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elle ne détruisoit pas cependant celle de Crete, parce que c’étoit le peuple du monde qui avoit le plus d’amour pour la patrie, & la force de ce grand principe l’entraînoit uniquement dans ses démarches. Ne craignant que les ennemis du dehors, il commençoit toujours par se réunir de ce côté-là, avant que de rien entreprendre au-dedans, ce qui s’appelloit syncrêtisme, & c’est une belle expression.

Les lois de Pologne ont de nos jours leur espece d’insurrection, leur liberum veto ; mais outre que cette prérogative n’appartient qu’aux nobles dans les dietes, outre que les bourgeois des villes sont sans autorité, & les paysans de malheureux esclaves ; les inconvéniens qui résultent de ce liberum veto, font bien voir, dit M. de Montesquieu, que le seul peuple de Crete étoit en état d’employer un pareil remede, tant que les principes de leur gouvernement resterent sains. Esprit des lois, liv. VIII. chap. 9. (D. J.)

IN-TAKER, s. m. (Hist. mod.) nom que l’on donna autrefois à certains bandits qui habitoient une partie du nord d’Angleterre, & faisoient souvent des courses jusque dans le milieu de l’Ecosse, pour en piller les habitans.

Ceux qui faisoient ces expéditions s’appelloient Out-parters, & ceux qu’on laissoit pour recevoir le butin, In-takers. Dict. de Trév.

* INTARISSABLE, adj. (Gram.) qu’on ne peut tarir. Ce mot est emprunté de l’amas des eaux. Il se prend au simple, comme dans cet exemple ; cette source est intarissable. Les plus grandes chaleurs de l’été, les sécheresses les plus longues ne diminuent point la quantité de son produit. Au figuré, comme dans celle-ci : le fond des idées de cette homme est intarissable.

INTÉGRAL, adj. (Math. trans.) le calcul intégral est l’inverse du calcul différentiel. Voyez Différentiel.

Il consiste à trouver la quantité finie dont une quantité infiniment petite proposée est la différentielle ; ainsi supposons qu’on ait trouvé la différentielle de qui est . Si on proposoit de trouver la quantité dont est la différentielle ; ce seroit un probleme de calcul intégral.

Les Géometres n’ont rien laissé à desirer sur le calcul différentiel ; mais le ealcul intégral est encore très-imparfait. Voyez Différentiel.

Le calcul intégral répond à ce que les Anglois appellent méthode inverse des fluxions. Voyez Fluxions.

Le calcul intégral a deux parties, l’intégration des quantités différentielles qui n’ont qu’une variable, & l’intégration des différentielles qui renferment plusieurs variables. On n’attend point de nous que nous entrions ici dans aucun détail sur ce sujet : puisque ce ne sera jamais dans un ouvrage tel que celui-ci que ceux qui voudront s’instruire du calcul intégral en iront chercher les regles. Nous nous contenterons d’indiquer les livres que nous jugeons les meilleurs sur cette matiere, dans l’ordre à-peu-près dans lequel il faut les lire.

On commencera par les leçons de M. Jean Bernouilli sur le calcul intégral, imprimées en 1744, à Lausanne, dans le Tom. II. du recueil de ses œuvres. On continuera ensuite par la seconde partie du Tom. II. du traité anglois des fluxions de M. Maclaurin. Après quoi on pourra lire la quadrature des courbes de M. Newton, & ensuite le traité de M. Cottes, intitulé Harmonia mensurarum, imprimé à Londres en 1716. On trouvera dans les actes de Leipsic de 1718, 1719, &c. & dans le Tom. VI. des mem. de l’acad. de Pétersbourg, des memoires de Mrs Bernoulli & Herman, qui faciliteront beaucoup l’intelligence de ce dernier traité. On peut aussi avoir recours à

l’ouvrage de Dom Walmessey, qui a pour titre analyse des rapports, &c. & qui est comme un commentaire de l’ouvrage de M. Cottes. Dans ces ouvrages on ne pourra guere s’instruire que de la partie du calcul intégral, qui enseigne à intégrer ou a réduire à des quadratures les quantités qui ne renferment qu’une seule variable. Tout ce que nous avons sur la seconde partie, c’est-à-dire, sur l’intégration des différentielles à plusieurs variables, ne consiste qu’en des morceaux séparés, dont les principaux se trouvent épars dans le recueil des œuvres de M. Bernoulli, & dans les memoires des académies des Sciences de Paris, de Berlin & de Pétersbourg. M. Fontaine de l’académie royale des Sciences, a composé sur cette matiere un excellent ouvrage qui n’est encore que manuscrit, & qui est rempli des recherches les plus belles, les plus neuves & les plus profondes. C’est le témoignage qu’en a porté l’académie dont il est membre. Voyez l’histoire de cette académie 1742.

Au reste sans avoir recours aux différens écrits dont nous avons fait mention plus haut, on peut s’instruire à fond du calcul intégral dans l’ouvrage que M. de Bougainville le jeune a publié sur cette matiere en deux volumes in-4°. Il y a recueilli avec soin tout ce qui étoit épars dans les différens ouvrages dont avons parlé ; il a expliqué ce qui avoit besoin de l’être, & a réuni le tout en un seul corps d’ouvrage qui doit faciliter beaucoup l’étude de cette partie importante des Mathématiques. Mademoiselle Agnesi, savante mathématicienne de Milan, avoit aussi déjà recueilli les regles de calcul intégral dans un ouvrage italien, intitulé institutioni analitiche, &c. mais l’ouvrage de M. de Bougainville est encore plus compler. (O).

Intégrale, s. f. (Géom. trans.) on appelle ainsi la quantité finie & variable, dont une quantité différentielle proposée est la différence. Ainsi l’intégrale de dx est x, celle de est . Voyez Différentiel & Intégral. (O).

INTÉGRER, v. act. (Géom. transc.) c’est trouver l’intégrale d’une quantité différentielle proposée. (O).

INTEGRANT, adj. (Phys.) se dit des parties qui entrent dans la composition d’un tout. Elles different des parties essentielles en ce que les parties essentielles sont absolument nécessaires à la composition du tout, ensorte qu’on n’en peut ôter une sans que le tout change de nature, au lieu que les parties intégrantes ne sont nécessaires que pour la totalité, & pour ainsi dire le complément du tout. C’est ce qu’on entendra facilement par cet exemple : le bras n’est qu’une partie intégrante de l’homme ; le corps & l’ame en sont des parties essentielles. (O).

* INTEGRE, INTEGRITÉ, (Gram. & Morale.) la pratique de la justice dans toute son étendue & dans toute sa rigueur la plus scrupuleuse mérite à l’homme le titre d’integre. Voyez Justice. C’est la qualité principale d’un juge, d’un arbitre, d’un souverain. C’est dans le sacrifice de ses propres intérêts qu’on montre sur-tout son intégrité.. L’intégrité suppose une connoissance délicate des limites du juste & de l’injuste ; & ces limites sont quelquefois bien déliées, bien obscurcies. Si on rapportoit à la notion du juste ou de l’injuste toutes les actions de la vie, & si l’on réduisoit, comme il est possible, toutes les vertus à la justice, il n’y auroit pas un homme qu’on pût appeller integre.

Les mots integre & intégrité ont encore quelques acceptions. Un ouvrage n’a pas son intégrité lorsqu’il n’est pas achevé. Les Juifs prétendent observer aujourd’hui même leur religion dans toute son intégri-