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étrangers où il y aura des consuls, ne feront aucune foi en France s’ils ne sont par eux légalisés.

Lorsqu’on produit en France des actes reçus en pays étranger par des officiers publics, & légalisés dans le pays par l’ambassadeur ou autre ministre de France, on légalise au bureau des affaires étrangeres la légalisation donnée par l’ambassadeur envoyé ou autre personne ayant caractere public. Le ministre du roi qui a le département des affaires étrangeres, atteste que celui qui a légalisé l’acte en pays étranger a réellement le caractere mentionné en la légalisation, que c’est sa signature & le sceau dont il a coutume d’user.

Quand on veut faire valoir en France un acte reçu dans certains pays étrangers où le roi n’a point de ministres, on peut le faire légaliser par quelque françois qui s’y rencontre fortuitement, pourvu que ce soit une personne attachée à la France par quelque dignité connue, auquel cas cette personne, à defaut de ministre de France, a caractere représentatif pour légaliser ; il y en a un exemple tout récent. Un françois étant dans les états de Moscovie sur les côtes de la mer de Lenskogo, y passa une procuration pour toucher des rentes à lui dûes sur l’hôtel-de-ville de Paris. N’y ayant point de ministre du roi dans ces pays si éloignés, il fit légaliser sa procuration par un chef d’escadre des vaisseaux du roi qui se rencontra sur les côtes de cette mer. La légalisation fut faite dans le bord de cet officier ; lorsqu’on la présenta au payeur, il fit d’abord difficulté de déférer à une telle légalisation, néanmoins il fut décidé par les officiers supérieurs qu’elle étoit valable.

Tout ce que l’on vient de dire des légalisations ne doit s’appliquer qu’aux actes extrajudiciaires : car ordinairement on ne légalise point les jugemens quand il s’agit de les mettre à exécution hors du ressort de la jurisdiction de laquelle ils sont émanés, mais dans l’intérieur du royaume ; le juge qui les a rendus délivre une commission rogatoire adressée au juge du lieu où on veut faire l’exécution, lequel délivre de sa part un paréatis ou commission exécutoire en vertu de laquelle on met le jugement à exécution.

Ces paréatis ne sont pas proprement des légalisations, mais ils équivalent à une légalisation, puisqu’ils mettent en état d’exécuter le jugement dans un pays où son authenticité ne seroit pas connue sans paréatis, & ils renferment une légalisation tacite en ce qu’ordinairement le juge à qui l’on s’adresse pour les obtenir ne les accorde qu’autant qu’il reconnoît pour authentiques la signature & le sceau dont le jugement est revêtu.

A l’égard des jugemens rendus dans une souveraineté étrangere, que l’on veut faire valoir dans une autre souveraineté, on ne prend ni commission rogatoire, ni paréatis, parce qu’on ne peut pas les mettre à exécution ; ils ne produisent que l’action personnelle ex judicato, en vertu de laquelle il faut obtenir un jugement dans le lieu où on veut faire l’exécution, & dans ce cas je crois que dans la regle les jugemens auroient besoin d’être légalisés comme les actes extrajudiciaires, pour devenir authentiques dans le lieu où l’on s’en sert comme d’un titre pour se pourvoir par action ex judicato, mais je n’ai point vu de telles légalisations.

Il y a quelques états, tels que les Pays-bas, la Lorraine, & la principauté souveraine de Dombes, qui ont avec la France un droit réciproque d’entre-cours de jurisdiction, c’est-à-dire que les jugemens émanés de ces états étant revêtus d’une commission rogatoire du juge qui les a rendus, s’exécutent dans les autres états où ce droit d’entre-cours a lieu, pourvu qu’ils soient revêtus d’un paréatis du juge du lieu où on veut mettre le jugement à exécution.

Comme les paréatis qui s’obtiennent soit dans le

royaume, soit dans les pays étrangers, n’ont été introduits que pour pouvoir mettre le jugement à exécution, je crois que lorsqu’on les produit soit dans le royaume, soit ailleurs, non pas pour les mettre à exécution, mais seulement pour la preuve de certains faits qui en résultent, que ce seroit plûtôt le cas de les faire légaliser que de prendre un paréatis.

En effet, outre que le paréatis n’est pas une véritable attestation de l’authenticité du jugement, il peut arriver que l’on ne puisse pas accorder de paréatis, soit parce que le jugement dont il s’agit auroit déjà été exécuté & qu’on ne le produit que pour la preuve de certains faits qui en résultent, soit parce qu’il ne seroit pas exécutoire au profit de la personne qui le produit, soit enfin parce que l’expédition que l’on en représente n’est pas dans une forme exécutoire : dans tous ces cas où il s’agit de faire connoître l’authenticité du jugement, & où l’on ne peut pas prendre de paréatis, la légalisation me paroîtroit nécessaire, soit à l’égard des jugemens rendus dans les justices seigneuriales lorsqu’on veut qu’ils fassent foi hors de leur ressort, parce que le sceau du seigneur justicier n’est pas censé connu hors de son ressort, soit à l’égard des jugemens émanés de juges royaux pour en constater l’authenticité dans les pays étrangers ; j’avoue néanmoins que je n’ai point vu de telles légalisations.

Voyez l’édit du mois d’Octobre 1706, concernant le contrôle des registres des baptêmes, mariages & sépultures, article 2 ; l’arrêt du conseil du 30 Novembre suivant ; l’édit du mois d’Août 1717, articles 6 & 7 ; l’arrêt du conseil du 16 Mai 1720, articles 7 & 9 ; l’édit du mois de Juillet 1723, portant création de rentes viageres, articles 4 & 6 ; l’arrêt du conseil du 29 Août 1724, au sujet des droits de péages & autres semblables ; la déclaration du 27 Décembre 1727, pour la perception des rentes viageres ; l’édit de création de rentes de tontines de Novembre 1733, article 13, & autres édits & déclarations concernant les rentes viageres & de tontine, dans lesquels il est parlé de légalisation des procurations, certificats de vie, &c. (A)

LÉGALISER (Jurisprud.) c’est certifier l’authenticité d’un acte public, afin que l’on y ajoûte foi, même hors le district des officiers dont il est émané. Voyez ci-devant Légalisation. (A)

LÉGAT, legatus, s. m. (Jurisprud.) légat du pape ou du saint siege, est un ecclésiastique qui fait les fonctions de vicaire du pape, & qui exerce sa jurisdiction dans les lieux où le pape ne peut se trouver.

Le pape donne quelquefois le pouvoir de légat sans en conférer le titre ni la dignité.

Le titre de légat paroît emprunté du droit romain, suivant lequel on appelloit légats les personnes que l’empereur ou les premiers magistrats envoyoient dans les provinces pour y exercer en leur nom la jurisdiction. Quand ces légats ou vicaires étoient tirés de la cour de l’empereur, on les nommoit missi de latere, d’où il paroît que l’on a aussi emprunté le titre de légats à latere.

Les premiers légats du pape dont l’histoire ecclésiastique fasse mention, sont ceux que les papes envoyerent, dès le iv. siecle, aux conciles généraux ; Vitus & Vincent, prêtres, assisterent au concile de Nicée comme légats du pape Sylvestre. Le pape Jules ne pouvant assister en personne au concile de Sardique, y envoya à sa place deux prêtres & un diacre. Au concile de Milan le pape Tibere envoya trois légats ; Lucifer, évêque de Cagliari ; Pancrace, prêtre ; & Hilaire, diacre.

Au sixieme concile de Carthage, tenu en 419 sous le pape Boniface, assisterent les légats qui avoient été envoyés dès l’année précédente par le pape Zo-