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ordinairement des choses qui doivent être doubles, comme des bas, des gants, des souliers, & autres semblables marchandises qui ne sont plus de débit quand elles sont dépareillées. Voyez les dict. de Com. & de Trév. (G)

DÉPARER la marchandise, (Comm.) en ôter la beauté, l’agrément, l’ordre : ce terme n’est guere en usage au simple, que parmi les marchandes de fruits & autres pareilles denrées, qui ont soin de parer le dessus de leurs paniers de ce qu’elles ont de plus beau ; mais il a une infinité d’acceptions différentes au figuré.

DÉPARIER, (Manege.) se dit des chevaux de carrosse de différent poil ou de différente taille, qu’on ne trouve pas à-propos d’atteler ensemble, parce que cela feroit un méchant effet. Voy. Appareiller. (V)

DÉPART, s. m. (Métall.) le départ est une opération, ou plûtôt un procédé, une suite d’opérations, par lesquelles on sépare l’or de l’argent.

L’opération principale, ou le premier moyen de séparation est fondé sur la proprieté qu’ont certains menstrues d’attaquer l’argent sans toucher à l’or, ou de s’unir à ce dernier métal en épargnant le premier.

Le départ par le moyen des menstrues qui attaquent l’argent, est celui que l’on employe le plus ordinairement.

Il y a deux sortes de départs de cette classe ; celui qu’on appelle par la voie humide, & le départ par la voie seche ou par la fonte. Nous allons traiter d’abord du premier : cet usage des acides minéraux a été découvert, & mis en usage à Venise peu de tems après la découverte de ces acides, vers l’an 1400.

L’argent est soluble par l’eau-forte ; il ne perd point cette propriété, lorsqu’il est mélé à l’or en une certaine proportion : cette proportion est celle que l’argent doit être presque le triple de l’or dans la masse à départir ; & cette proportion est la plus exacte qu’il est possible, c’est-à-dire la plus avantageuse pour le succès, pour la perfection & pour l’élégance de l’opération, si le mélange est composé de trois parties d’argent & d’une partie d’or. L’avantage singulier que cette proportion procure, c’est que si l’on ne brusque pas trop la dissolution de l’argent tenant or, la chaux d’or restée après cette dissolution retient la figure qu’avoit l’argent tenant or avant l’opération ; ce qui fait qu’on ne perd aucune portion de cette chaux : au lieu que si l’or est contenu en moindre proportion dans l’argent aurifere, il n’est pas possible de lui conserver de la continuité, & que dans cet état de poudre subtile on en perd nécessairement quelque partie.

C’est le départ d’une masse formée par l’or & l’argent mêlés dans la proportion que nous venons d’assigner, qui s’appelle proprement inquart, quartatio : ce nom se donne aussi assez communement à tout départ par l’eau-forte.

L’acide vitriolique très-concentré & bouillant, dissout l’argent, mais n’attaque point l’or. Quelques départeurs se servent de cet acide pour séparer l’or de l’argent : mais cette méthode est beaucoup moins usitée que celle où l’on employe l’eau forte. Nous allons rapporter cette derniere méthode.

On commence par granuler ou grenailler la masse d’argent tenant or, propre à être départie par l’eau-forte, c’est-à-dire contenant au moins trois parties d’argent sur une d’or. Voy. Grenailler. Si l’on veut départir par l’eau-forte un alliage où l’argent ne domine pas assez pour que l’eau-forte puisse l’attaquer, on n’a qu’à ajoûter à cette masse une quantité suffisante d’argent pour qu’il en résulte un nouveau mêlange, dans lequel les deux métaux se trouvent en proportion convenable. Pour approcher autant qu’il est possible de la proportion la plus exacte, on peut

essayer par la pierre de touche & les aiguilles d’essai (Voyez Pierre de touche & Aiguille d’essai), la masse à laquelle on veut ajoûter de l’argent ; on fond ensuite cette masse avec suffisante quantité d’argent ; on brasse exactement le mêlange, & on le réduit en grenailles, comme il a été dit ci-dessus.

Ce qui suit a été extrait du traité de la fonte des mines, &c. de Schlutter, publié en françois par M. Hellot.

On prend ensuite des cucurbites coniques ou des matras, qu’on place sur des bains de sable ; il faut que ces vaisseaux ayent été bien recuits au fourneau de verrerie, & que le fourneau où on les a mis à recuire, se soit refroidi de lui-même avant qu’on les en ait retirés : si l’on n’a pas eu cette attention dans la verrerie, il est rare de trouver de ces vaisseaux qui ne se fêlent pas, même à froid, en les faisant égoutter après les avoir rincés. C’est selon la quantité d’argent tenant or qu’on veut départir, qu’on choisit les cucurbites. Je suppose que le départ soit fort : cependant je compte qu’il faut prendre tout au plus six marcs d’argent par cucurbite ; ainsi si l’on a beaucoup d’argent on le distribue dans plusieurs de ces vaisseaux, car on en peut mettre jusqu’à dix en œuvre s’il est nécessaire : ce qui fait une dissolution de soixante marcs à la fois. Si l’on veut aller doucement, on ne verse que quatre livres d’eau-forte dans chacun des vaisseaux contenant six marcs de grenaille d’argent ; mais quand il s’agit d’accélérer le départ, on peut tout d’abord en verser six livres : car on compte ordinairement une livre d’eau-forte pour un marc d’argent ; c’est de l’eau-forte précipitée & purifiée par l’argent qu’on doit employer. La cucurbite ne doit être remplie qu’aux deux tiers par ces six marcs d’argent, & six livres d’eau-forte. C’est ce qui détermine sur le choix des cucurbites ; car il doit toûjours y rester un vuide, parce que l’eau-forte se gonfle quand elle commence à agir.

On place ensuite toutes les cucurbites sur le bain de sable qui doit être froid ; on allume dessous un feu modéré, pour que le sable s’échauffe peu-à-peu, quoique l’eau-forte, quand elle est bonne & que les grenailles ont été rougies, commence aussi-tôt à agir sur l’argent : cependant la chaleur facilite la dissolution, & la liqueur devient blanche ; de sorte qu’il faut prendre garde qu’elle ne soit trop échauffée dans le commencement, parce qu’elle monteroit facilement, sur-tout quand les capsules des bains de sable sont de fer, ou que les cucurbites sont placées sur la plaque de fer du bain de sable commun : car le fer s’echauffe davantage, & garde plus long-tems sa chaleur, que des capsules de terre. S’il arrivoit cependant que la liqueur montât trop haut, le meilleur remede seroit d’ôter le feu aussi-tôt, & ensuite le sable qui est autour du vaisseau, pour le mêler avec du sable froid, & le remettre : car il ne faut jamais y mettre du sable froid seul, il feroit fêler la cucurbite ; même pendant l’opération, il ne faut pas toucher ce vaisseau avec les mains froides, ou en approcher quoi que ce soit de froid. Lorsque la premiere chaleur est passée, la dissolution commence à être plus calme ; & quand la liqueur n’est plus blanche ni écumeuse, on peut augmenter modérément le feu : néanmoins la chaleur du vaisseau doit être telle qu’on puisse le prendre & le lever avec un linge.

Quand on veut savoir s’il reste au fond de la cucurbite de la grenaille d’argent qui ne soit pas encore dissoute, on y sonde avec une baguette de bois blanc bien nette : dans la suite on se sert toûjours de la même baguette, parce qu’elle s’imbibe de la dissolution de l’argent. Lorsqu’elle a long-tems servi, on la brûle, & l’argent qu’elle donne se fond ensuite avec d’autre. Si l’on ne sent plus de grenaille, &