que cette déclaration, & une autre du 19 Août suivant, en faveur du commis au greffe civil du parlement, qualifient ces trois décimes de don gratuit & charitatif équipollent à trois décimes accordées par le clergé : mais François I. se mettoit peu en peine de ces qualifications, pourvû qu’il eût ce qu’il demandoit ; & l’adresse de ces deux déclarations qui est faite à la chambre des comptes ou autres commissaires commis & députés par le roi pour oüir les comptes du don gratuit, fait assez sentir que l’imposition se levoit par autorité du roi.

On continua de lever des décimes jusqu’au decès de François I. comme il paroît par trois déclarations des 7 Décembre 1542, Février 1543, & 19 Mai 1547, dont la premiere ordonne que les décimes des gens d’église & autres deniers extraordinaires seront portés ou envoyés aux recettes générales des finances par les receveurs de ces deniers, aux dépens des gens d’église ; la seconde attribue la connoissance des comptes des décimes à la chambre des comptes, ce qui prouve de plus en plus que ces impositions étoient faites de l’autorité du roi ; & la troisieme donnée par Henri II. fait mention des décimes levées en l’année précédente qui étoit 1546.

Les décimes subsisterent pareillement sous Henri II. puisque par la déclaration dont on vient de parler du 19 Mai 1547, il en exempte les conseillers-clercs du parlement de Paris, & que par une déclaration du 15 Février de la même année, il en exempte de même les conseillers-clercs du parlement de Roüen.

La déclaration du 19 Septembre 1547, contient un réglement pour les décimes du diocèse de Bourges ; & celle du 21 Avril 1550, contient un semblable réglement pour le diocèse de S. Brieux.

Lors du lit de justice tenu par Henri II. le 22 Février 1551, ce prince ayant exposé la nouvelle guerre qu’il étoit prêt d’avoir, le cardinal de Bourbon dit en s’adressant au roi, qu’oyant les grandes offres que lui faisoit la noblesse de sa vie & de ses biens ....... que le clergé avoit deux choses, l’une l’oraison & priere, que la seconde étoient les biens temporels dont le roi & ses prédécesseurs les avoient si libéralement départis ; que la veille ils s’étoient assemblés jusqu’à six cardinaux & environ trente archevêques & évêques, qui tout d’un commun accord avoient arrêté de donner au roi si grande part en leurs biens, qu’il auroit matiere de contentement, assûrant S. M. que si les corps n’étoient voüés à Dieu & à la religion, ils ne lui en feroient moindres offres que la noblesse.

Les déclarations des 6 & 20 Janvier 1552, contiennent des réglemens pour la perception des décimes dans les diocèses de Chartres & d’Evreux, ce

qui suppose que dans le même tems on en levoit aussi dans les autres diocèses.

Le clergé accorda encore à Henri II. en 1557 six cents mille écus ; le roi de son côté, par un édit du mois de Juin, créa un office de receveur pour le roi de toutes les impositions extraordinaires, y compris les dons gratuits des ecclésiastiques ; & par ses déclarations des 8 Décembre, 3 & 4 Janvier 1558, il exempta les conseillers au parlement, & quelques autres personnes, des décimes, dons, octroys charitatifs équipollens à icelles à lui accordés, & qui l’avoit ordonné être levés sur le clergé de son royaume pour cette année (1558.)

C’est ainsi que les décimes furent levées jusqu’en 1561, sans qu’il y eût aucune assemblée fixe du clergé, ni aucun contrat passé à ce sujet avec le roi ; & l’on voit par l’analyse qui a été faite des différens réglemens intervenus sur cette matiere, que l’on confondoit alors avec les décimes, les dons gratuits ou dons charitatifs que l’on qualifioit d’équipollens à décimes.

Ce ne fut que depuis le contrat de Poissy en 1561, que ces deux objets commencerent à être distingués.

Les prélats qui étoient alors assemblés à Poissy pour le fameux colloque qui se tint avec les ministres de la religion prétendue réformée, firent au nom de tout le clergé de France un contrat avec le roi, qu’on a appellé le contrat de Poissy, par lequel ils s’engagerent à payer au roi 1600000 livres par an pendant six années, & de racheter dans dix ans 630 mille livres de rente au principal de sept millions cinq cent soixante mille livres, dont l’hôtel-de-ville de Paris étoit chargé envers divers particuliers qui avoient prêté de l’argent au roi : c’est-là l’origine des rentes sur le clergé, qui ont depuis été augmentées au moyen des divers contrats passés entre le roi & le clergé. Nous n’entrerons point ici dans le détail de ces rentes, qui sera mieux placé au mot Rentes.

Le clergé ayant été obligé de s’assembler plusieurs fois, tant pour l’exécution du contrat de Poissy, que par rapport aux nouvelles subventions qui furent demandées au clergé dans l’intervalle de l’exécution du contrat de Poissy ; les assemblées du clergé devinrent depuis ce tems plus fréquentes, sans néanmoins qu’il y eût encore rien de fixé pour le tems de leur tenue.

Ce ne fut qu’au commencement du siecle dernier qu’il fut reglé que les assemblées générales qui se tiennent pour renouveller le contrat de Poissy, se feroient tous les dix ans, d’où on les appelle décennales : les assemblées qui se font pour régler les comptes se tenoient d’abord tous les deux ans, ensuite on les a fixé de cinq ans en cinq ans.

Dans l’assemblée du clergé tenue à Melun en 1579, où fut établie la forme d’administration qui subsiste encore présentement ; le clerge prétendit avoir rempli tous les engagemens qu’il avoit pris par le contrat de Poissy, & que ses députés n’avoient pû l’engager au-delà par des actes postérieurs.

Cependant au mois de Février 1680, il fut passé un nouveau contrat avec le roi, par lequel le clergé s’obligea de payer pendant six ans 1300000 livres pour satisfaire au payement de 1206322 livres de rentes dûes sur les hôtels-de-villes de Paris & de Toulouse, & le surplus être employé au rachat de partie de ces rentes.

Le terme pris par le contrat de Poissy & par celui de 1580, qui étoit en tout de seize années, étant expiré, il fut renouvellé à Paris par le clergé le 3 Juin 1586 pour dix années, & depuis ce tems il a toûjours été renouvellé de dix ans en dix ans.

Ces contrats ne different les uns des autres, qu’en ce que les rentes dont le clergé est chargé ont au-