Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 5.djvu/1015

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lésion de la respiration, ou de la déglutition causée par un vice des organes, qui servent à ces fonctions, situés au-dessus des poumons & de l’estomac ; mais elles different en ce qu’elles sont avec tumeur apparente ou non apparente, ou sans tumeur, par la nature & le siége de la tumeur, quand il y en a, & par le nombre des parties affectées qui intéressent la respiration ou la déglutition, ou les deux fonctions ensemble, d’où résultent des effets si variés ; par conséquent on ne peut pas indiquer une méthode de traitement qui convienne à toutes les différentes especes d’angine : comme les causes sont si différentes, les remedes doivent être variés à-proportion, ensorte qu’ils soient même quelquefois opposés par leur nature dans les cas qui le sont aussi, sans avoir cependant beaucoup d’égard à la différence des parties affectées.

Car soit que le larynx soit enflammé, ou le pharynx, c’est le traitement de l’inflammation qui est indiqué pour l’une comme pour l’autre partie : le danger plus ou moins grand, exige seulement des remedes plus ou moins prompts.

L’angine inflammatoire peut se terminer de la même maniere que l’inflammation en général : ainsi la même cure de celle-ci convient à celle-là, dans ses différens états : (voyez Inflammation) comme dans celle-ci ; c’est à procurer la résolution de l’humeur morbifique qu’il faut diriger tous les secours employés à combatre l’angine : cette terminaison est même plus à desirer dans cette maladie que dans tout autre cas en général, parce que celles de la suppuration, du skirrhe, ou de la gangrene, ont des suites plus funestes dans les parties affectées, dont il s’agit, que dans toute autre : la gangrene, surtout, est toûjours suivie d’une mort prompte, lorsqu’elle est étendue & profonde ; car il conste, par plusieurs observations, que celle qui est superficielle peut être guérie, quoiqu’elle détruise & détache par morceaux, en forme de croûtes ou pellicules blanchâtres, toutes les membranes qui tapissent la bouche, la gorge, l’œsophage, les arriere-narines, & autres parties voisines.

Lors donc que l’on s’est assûré par les signes propres que l’esquinancie a son siége dans l’intérieur du larynx & aux environs de la glotte, & qu’elle est inflammatoire, on examine si l’inflammation est encore en nature ; si on la trouve telle, on doit employer, avec le plus de diligence qu’il est possible, les moyens les plus propres à la résoudre : pour cet effet, on a recours sans délai à la saignée ; on la fait abondante, & on la repete aux bras, aux piés, & ensuite aux jugulaires & aux ranules, jusqu’à ce que la pâleur du malade, le refroidissement des membres, la foiblesse, l’abattement des forces annonce que le volume des humeurs est suffisamment diminué, que les vaisseaux sont affaissés, & que l’effort du sang vers la tumeur n’est plus assez considérable pour l’augmenter & rendre les vaisseaux plus distendus dans les parties enflammées : on doit faire usage dans la même vûe des purgatifs, tant émétiques que cathartiques, & des lavemens de ces derniers sur-tout, rendus assez actifs dans les cas où le malade ne peut pas avaler, & où ils doivent par conséquent suppléer à tous évacuans de l’estomac & des intestins, sur-tout lorsque les remedes sont particulierement indiqués par les signes des mauvais levains dans les premieres voies, lesquels venant à passer dans le sang, peuvent contribuer à augmenter la cause du mal : c’est ainsi, par le moyen des lavemens, que l’on doit fournir, dans ce cas, au malade la nourriture qui lui est nécessaire, vû qu’il est démontré par l’expérience & l’anatomie, que les gros boyaux ont des veines lactées, propres à transmettre à la masse des humeurs, tant les remedes que les

alimens, & ceux-ci sur-tout, de maniere qu’ils peuvent suffire pendant plusieurs jours pour soûtenir les forces du malade, pourvû qu’ils soient de nature à n’avoir pas besoin d’être préparés dans les visceres qui servent à la confection du chyle, & qu’ils contiennent un suc nourricier tout prêt, tels que les bouillons de viande, les œufs délayés, le lait coupé avec de l’eau, le petit-lait, les décoctions de pain : ces trois dernieres especes d’alimens liquides sont préférables dans l’angine, selon Sydenham, qui défend l’usage de ceux qui sont préparés avec la viande, à cause de la disposition qu’ils ont à se pourrir : voyez les observations des auteurs sur les lavemens nourrissans, recueillies par Stalpart Wanderwiel.

Il faut en même tems employer des médicamens nitreux & tirans sur l’acide, que l’on fait entrer dans la composition des gargarismes avec le miel, dont on humecte souvent la gorge pour ramollir le tissu de ses parties & le relâcher : c’est pour remplir la même indication que l’on fait aussi recevoir au malade la vapeur humide & tiede de quelque préparation à-peu-près de même nature que les gargarismes mentionnés ; on doit répeter, presque sans discontinuer, l’usage de ces secours, qui peuvent être d’autant plus efficaces, qu’ils sont appliqués aux parties même enflammées : on doit encore faire des applications extérieures sous forme de fomentation, de cataplasmes ; les épispastiques propres à faire dérivation vers quelqu’autre partie moins importante que celles qui sont enflammées, les ventouses, les sinapismes appliqués au cou & à la poitrine, peuvent aussi produire de bons effets.

Si c’est le voisinage de l’os hyoïde & l’extérieur du larynx qui sont enflammés, on doit employer les mêmes remedes, mais plus legers & d’une maniere moins pressante : les cataplasmes adoucissans & relâchans, & toute application extérieure qui peut ramollir, sont plus particulierement recommandés dans les angines de cette espece.

L’inflammation du pharynx ne demande que les mêmes remedes indiqués dans les cas précédens, mais sur-tout les gargarismes & les suffumigations, dont on doit faire un usage encore plus fréquent, avec attention de ne mettre en mouvement les organes affectés, que le moins qu’il est possible : ainsi la matiere des gargarismes doit être retenue dans la bouche sans l’agiter, & les vapeurs doivent être reçues sans faire autre chose que tenir la bouche ouverte & immobile.

Si l’angine est suffocatoire, & que les remedes indiqués ayent été employés trop tard, ou qu’on ne les ait pas mis en usage, ou qu’on l’ait fait inutilement ; si la maladie ne fait que commencer, & qu’elle menace cependant d’étrangler le malade ; si les symptomes, quoique très-mauvais, n’annoncent pas que l’inflammation soit devenue gangreneuse, dans ce cas il faut avoir recours à l’opération qu’on appelle bronchotomie, pourvû que l’inflammation & l’obstacle à la respiration ne soient pas situés au-dessous de l’endroit où l’on peut faire l’ouverture de la trachée artere, pour suppléer par cette issue au défaut de la glotte qui est fermée dans ce cas. Voyez Bronchotomie.

Si l’inflammation angineuse a fait des progrès, & qu’il se soit formé un abcès, on tâchera de la faire ouvrir par des applications émollientes, relâchantes, qui puissent affoiblir le tissu du sac qui contient la matiere de la suppuration ; les gargarismes, les cataplasmes appropriés, doivent être employés à cette fin : on pourra aussi dans ce cas ranimer les forces du malade, pour que le mouvement des tumeurs augmenté fasse effort dans l’intérieur de l’abcès, & en déchire les parois, pourvû qu’on n’ait rien à craindre par cette augmentation de volume de la