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de tout, & antécédemment à toute connoissance, ou prévision de la chûte du premier homme, a résolu de manifester sa miséricorde & sa justice : sa miséricorde en créant un certain nombre d’hommes pour les rendre heureux de toute éternité ; & sa justice en créant un certain nombre d’autres hommes pour les punir éternellement dans l’enfer. Voyez Prédestination.

D’autres prétendent que Dieu n’a pris cette résolution qu’en conséquence du péché originel, & de la prévision de ce péché qu’il a vû de toute éternité qu’Adam commettroit. Car, disent-ils, l’homme ayant perdu par ce péché la justice originelle & la grace, il ne mérite plus que des châtimens, tout le genre humain n’est plus qu’une masse de corruption que Dieu peut punir & abandonner aux supplices éternels sans blesser sa justice. Cependant pour ne pas faire éclater seulement sa justice, mais aussi sa miséricorde, il a résolu d’en tirer quelques-uns de cette masse pour les sanctifier & les rendre heureux. Voyez Élection.

Ceux qui défendent ce sentiment de la premiere maniere, s’appellent supralapsaires, parce qu’ils croient que Dieu a pris la résolution de perdre un certain nombre d’hommes, suprà lapsum, avant la chûte d’Adam, & indépendamment de cette chûte. Voyez Supralapsaires.

Les autres sont nommés infralapsaires, parce qu’ils veulent que Dieu ne l’ait prise qu’après la prévision de la chûte du premier homme, infrà lapsum, & en conséquence de cette chûte. Voyez le Diction. de Trévoux.

INFRUCTUEUX, adj. (Gram.) qui ne rapporte aucun fruit. Il se dit au physique & au moral. Un tems infructueux, des veilles infructueuses.

INFULE, subst. fém. (Hist. mod.) infula, nom que l’on donnoit anciennement aux ornemens des pontifes. Festus dit que les infules étoient des filamens de laine, des franges de laine dont on ornoit les prêtres & les victimes, même les temples.

Plusieurs auteurs confondent les infules avec la mitre, la tiare, ou le bonnet que portoient les prêtres. Il y avoit cependant beaucoup de différence.

L’infule étoit proprement une bandelette ou bande de laine blanche qui couvroit la partie de la tête où il y a des cheveux, jusqu’aux tempes, & de laquelle tomboient de chaque côté deux cordons, vittæ, pour la lier, ce qui fait que l’on confond souvent le nom vittæ cordons avec infulæ.

L’infule étoit aux prêtres ce qu’étoit le diadème aux rois, la marque de leur dignité & de leur autorité. La différence entre le diadème & l’infule, est que le diadème étoit plat & large, & l’infule entortillée & ronde. Voyez Diadème. Dict. de Trév.

INFUNDIBULUM, (Anatomie.) Voyez Entonnoir.

* INFUS, INFUSE, adj. (Gram.) On dit science infuse, grace infuse, sagesse infuse, c’est-à-dire qu’on n’a point acquise par ses soins, mais qu’il a plû à Dieu de verser dans quelques ames privilégiées.

On a agité & l’on agite encore dans les écoles sur toutes ces qualités infuses, beaucoup de questions frivoles que la saine philosophie n’a point encore décriées.

C’est bien peu de chose que ce qu’on a par infusion.

INFUSION, (Chimie & Pharmacie.) espece d’extraction, d’application d’un menstrue à une matiere dont on se propose de séparer une substance particuliere soluble dans ce menstrue, d’une autre substance insoluble par le même menstrue. Voyez Extraction, Chimie. Le caractere particulier de l’infusion est déterminé par le degré de chaleur, qui est inférieur dans cette operation au degré bouillant d’un

menstrue employé, mais qui est dû à un feu artificiel. Voyez Feu, Chimie. Le menstrue bouillant employé au même but, tout étant d’ailleurs égal, fait prendre à l’extraction opérée à ce degré de feu, le nom de décoction ; & le menstrue à froid (voyez Feu & Froid, Chimie.), celui de macération. Lorsque la chaleur artificielle mise en œuvre pour l’infusion, est celle des rayons directs du soleil, l’infusion s’appelle communément insolation. Voyez Décoction, Macération & Insolation. L’infusion long-tems continuée, s’appelle aussi digestion. Voyez Digestion, Chimie.

Les sujets de l’infusion sont toujours des corps concrets ou consistans, & presque toujours de l’ordre des tissus ou corps organisés, dont le squelette, la base, donne par sa nature peu de prise aux menstrues ordinaires, & sur-tout lorsque ces menstrues ne sont animés que par un foible degré de feu ; en sorte que les sucs végétaux & animaux, leurs matieres non organiques, telles que les gommes, les extraits proprement dits, la partie aromatique, le corps doux, les résines, la lymphe, la graisse se peuvent passer aisément dans ces menstrues, sans que les solides, le corps des fibres végétales ou animales, soient même superficiellement entamés. Ce corps fibreux, ce tissu, qui étant même absolument épuisé par les décoctions, n’a rien perdu de sa forme, de sa structure naturelle, & que les infusions les plus réitérées ne peuvent qu’imparfaitement dépouiller de la matiere soluble par le menstrue appliqué ; ce tissu, dis-je, s’appelle, après qu’il a essuyé l’infusion, résidu, & plus communément marc. Voyez Marc, Chim. Pharm.

On peut employer à l’infusion tous les menstrues connus dans l’art. Un acide minéral versé sans mesure sur une argile colorée, dans le dessein d’en séparer les parties métalliques d’où cette couleur dépend, & tenu long-tems sur cette argile à un léger degré de feu artificiel, est alors l’agent d’une véritable infusion ; mais l’usage ordinaire borne l’usage de ce mot pour désigner l’application de l’eau, de l’huile, & des liqueurs vineuses aux végétaux & aux animaux, & même l’infusion par les esprits ardens, s’appelle plus ordinairement teinture. Voyez Teinture.

On appelle quelquefois infusion la dissolution légere d’une substance entierement soluble par le menstrue appliqué, & qui n’est bornée que parce qu’on n’employe pas une quantité proportionnelle de menstrue, ou qu’on ne l’applique pas pendant assez longtems : c’est ainsi qu’on dit que le vin émétique se prépare, en faisant infuser du verre d’antimoine dans du vin, ou du vin dans une tasse de régule d’antimoine ; mais ce n’est que très-improprement qu’on appelle cette opération une infusion, puisque le résidu ou marc est parfaitement semblable, identique à la partie, ou pour mieux dire, à la portion dissoute.

L’infusion n’a d’autres regles de manuel que les regles très-générales de l’application des menstrues ; savoir, de disposer les corps à leur abord, en les divisant, s’ils ne le sont naturellement, par une des opérations préparatoires communes (voyez Opérations de chimie.) à opérer dans un vaisseau convenable tant pour la forme que pour la matiere ; à connoître d’après les découvertes précédentes, ou par le tatonnement, si le degré de chaleur propre à l’infusion est suffisant ou excessif pour le sujet qu’on y expose ; par exemple, si l’infusion peut faire du bon bouillon (voyez Feu, Chimie.), ou si elle ne retire pas d’une racine extractive & muqueuse, telle que celle de réglisse ou de grande consoude, l’extrait dont on n’a que faire, tandis que la macéra-