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les secrétions des sucs excrémenteux qui se forment continuellement, & qui doivent être chassés hors du corps.

Ainsi l’indication curative dans de telles fievres ; est de chercher à connoître le caractere de l’hétérogene irritant, pour le corriger & le détruire par les remedes convenables

Fievre inflammatoire, fievre aignë ou fievre ardente dont l’inflammation est répandue généralement sur tout le corps, lorsqu’elle n’est pas fixée particulierement dans tel ou tel organe. Elle consiste dans la vîtesse de la circulation rendue plus forte & plus fréquente par la contraction du cœur, en même tems que la résistance est augmentée vers les vaisseaux capillaires. Ainsi son siége est toute partie du corps où se distribuent des arteres sanguines, & où les lymphatiques prennent leur origine. Voyez Fievre aigue, Fievre ardente, Inflammation .

Fievre intermittente, febris intermittens, c’est celle dont l’intermission périodique produit toûjours une entiere apyrexie entre deux paroxysmes.

Ses distinctions en différentes classes sont faciles à faire, n’étant fondées que sur la seule différence du tems que ce mal dure ; & c’est d’après la différente durée de ces fievres, qu’on les nomme quotidienne, tierce, demi-tierce, quarte, double-quarte, &c. Il y en a quelquefois de quintes, πεμπταῖον, & même Boerhaave en a vû de septenaires exquises.

Distinction des fievres du printems & d’automne. Mais une distinction essentielle, c’est celle des fievres intermittentes de printems & d’automne. On appelle en général fievres intermittentes de printems, celles qui regnent depuis le mois de Février jusqu’à celui d’Août : & fievres intermittentes d’automne, celles qui commencent au mois d’Août & finissent en Février. Cette distinction est très-nécessaire à cause de la différence qui se trouve, tant dans la nature & les symptomes de ces deux sortes de fievres, que dans leur fin, leur durée & leur traitement ; d’ailleurs l’une se change en l’autre. Souvent même au commencement de l’automne, elles imitent exactement les fievres continues à cause de la longueur & du redoublement des accès ; cependant leur caractere & leur cure different extrèmement.

Cours & caracteres de la fievre intermittente. Elle commence avec des bâillemens, des alongemens, avec lassitude, débilité, froid, frisson, tremblement, pâleur aux extrémités, respiration difficile, anxiété, nausée, vomissement, célérité, foiblesse & petitesse de pouls. Plus ces accidens sont considérables & plus il s’en trouve de réunis ensemble, plus la fievre, la chaleur & les autres symptomes qui la suivent, sont mauvais ; tel est le premier état de la fievre intermitunte, & cet état qui répond à l’augment des fievres continues, est aussi le plus dangereux de tous : alors l’urine est ordinairement crûe & ténue.

Harvée en ouvrant des cadavres de gens morts dans ce premier degré de fievre intermittente, après des oppressions, des soûpirs, des anxiétés, des langueurs qu’ils avoient souffert, a trouvé le poumon farci de sang épais. Harv. exercit. anat. ch. xvj.

Au premier état il en succede un second, qui commence avec chaleur, rougeur, respiration forte, étendue, libre, moins d’anxiété, un pouls plus élevé plus fort, une grande soif, de la douleur aux articulations & à la tête, le plus souvent avec des urines rouges & enflammées.

Enfin 3°. la maladie finit d’ordinaire par des sueurs plus ou moins abondantes : tous les symptomes se calment, les urines sont épaisses, & déposent un sédiment ressemblant à de la brique broyée ; le sommeil, l’apyrexie & la lassitude surviennent.

Ses effets. La fievre intermittente qui est de longue durée, endommage les fibres des petits vaisseaux &

des visceres par la stagnation, l’obstruction, la coagulation, l’atténuation qu’elle cause, de-la non-seulement les vaisseaux s’affoiblissent, mais les liquides dégénerent principalement, en ce que leurs parties sont moins homogenes & moins également mêlées ; de ces vices naît l’acrimonie des liqueurs, & de toutes ces choses ensemble, suit une disposition aux sueurs, qui débilite beaucoup par la perte de la viscosité même du sang qui sort avec elles ; l’urine est alors trouble, grasse & épaisse : telle est aussi la salive : ainsi le sang étant affoibli, dissous, privé de sa meilleure partie, celle qui reste devient acre & tenace ; c’est conséquemment par le relâchement des vaisseaux, l’épaississement & l’acreté des liqueurs, que ces fievres, lorsqu’elles durent long-tems, dégénerent quelquefois en maladies chroniques, telles que le scorbut, l’hydropisie, l’ictere, la leucophlegmatie, les tumeurs skirrheuses du bas-ventre, & autres maux qui en résultent.

Cause prochaine des fievres intermittentes. Après cette exacte discussion du cours des fievres intermittentes, on établit pour leur cause prochaine la viscosité du liquide artériel, & peut-être l’inaction des esprits, tant du cerveau que du cervelet, qui sont destinés pour le cœur, quand par quelque cause que ce soit, la contraction du cœur devient ensuite plus prompte & plus forte, & quand la résolution des humeurs qui sont en stagnation, vient à se faire. Par conséquent comme il n’est point de fievre intermittente qui ne garde cet ordre, il paroît que celui qui a pû surmonter le premier tems & la premiere cause, aura la force de supporter entierement le paroxysme.

Mais comme le premier état d’une fievre intermittente & sa cause prochaine peuvent venir d’une infinité de causes, même assez peu considérables, lesquelles peuvent plusieurs à la fois, prendre naissance au-dedans du corps, & y faire des progrès dans un état déterminé ; nos foibles lumieres ne sauroient distinguer cette cause actuelle d’une infinité d’autres possibles, encore moins donner la raison du retour périodique des fievres, suivant les lois de l’économie animale. Ce sont des secrets que la nature se plaît à cacher à l’intelligence humaine.

Cure. Dans le tems de l’apyrexie, ou même dans le premier état de la fievre intermittente, on doit avoir recours aux apéritifs salins, aux alkalis, aux aromatiques, aux sels minéraux, aux délayans, aux matieres douces & balsamiques ; la chaleur, le mouvement & les frictions conviennent aussi.

De plus, s’il s’est fait dans les premieres voies un grand amas de mauvaises humeurs, on les évacue par un purgatif ou souvent par un vomitif, pourvû qu’on le prenne dans un tems assez éloigné du paroxysme, pourvû qu’il fasse son effet avant son retour. Ce remede est indiqué par le régime qu’on a observé, par les maladies & les symptomes qui ont précédé, par les nausées, le vomissement, les rapports, le gonflement, par l’haleine, par les saletés qui paroissent sur la langue, au gosier, au palais, par l’anorexie, par l’amertume de la bouche, par le vertige ténébreux ; après l’opération du purgatif ou du vomitif, il faut avant le retour de l’accès suivant, appaiser le trouble qu’il a pû causer, par le secours d’un opiat, d’un calmant, d’un narcotique.

On dissipe aussi & le froid de la fievre, & la fievre même, par un sudorifique ; & voici comment. Quelques heures avant le retour de l’accès, on donne au malade une grande quantité de tisane apéritive, délayante, un peu narcotique : ensuite une heure avant le paroxysme, on le fait suer, & on ne cesse que deux heures après le tems que l’accès a recommencé, ou qu’il auroit dû reparoître.

Le second état de la fievre intermittente indique la nécessité d’une boisson aqueuse, chaude, nitrée, un