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qu’elles sont parfaites, se vendent aussi cher que les pierres orientales. On a crû pendant long-tems que l’émeraude venoit de la pierre que l’on appelle prime d’émeraude ; mais cette pierre est fort différente de l’émeraude. Voyez Prime d’Emeraude.

Théophraste rapporte qu’un roi de Babylone présenta au roi d’Egypte une émeraude dont la longueur étoit de quatre coudées, & la largeur de trois ; & qu’en même tems il y avoit en Egypte un obélisque composé de quatre émeraudes, qui avoit quarante coudées de haut, quatre de large en quelques endroits, & deux dans d’autres. Il est impossible qu’il y ait jamais eu des émeraudes de cette grandeur : on a pris pour émeraudes des choses d’une autre nature. L’histoire de la déesse Emeraude, rapportée par Garcilasso de la Vega, me paroît plus vraissemblable. Cet auteur dit que les peuples de la vallée de Manta au Pérou, adoroient une émeraude grosse comme un œuf d’autruche ; on la montroit les jours de grande fête, & les Indiens accouroient de toutes parts pour voir leur déesse, & pour lui offrir des émeraudes. Les prêtres & les caciques donnoient à entendre que la déesse étoit bien-aise qu’on lui présentât ses filles, & par ce moyen ils en amasserent une grande quantité. Les Espagnols, dans le tems de la conquête du Pérou, trouverent toutes les filles de la déesse ; mais les Indiens cacherent si bien la mere, qu’on n’a jamais pû savoir où elle étoit. D. Alvarado & ses compagnons briserent la plus grande partie des émeraudes sur des enclumes, parce qu’ils croyoient que si elles étoient fines, elles ne devoient pas se casser. Voyez Pierres précieuses. (I)

Emeraude, (Pharmacie.) c’est une des pierres qu’on appelle en Pharmacie fragment précieux. Voyez Fragment précieux.

EMERGENT, adj. année émergente, (Chron.) c’est l’époque dont nous commençons à compter le tems. Voyez Epoque.

Notre année émergente est quelquefois celle de la création. Les Juifs prenoient pour année émergente, ou celle du déluge, ou celle de l’exode, c’est-à-dire de leur sortie d’Egypte.

L’année émergente des Grecs étoit l’année de l’établissement, ou du moins du rétablissement des jeux olympiques. Les Romains comptoient depuis la fondation de Rome. Les Chrétiens comptent depuis la naissance de Jesus-Christ, ou environ ; les Mahométans, depuis l’hégire ou fuite de Mahomet de la Mecque à Médine, qui arriva en l’an 622 de J. C. Voyez Ere. (O)

EMERIL, s. m. smiris (Hist. nat. Minéral) C’est une mine de fer d’une dureté extraordinaire : elle est pesante, ressemble à une pierre : sa couleur est ou grise, ou rougeâtre, ou noirâtre : la partie ferrugineuse y est en très-petite quantité, & tellement enveloppée, que l’aimant ne peut point l’attirer. L’émeril résiste à l’action du feu, & n’entre en fusion que très-difficilement ; il faut y joindre pour cela une grande quantité de fondant : c’est ce qui l’a fait placer au nombre des mines de fer réfractaires. On voit par-là que l’on ne trouveroit point son compte à traiter l’émeril pour en tirer le fer. L’usage principal qu’on en fait, est de polir l’acier, le fer, le verre, & les pierres les plus dures ; mais pour l’employer ainsi il faut commencer par le réduire en une poudre extrèmement fine, ensuite de quoi on le délaye dans l’eau, ou dans de l’huile pour certains cas. (—)

EMERILLON, s. m. (Hist. nat. Ornith.) asalon. C’est le plus petit de tous les oiseaux que l’on dresse pour la chasse, à l’exception de la pie-grieche ; car il n’est pas plus gros que le merle. Il a un pié un pouce de longueur depuis la pointe du bec jusqu’à l’extrémité de la queue, & un pié jusqu’au bout des ongles. Dans cette espece d’oiseau les mâles sont

plus petits que les femelles. Le bec est de couleur bleue, & garni de chaque côté d’une appendice ; & l’iris des yeux a une couleur de noisette. Il y a au-dessous de l’occiput une sorte de collier de couleur blanche-jaunâtre. Le menton est blanc ; le dos, & en général toute la face supérieure du corps, sont de couleur de rouille, mêlée de bleu-noirâtre. Les grandes plumes des ailes sont noires, & parsemées de taches de couleur de rouille. La queue a cinq pouces de longueur, & est traversée par quatorze bandes qui sont alternativement de couleur noirâtre & de couleur blanche mêlée d’une teinte de roux. La face inférieure, c’est-à-dire la poitrine, le ventre, &c. est d’un blanc mêlé de couleur de rouille, avec des taches noires & teintes de rouille. Ces taches, au lieu d’être transversales, sont dirigées de haut en-bas de la tête à la queue. Cet oiseau a les pattes longues, minces, & de couleur jaunâtre, & les ongles noirs. On distingue le mâle d’avec la femelle, par le moyen d’une tache bleue qui se trouve à la racine de la queue des mâles. La femelle est, comme dans toutes les autres especes d’oiseaux de proie, plus grosse que le mâle, mais d’une couleur rousse moins foncée, & parsemée d’une teinte de bleu. Il n’y a sur la queue du mâle que cinq larges bandes transversales noires, & cinq autres moins larges, d’un roux plus foncé. La longueur de la queue est de cinq pouces, & celle de l’oiseau entier, d’un pié. Quoique l’émerillon soit un des plus petits oiseaux de proie, il a autant de courage & de hardiesse qu’aucun autre ; il tue les perdrix en les frappant de son bec sur la tête, & son coup est fait en un instant. Willughb. Ornith. Voyez Oiseau. (I)

Emerillon, (Artill.) c’est une petite piece de canon qui ne passe guere une livre de balles. (Q)

Emerillon, en terme de Boutonnier, c’est un ustensile de cuivre à quatre pans, plus haut que large, vuidé dans ses quatre faces, & garni à chaque extrémité de deux crochets rivés dans son intérieur, mais de façon qu’ils puissent joüer dans leur trou. L’un de ces crochets sert à attacher l’outil à une corde ou à autre chose ; & celui de devant, à retenir la guipure. Quand le fil est retors suffisamment du même sens, & de la grosseur qu’on veut, on attache une autre soie ou fil de même ou de différente couleur, à l’émerillon. On fait tourner la premiere roue du roüet, & l’on conduit le brin de l’émerillon vers le roüet, de maniere que retordu dans un sens contraire à ceux qui lui servent de base, & à distances égales, il produit ce qu’on appelle du guipé. Voyez Guipé.

Emerillon, terme de Cordier, est un crochet de fer tellement disposé dans son manche, qu’il y peut tourner avec beaucoup de facilité.

opqr représente un émerillon : o est un petit cylindre de bois dur, évidé dans son milieu : q est un crochet qui a la liberté de tourner, au moyen de la tête qu’on apperçoit dans la partie évuidée du cylindre de bois op. C’est à ce crochet que les fileurs attachent leur fil, quand ils veulent lui laisser perdre de son tortillement. r est un anneau de fer par lequel les fileurs tiennent l’émerillon ; & cet anneau a la liberté de tourner, au moyen d’une petite tête qu’on apperçoit dans la rainure du petit cylindre op. Cet instrument ne sert pas seulement aux fileurs, les commetteurs s’en servent aussi. Voyez l’art. Corderie, & la seconde Planche.

* EMERITAT, s. m. (Hist. anc.) c’est ainsi qu’on appelloit chez les Romains, la récompense qu’on accordoit à un soldat qui avoit bien servi pendant un certain nombre d’années. On dispute si elle consistoit ou en argent, ou en terre, ou dans l’un & l’autre, & s’il n’y avoit aucune différence entre l’emeritum & le præmium. L’histoire nous apprend qu’Auguste donna à un prétorien 5000 drachmes, & à un soldat