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FORMIER, s. m. ouvrier qui fait & vend des formes de bois, sur lesquelles on bâtit des souliers.

Il y a peu de ces sortes d’artisans à Paris. Ils ne font point un corps de jurande, & n’ont ni statuts ni jurés ; mais ils travaillent librement sans qualité & sans maîtrise.

FORMORT, FORMORTURE, FORMOTURE, FORMOUTURE, ou FREMETURE, (Jurisprud.) terme usité dans quelques coutumes pour exprimer l’échoite ou droit de succession, qui appartient a quelqu’un par le décès d’un autre.

Dans la coûtume de Hainaut, ch. x. art. 5. c’est la moitié des meubles que le survivant de deux conjoints entre roturiers doit donner en nature ou équivalant aux enfans issus d’un premier lit, lorsqu’il passe à des secondes nôces. Voyez la jurisprudence de Hainaut, pag. 29.

En la coutume de Cambrai, tit. vij. art. 11. de Lalleue sous Arras, de Namur, art. 80. c’est l’échoite ou droit successif qui appartient à quelqu’un, ou bien qui est dû au seigneur quand quelqu’un non marié, ni bourgeois, est décédé en sa seigneurie & justice, soit à l’égard des meubles ou autres biens.

La coûtume de Mons, ch. xxxvj. se sert du terme fremeture.

Pinault des Jaunaux sur Cambrai, loc. cit. prétend que le mot formouture tire son étymologie de formé le moitié ; mais cette idée est refutée avec raison par le commentateur d’Artois sur l’art. 153. où il observe que la préposition for est fréquente & ajoutée à plusieurs dictions pour exprimer davantage, comme formariage forban. Il semble néanmoins que toutes ces dictons soient d’abord dérivées de foras ou foris, qui signifie dehors, & que fortroture soit une abréviation de foris-motura, c’est-à-dire les choses que l’en emporte hors la maison mortuaire.

Tout ce qui est acquis à quelqu’un par mort, soit à titre de communauté, de succession ou de legs, peut être nommé formoture.

Les immeubles & les meubles échus par mort à ces différens titres, sont également compris sous le nom de formoture.

Il y a cependant des coûtumes où le terme de formoture est restreint à la portion mobiliaire prise à titre de communauté, de succession, ou de legs.

L’usage certain du pays d’Artois, est que le mot pur & simple de formoture ou formouture ne comprend que la portion, l’échoite, ou l’échéance mobiliaire, & non l’immobiliaire.

Ainsi une veuve qui renonce à la formouture de son mari, un enfant qui renonce à la formouture de son pere ou de sa mere, ne sont pas exclus pour cela de la faculté de demander leurs parts & portions des immeubles de la communauté ou de la succession.

Voyez la somme rurale, liv. I. tit. lxxvj. art. 2. & 4. Carondas eodem, & Ducange en son gloss. latin, aux mots mortalagium, mortalitas, mortuarium. (A)

FORMOSE, (Geog.) selon le P. Duhalde, grande île de la mer de la Chine, à l’orient de la province de Fokien, & qui s’étend du nord au sud 22d. 8′. de lat. septentrionale jusqu’au 25d. 20′. Une chaîne de montagnes la sépare dans cette longueur, en orientale & occidentale. La partie orientale n’est habitée que par les naturels du pays. La partie occidentale est sous la domination des Chinois, qui la cultivent avec soin ; ils en ont chassé les Hollandois en 1661, & y ont nommé un viceroi en 1682. Voyez le P. Duhalde, descript. de la Chine, & le P. Charlevoix, hist. du Japon. Le Tai-Ouang-Fou est la capitale de cette île. Long. 139. 10-141. 28. lat. 22.8-25. 20. (D. J.)

FORMULAIRE, s. m. (Théol. & Hist. ecclés.) on appelle ainsi en général toute formule de foi qu’on propose pour être reçûe ou signée ; mais on donne

aujourd’hui ce nom (comme par excellence) au fameux formulaire dont le clergé de France a ordonné la signature en 1661, & par lequel l’on condamne les cinq propositions dites de Jansénius.

Ce formulaire, auquel un petit nombre d’ecclésiastiques refuse encore d’adhérer, est une des principales causes des troubles dont l’église de France est affligée depuis cent ans. La postérité aura-t-elle pour les auteurs de ces troubles de la pitié ou de l’indignation, quand elle saura qu’une dissension si acharnée se réduit à savoir, si les cinq propositions expriment ou non la doctrine de l’évêque d’Ypres ? car tous s’accordent à condamner ces propositions en elles-mêmes. On appelle (très-improprement) Jansénistes, ceux qui refusent de signer que Jansénius ait enseigné ces propositions. Ceux-ci de leur côté qualifient (non moins ridiculement) leurs adversaires de Molinistes, quoique le Molinisme n’ait rien de commun avec le formulaire ; & ils appellent athées les hommes sages qui rient de ces vaines contestations. Que les opinions de Luther & de Calvin ayent agité & divisé l’Europe, cela est triste sans doute ; mais du-moins ces opinions erronées rouloient sur des objets réels & importans à la religion. Mais que l’Eglise & l’Etat ayent été boulversés pour savoir si cinq propositions inintelligibles sont dans un livre que personne ne lit ; que des hommes, tels qu’Arnauld, qui auroient pu éclairer le genre humain par leurs écrits, ayent consacré leur vie & sacrifie leur repos à ces querelles frivoles ; que l’on ait porté la démence jusqu’à s’imaginer que l’Être supreme ait décidé par des miracles une controverse si digne des tems barbares : c’est, il faut l’avoüer, le comble de l’humiliation pour notre siecle. Le seul bien que ces disputes ayent produit, c’est d’avoir été l’occasion des Provinciales ; modele de bonne plaisanterie dans une matiere qui en paroissoit bien peu susceptible. Il ne manqueroit rien à cet immortel ouvrage, si les fanatiques[1] des deux partis y étoient également tournés en ridicule : mais Pascal n’a lancé ses traits que sur l’un des deux, sur celui qui avoit le plus de pouvoir, & qu’il croyoit mériter seul d’être immole à la risée publique. M. de Voltaire dans son chapitre du Jansénisme, qui fait partie du siecle de Louis XIV. a sû faire de la plaisanterie un usage plus impartial & plus utile ; elle est distribuée à droite & à gauche, avec une finesse & une legereté qui doit couvrir tous ces hommes de parti d’un mépris ineffaçable. Peut-être aucun ouvrage n’est-il plus propre à faire sentir combien le gouvernement a montré de lumieres & de sagesse en ordonnant enfin le silence sur ces matieres, & combien il eût été à desirer qu’une guerre aussi insensée eût été étouffée dès sa naissance. Mais le cardinal Mazarin qui gouvernoit alors, pouvoit-il prévoir que des hommes raisonnables s’acharneroient pendant plus de cent ans les uns contre les autres pour un pareil objet ? La faute que ce grand ministre fit en cette occasion, apprend à ceux qui ont l’autorité en main, que les querelles de religion, même les plus futiles, ne sont jamais à mépriser ; qu’il faut bien se garder de les aigrir par la persécution ; que le ridicule dont on peut les couvrir dès leur origine, est le moyen le plus sûr de les anéantir de bonne-heure ; qu’on ne sauroit sur-tout trop favoriser les progrès de l’esprit philosophique, qui en inspirant aux hommes l’indifférence pour ces frivoles disputes, est le plus ferme appui de la paix dans la religion & dans l’état, & le fondement le plus sûr du bonheur des hommes. (O)

FORMULE, s. f. (Algebre.) est un résultat général tiré d’un calcul algébrique, & renfermant une infinité de cas ; ensorte qu’on n’a plus à substituer que

  1. Nous disons les fanatiques ; car en tout genre le fanatisme seul est condamnable.