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vrir. On sent bien qu’il prescrit d’y mettre des charbons ardens, parce que les noirs refroidiroient : mais il me paroît que l’intervalle de huit minutes est bien long pour un pareil feu, & qu’il faut vraissemblablement mettre des charbons noirs très-souvent, encore de crainte de refroidissement ; cependant il n’est point question de ceux-ci. S’il y a des cendres dans le cendrier autant qu’il doit y en avoir à-peu-près ; s’il en passe beaucoup par le tuyau de fer ; quelle est l’épaisseur de ce tuyau ; jusqu’à quelle hauteur il rougit ; s’il paroît un jet de flamme au-dessus ; quelle est communément sa hauteur, & ce qu’il est capable de faire ; enfin quels sont les inconvéniens qu’il a éprouvés avant que de parvenir à ce point, qu’on peut appeller de perfection. Toutes ces questions bien éclaircies de la part de M. Pott, & quantité d’autres encore que cet illustre chimiste est capable de se faire, ne pourroient manquer de répandre une grande lumiere sur la théorie des fourneaux qui éclaireroit sur leur construction. Il pourroit encore ajoûter à cela une docimastique de terres & de pierres, dans les vûes de les employer à la construction des fourneaux & vaisseaux ; ce qui abregeroit peut-être bien des tâtonnemens.

Il est aisé de voir que son fourneau n’est guere destiné qu’à ce à quoi il l’a employé, & il n’en vaut certainement que mieux : on peut cependant y mettre une grille de treize pouces de diametre, si on veut élever le foyer ; celle qui sera à la partie inférieure du corps près du cendrier, n’en peut avoir que neuf, en comptant un pouce & demi d’épaisseur pour son garni. J’ai dit que ce fourneau n’en valoit que mieux de ne servir qu’à un usage ; & en effet il y a toute apparence que cet illustre artiste ne l’a divisé en différens corps le moins qu’il a pû, que parce qu’il a vû que c’étoit autant de perdu pour la chaleur : de-là l’inconséquence de ceux qui veulent tout faire avec le même. On ne disconvient pas que cela ne fût mieux si cela pouvoit être, & qu’on ne réussisse même jusqu’à un certain point ; mais on n’a recours à ces sortes de fourneaux abregés qu’en cas de nécessité, preuve certaine de leurs défauts en bien des circonstances ; & je ne crois point du tout que celui de Beccher, par exemple, pût fondre les corps qui se fondent dans celui de M. Pott : le fourneau de Beccher peut cependant être appellé un chef-d’œuvre dans le genre des polychrestes, comme celui de M. Pott l’est en fait de fusion.

Le maréchal reverbere la flamme avec l’eau dont il arrose son charbon, & l’expérience lui dit qu’il a raison : mais la concentration qu’on se procurera de toutes parts sans éteindre une partie du charbon, & avec des parois qui l’allumeroient s’il étoit éteint, ne doit-elle pas l’emporter infiniment sur celui de la forge ? Les rayons ignés doivent toûjours être comptés pour quelque chose, quelque direction qu’ils ayent ; soit qu’ils soient droits, qu’ils aillent vers un centre commun, qu’ils soient refléchis vis-à-vis d’un charbon, ou d’un autre rayon igné ou non, ils doivent toûjours augmenter le mouvement : ainsi donc il n’importe peut être pas tant qu’on le croit que le garni ait le poli d’un miroir parabolique ; d’ailleurs il faut remarquer que, comme on ne craint point de casser ce garni par une chaleur subite, on a la commodité de le faire, & on le fait aussi d’une composition qui donne un verre opaque, qui refléchit beaucoup plus de rayons ignés que la composition des autres fourneaux qu’on est obligé de faire poreux, de crainte qu’ils ne se cassent. Nouvelle raison de faire les fourneaux de fusion elliptiques en tôle, & les fourneaux de tôle elliptiques ; mais si la figure elliptique est celle qui approche le plus de la sphérique, la cylindrique approche aussi plus de l’elliptique que la quarrée : d’où il suit que cette derniere est la plus mauvaise de toutes.

Si les fourneaux en tôle coûtent plus que les autres, on en est bien dédommagé par ailleurs ; outre les avantages considérables que nous venons de parcourir, ils ont encore celui de la durée : on croiroit peut-être qu’ils seroient détruits par la rouille ; mais cet inconvénient n’arrive qu’avec l’aide de l’humidité, & un fourneau par sa nature n’est pas destiné à y être exposé : il est vrai qu’il a à essuyer celle du garni, mais pour lors il est neuf, il la supporte mieux, elle n’est pas de longue durée, & d’ailleurs on peut le vernir pour l’en garantir. On sait que le fer résiste long-tems au feu ; nous en avons exposé les raisons, article Flux. Voyez aussi Phlogistique & Réduction. A la vérité le garni empêche que la carcasse du fourneau ne jouisse de cet avantage ; mais il se trouve toûjours de petites crevasses, à travers desquelles il se fait jour : au reste il est d’expérience que ces sortes de fourneaux sont les plus durables, ils ne se cassent pas comme ceux de terre ; & on doit remarquer que les artistes les plus exercés, tels que les Allemands, les préferent à tous les autres. Si l’on craignoit encore la rouille malgré ce que nous venons de dire, on pourroit avoir recours au cuivre ; mais il coûteroit bien plus cher, & pourroit se calciner.

Il y a des fourneaux dont la figure paroît être d’abord précisément le contraire de celle qui donne le feu le plus violent ; je veux parler de ceux de décoction, qui sont en entonnoir : mais il ne faut pas un grand feu pour faire bouillir de l’eau, & en second lieu il faut qu’ils reçoivent un vaisseau large : cependant si l’on considere, comme on le doit faire, le fourneau avec son appareil, on verra que son ouverture est réduite aux quatre regîtres ; ce qui corrige leur défaut apparent : je dis apparent, & en effet il n’est que cela. Les fourneaux coniques sont des especes de fourneaux elliptiques ; ils donneroient certainement moins de chaleur s’ils étoient cylindriques, tout étant égal d’ailleurs, c’est-à-dire s’ils avoient une ouverture de même diametre pour recevoir le même vaisseau, & si la quantité du charbon étoit la même. On observe qu’on les fait souvent trop élevés de foyer. Quoique la chaleur monte tout naturellement, & soit poussée en-haut par l’air qui frappe la grille, on ne doit pas laisser de faire un fourneau elliptique ou conique par le bas ; parce qu’il faut moins d’aliment pour le feu, que la même quantité y est plus à l’étroit, & fait un tas plus élevé, ce qui est capital, & que le feu en est plus fortement refléchi vers le haut. Enfin un fourneau de fusion doit être elliptique, par la même raison que ceux de décoction sont coniques. Je ne crois pas qu’on soit tenté de nier que le feu acquierre de nouvelles forces par l’augmentation de quantité, par la réflexion ; il n’est question pour appercevoir la vérité de ce fait, que de se rappeller qu’il est plus fort dans un fourneau qui ne prend point l’air par les côtés, que dans celui qui le prend ; & qu’un charbon seul perd peu-à-peu son mouvement igné, pendant que ce mouvement se conserve entre plusieurs, & est d’autant plus rapide, qu’il est entretenu par un plus grand nombre de corps qui se le communiquent & se le réfléchissent. On sait que plusieurs fils-d’archal liés ensemble comme une gratte-bosse & soufflés vivement, se son lent. Ce feu refléchi de toutes parts doit augmenter de vivacité, par la même raison que quand il est animé par plusieurs soufflets places circulairement. Mais si le mouvement constitue l’action du feu, comme il n’y a pas lieu d’en douter, il doit y avoir quelques endroits du fourneau où ce mouvement sera le plus considérable, comme à un certain espace du foyer, au milieu ou à l’extrémité supérieure du fourneau. Cette conjecture est tirée du rapport que paroît avoir le feu qui y est contenu avec celui de la lampe de l’é-