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tions sont du chevalier de Ville & du maréchal de Vauban. Les Anglois prirent Gravelines en 1383, & les François en 1644 : l’archiduc Léopold la reprit en 1652, & le maréchal de la Ferté en 1658. Elle fut cédée à la France par le traité des Pyrénées ; elle est dans un terrein marécageux sur l’Aa, près de la mer, à 5 lieues O. de Calais, 6 S. O. de Dunkerque, 16 S. O. de Gand. Long. suivant Cassini, 15d 39′ 5″. latit. 50d 58′ 40″. (D. J.)

GRAVELLE, s. f. (maladie) voyez Pierre.

Gravelle, voyez Cendres.

Gravelle ; les Cloutiers d’épingle appellent de ce nom le tartre qui s’attache aux douves de tonneau ; ils le font sécher, & s’en servent pour jaunir leurs clous. Voyez Jaunir. Les Teinturiers se servent du même nom.

* GRAVER, v. act. & neut. c’est imiter les objets de la nature & les scenes de la vie, avec des traits tracés au burin, ou autrement, sur des substances capables de les retenir, & d’en laisser l’empreinte sur le papier, la toile, le satin, par le moyen de l’impression. On grave sur presque toutes les matieres dures, le fer, l’acier, la pierre, le cuivre, le bois, &c. Voyez ces différens travaux aux articles Gravure.

Graver, en terme d’Artificier, se dit de l’effet d’un feu trop vif à l’égard d’un cartouche qui n’est pas de force suffisante pour y résister parfaitement, soit parce que les révolutions du carton ne sont pas exactement collées les unes sur les autres, soit parce qu’elles ne sont pas assez nombreuses, ce qui fait que le cartouche perce ou se fend. Dictionn. de Trév.

Graver, en terme de Boutonnier, c’est l’action d’imprimer sur un cerceau tel ou tel dessein. On a pour cela des poinçons qui couvrent tout le cerceau ; & d’un coup de marteau fort ou foible, selon l’épaisseur de la piece, on y marque l’empreinte du poinçon. Quoiqu’il n’y ait rien de trop merveilleux dans cette espece de gravure, ceux qui la font ne laissent pas de se cacher soigneusement pour travailler : si c’est de peur qu’on ne leur dérobe leur secret, où est-il donc ce secret ? Il est plus vraissemblable de croire que c’est pour prêter à cette manœuvre une difficulté imaginaire, qui abuse ceux qui voudroient s’occuper dans cette partie, ou pour donner du relief à leur ouvrage, & se faire mieux payer de leur tems. Si c’est cela, ces ouvriers ne sont pas mal-adroits.

Graver, en terme de Piqueur en tabatiere, c’est tracer les desseins sur la tabatiere, en sorte que les traits ne s’effacent point ; ce qui arriveroit, si l’on ne se servoit que du crayon ou d’autre matiere semblable. On ne peut cependant faire aucun usage du burin dans cette opération ; sa forme triangulaire feroit des traits qui couvriroient les clous, &c. mais on ne se sert que d’une aiguille ordinaire.

GRAVESENDE, (Géogr.) petite ville d’Angleterre, dans la province de Kent, sur la Tamise, à 20 milles au-dessous de Londres, & à 7 de Rochester. C’est un port & passage très-fréquenté. Long. 17. 58. latit. 51. 30. (D. J.)

GRAVEUR en cuivre, en acier, au burin, à l’eau forte, en bois, en maniere noire, & en clair-obscur, (Arts modernes.) ce sont-là autant d’artistes qui par le moyen du dessein & de l’incision sur les matieres dures, imitent les lumieres & les ombres des objets visibles.

Les glorieux monumens du savoir des anciens ont presque tous péri : mais si à tant d’avantages qu’ils semblent avoir sur nous ils avoient joint l’art de graver, que de richesses nous en reviendroient ? elles tromperoient notre douleur, tanti solatia luctûs ! & peut-être nous appercevrions-nous moins de nos pertes. Il seroit sans doute échappé quelques empreintes de tant de rares productions de leur génie ;

nous aurions du-moins quelques images des grands hommes que nous admirons, ce patrimoine de la postérité, & qui la touche si fort. Cependant loin de nous affliger davantage, cherchons dans ce que nous avons, des motifs de consolation sur ce que nous n’avons plus. Ne songeons desormais qu’à tirer parti de la découverte admirable de la Gravure, moyen sûr de faire passer d’âge en âge jusqu’à nos derniers neveux, les connoissances que nous avons acquises.

J’envisage les productions de ce bel art comme un parterre émaillé de quantité de fleurs variées dans les formes & les couleurs, qui quoique moins précieuses les unes que les autres, concourent toutefois à l’effet de ce tout ensemble brillant, que les yeux du spectateur avide ne peuvent se lasser de considérer. Tels sont les ouvrages des habiles Graveurs qu’un curieux délicat a sû réunir dans son cabinet ; il les parcourt avec un plaisir secret ignoré des hommes sans goût : tantôt il admire à quel point de grands maîtres ont porté leur burin par une touche forte, vigoureuse & hardie ; tantôt il se plaît à voir la correction qui se présente sous des travaux plus agréables ; ensuite satisfait des beautés propres au burin, il passe à celles de l’eau-forte, qui moins recherchée dans ses atours, lui peint l’aimable nature dans sa simplicité : telle il la chérit dans les estampes du Parmesan, du Guide, & autres grands peintres qui ont laissé couler leurs pensées sur le cuivre avec cette facilité qu’on retrouve dans leurs desseins. Il est vrai qu’à regret il voit ces précieuses eaux fortes dénuées de ce clair-obscur, le charme de la vûe ; mais il les retrouve dans d’autres maîtres, qui célebres en cette partie, ont produit comme par enchantement sur les objets, les jours & les ombres qu’y répand la lumiere.

Ces maîtres méritent d’être connus non-seulement des amateurs, qui goûtent tant de plaisir au spectacle de leurs ouvrages, mais sur-tout des personnes qui se destinant au même art, brûlent de courir avec honneur dans la même carriere. C’est par ces raisons que nous nous croyons obligés de nommer ici ces illustres artistes, & de jetter en passant quelques fleurs sur leur tombe. On trouvera dans Moréri & dans le P. Anselme, la généalogie, la naissance, les noms des rois, des princes, des grands seigneurs ; l’Encyclopédie ne leur doit rien à ce titre, mais elle doit tout aux Arts & aux talens.

Albert Durer, né à Nuremberg en 1470, & dont j’ai parlé comme peintre au mot École, ne laisse presque à desirer dans les ouvrages de son tems, dont les Italiens eux-mêmes profiterent, sinon que cet illustre artiste eût connu l’antique, pour donner à ses figures autant d’élégance que de vérité.

Aldegraf, (Albert) né en Westphalie, disciple de Durer, en a saisi la maniere, & s’est fait autrefois une grande réputation.

Audran, (Gérard) mort en 1703 âgé de soixante trois ans, a exercé son burin à multiplier les grands morceaux du Poussin, de Mignard, & autres. On connoît ses magnifiques estampes des batailles d’Alexandre, qu’il a gravées d’après les desseins de le Brun : l’œuvre de cet artiste est recommandable par la force & le bon goût de sa maniere.

Baldini, (Baccio) florentin, fut éleve de Maso Finiguerra, inventeur du secret de la Gravure en cuivre, & fit paroître encore quelque chose de mieux que son maître.

Belle, (Etienne de la) né à Florence en 1610, mort dans la même ville en 1664, acquit une maniere d’eau-forte très-expéditive, & d’un si grand effet, que quelques curieux le mettent au-dessus de Callot. Si la maniere de ce maître n’est point si finie de gravure ni si précise de dessein que celle de Callot, sa touche est plus libre, plus savante, & plus pittoresque : peu de gens l’ont surpassé pour l’esprit, la finesse,