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Le gorgeret (fig. 11.) est vu du côté convexe ; son manche est un anneau. Il y a sur sa partie latérale externe, du côté gauche, une rainure qui peut servir fort utilement à conduire un bistouri pour l’incision du col de la vessie.

M. Foubert a imaginé par sa nouvelle méthode de tailler, un gorgeret formé de deux pieces ou branches qui peuvent s’écarter & servir de dilatatoire. Voyez fig. 4. Il peut servir au grand appareil, & pourroit avoir sans inconvénient la rainure du gorgeret. fig. 11. (Y)

GORGERIN, s. m. (Hist. mod.) partie d’une ancienne armure qui servoit à couvrir la gorge quand un homme étoit armé de toutes pieces. Voy. Arme & Armure. Chambers. (Q)

Gorgerin, (Archit.) est la petite frise du chapiteau dorique, entre l’astragale du haut du fut de la colonne & les annelets ; on l’appelle aussi colarin.

GORGET, s. m. (Menuiserie.) espece de rabot ; il y en a de plusieurs façons : il y a le gorget portant un quarré, le gorget portant double quarré : ces outils servent aux Menuisiers pour faire les gorges des moulures.

GORGONA, (Géog.) petite île d’Italie dans la mer de Toscane, près de l’île de Capraïa, entre la côte du Pisan à l’est & l’île de Corse au sud : son circuit est d’environ trois lieues. Longit. 27. 35. latit. 43. 22. (D. J.)

GORGONE (la-) Géog. petite île inhabitée de la mer du Sud, sous le troisieme degré de latit. septentrionale ; à environ quatre lieues du continent, & à trente-huit de Capo-Corientes ; nord-quart au nord-est, & sud-quart au sud-oüest : il y pleut perpétuellement, au rapport de Dampierre, qui la nomme Gorgonia. On y trouve quantité de petits singes noirs, & quelques huîtres qui ont des perles. (D. J.)

GORGONEION, s. m. (Littérat. greq.) nom de masque particulier, en usage sur l’ancien théatre des Grecs : c’est proprement le nom qu’on donnoit à certains masques faits exprès pour inspirer l’effroi, & ne représenter que des figures horribles, telles que les furies & les Gorgones ; d’où leur vint la dénomination de γοργόνειον ; le genre de masque qui représentoit les personnes au naturel, s’appelloit προσωπεῖον ; le masque qui ne servoit qu’à représenter les ombres, se nommoit μορμολυκεῖον. Pollux n’a point distingué, comme il le devoit dans sa nomenclature, ces trois sortes de masque ; mais il est bien excusable dans un sujet de mode qui changea si souvent & qui étoit si varié. Voyez Masque. (D. J.)

* GORGONELLES, s. f. (Commerce.) sorte de toile qui se fabrique en Hollande & à Hambourg ; la longueur & la qualité varient ; on en trafique aux îles Canaries. Voyez le dictionn. du Commerce.

GORGONES, s. f. (Myth. & Littér.) trois sœurs filles de Phorcus & de Céto, & sœurs cadettes des Grées. Elles demeuroient, selon Hésiode, au-delà de l’Océan, à l’extrémité du monde, près du séjour de la nuit, là même où les Hespérides sont entendre les doux accens de leur voix.

Les noms des Gorgones sont Sthéno, Euryale & Méduse si célebre par ses malheurs : elle étoit mortelle, au lieu que ses deux sœurs n’étoient sujettes ni à la vieillesse ni à la mort. Le dieu souverain de la mer fut sensible aux charmes de Méduse ; & sur le gazon d’une prairie, au milieu des fleurs que le printems fait éclorre, il lui donna des marques de son amour. Elle périt ensuite d’une maniere funeste ; Persée lui coupa la tête.

Les trois Gorgones, disent encore les Poëtes, ont des aîles aux épaules ; leurs têtes sont hérissées de serpens ; leurs mains sont d’airain ; leurs dents sont aussi longues que les défenses des plus grands sangliers, objet d’effroi & d’horreur pour les pauvres

mortels ; nul homme ne peut les regarder en face, qu’il ne perde aussi-tôt la vie ; elles le pétrifient sur le champ, dit Pindare ; Virgile ajoûte qu’après la mort de Méduse, Sthéno & Euryale allerent habiter près des enfers, à la porte du noir palais de Pluton, où elles se sont toûjours tenues depuis avec les Centaures, les Scylles, le géant Briarée, l’hydre de Lerne, la Chimere, les Harpies, & tous les autres monstres éclos du cerveau de ce poëte.

Multaque præterea variarum monstra ferarum....
Gorgones, Harpiioeque......

Il n’y a peut-être rien de plus célebre dans les traditions fabuleuses que les Gorgones, ni rien de plus ignoré dans les annales du monde. C’est sous ces deux points de vûe que M. l’abbé Massieu envisage ce sujet dans une savante dissertation, dont le précis pourra du-moins servir à nous convaincre du goût inconcevable de l’esprit humain pour les chimeres.

En effet la fable des Gorgones ne semble être autre chose qu’un produit extravagant de l’imagination, ou bien un édifice monstrueux élevé sur des fondemens, dont l’origine est l’écueil de la sagacité des critiques. Il est vrai que plusieurs historiens ont tâché de donner à cette fable une sorte de réalité ; mais il ne paroît pas qu’on puisse faire aucun fond sur ce qu’ils en rapportent, puisque le récit même de Diodore de Sicile & de Pausanias n’a l’air que d’un roman.

Diodore assûre que les Gorgones étoient des femmes guerrieres qui habitoient la Lybie près du lac Tritonide ; qu’elles furent souvent en guerre avec les Amazones leurs voisines ; qu’elles avoient Méduse pour reine, du tems de Persée qui les vainquit ; & qu’enfin Hercule les détruisit entierement ainsi que leurs rivales, persuadé que dans le grand projet qu’il avoit formé d’être utile au genre humain, il n’exécuteroit son dessein qu’en partie, s’il souffroit qu’il y eût au monde quelques nations qui fussent soûmises à la domination des femmes.

La narration de Pausanias s’accorde assez bien avec celle de Diodore de Sicile ; & tandis que tous les deux font passer les Gorgones pour des héroïnes, d’autres écrivains en font des monstres terribles. Suivant ces derniers, les Gorgones ne sont point des femmes belliqueuses qui ayent vécu sous une forme de gouvernement, & dont la puissance se soit long-tems soûtenue ; c’étoient, disent-ils, des femmes féroces d’une figure monstrueuse, qui habitoient les antres & les forêts, se jettoient sur les passans, & faisoient d’affreux ravages : mais ces mêmes auteurs qui conviennent sur ce point, different sur l’endroit où ils assignent la demeure de ces monstres. Proclus de Carthage, Alexandre de Mynde & Athenée les placent dans la Lybie ; au lieu que Xenophon de Lampsaque, Pline & Solin prétendent qu’elles habitoient les îles Gorgades.

Alexandre de Mynde cité par Athenée, ne veut pas même que les Gorgones fussent des femmes ; il soûtient que c’étoient de vraies bêtes féroces, qui pétrifioient les hommes en les regardant. Il y a, dit-il, dans la Lybie un animal que les Nomades appellent Gorgone, qui a beaucoup l’air d’une brebis sauvage, & dont le souffle est si empesté, qu’il infecte tous ceux qui l’approchent ; une longue criniere lui tombe sur les yeux, & lui dérobe l’usage de la vûe ; elle est si épaisse & si pesante cette criniere, qu’il a bien de la peine à l’écarter pour voir les objets qui sont autour de lui ; lorsqu’il en vient à-bout par quelque effort extraordinaire, il renverse par terre ceux qu’il regarde, & les tue avec le poison qui sort de ses yeux : quelques soldats de Marius, ajoûte-t-il, en firent une triste ex-