Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/490

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LIEN, s. m. (Gramm.) il se dit de tout ce qui unit deux choses l’une à l’autre ; il se prend au physique & au moral. Le lien d’une gerbe ; le lien de l’amitié.

Lien, double, (Jurisprud.) voyez Double lien.

Liens, (Chirurgie.) bandes de soie, de fil ou de laine, dont on se sert pour contenir les malades, principalement dans l’opération de la taille, afin qu’ils ne changent point de situation, & ne puissent faire aucuns mouvemens qui pourroient rendre dangereuse à différens égards une opération qui exige une si grande précision.

On met ordinairement le malade sur le bord d’une table garnie d’un matelas, & de quelques oreillers pour soutenir la tête & les épaules. Cette situation presque horisontale, est préférable au plan incliné qu’on obtenoit avec une chaise renversée sous le matelas, ou avec un dossier à crémailliere, Plan. XII. fig. 2.

Lorsque le malade est assis sur le bord de la table, on applique les liens. Ce sont ordinairement des bandes de cinq ou six aunes de long, larges de trois ou quatre travers de doigt. On pose le milieu des deux liens sur le col au-dessus des épaules : deux aides placés, l’un à droite, l’autre à gauche, font passer, chacun de son côté un chef de liens par-devant la clavicule, & l’autre chef sur l’omoplatte. Ils les amenent sous l’aisselle où on les tourne deux ou trois fois en les cordelant. Ensuite on fait approcher les genoux du malade le plus que l’on peut vers son ventre, & dans ce tems on fait passer un des liens entre les cuisses & l’autre par dehors ; on les joint ensemble tous deux par-dessus, en les cordelant une fois. On fait pareillement approcher les talons du malade vers les fesses, tandis qu’on engage la jambe de la même façon. Après quoi on lui fait mettre quatre doigts de la main sous le pié, & le pouce au-dessous de la malléole externe, comme s’il vouloit prendre son talon. Dans cette situation, on lui engage les poignets & la main avec la jambe & le pié, observant de passer les chefs de liens par-dessous le pié en forme d’étrier, & ensuite on les conduit entre les piés & les pouces des mains, parce qu’il faut serrer médiocrement ; ce qui suffiroit néanmoins pour incommoder les pouces, si on les engageoit. Voyez Pl. IX. fig. 3. Elle représente en outre la situation d’un aide qui comprime sur les épaules ; & montre d’un côté l’attitude de ceux qui doivent contenir les jambes & les cuisses pendant l’opération.

Cet appareil a quelque chose d’effrayant pour le malade. On pourroit se dispenser de cette maniere de lier qui imprime quelquefois de la terreur aux assistans mêmes. M. Raw ne se servoit que de lacs pour contenir & fixer simplement les mains avec les piés, au moyen de quelques circonvolutions des chefs d’une bande. M. Ledran a imaginé des liens assez commodes, & qui assujettissent suffisamment les malades, sans l’embarras des grands liens ordinaires. Une tresse de fil fort, large de deux pouces, longue de deux piés ou environ a ses deux bouts réunis par une couture. Cette tresse pliée en deux, n’a plus qu’un pié de long. Un nœud coulant fait d’une pareille tresse, rapproche & embrasse ensemble les deux côtés de ce lien, qui alors fait une espece de 8. Ce nœud n’est pas fixe : on peut le faire couler vers l’un ou l’autre bout du lien. Voyez Pl. IX. fig. 6. & 7.

Pour s’en servir, chacun des deux aides passe une des mains du malade dans un des bouts du lien, & il l’assujettit avec le nœud coulant à l’endroit de la jointure du poignet ; aussi-tôt il fait passer l’autre bout du lien dans le pié, en forme d’étrier. Il porte une de ses mains entre les bras & le jarret du malade pour le lui soutenir, & de l’autre main il lui soutient le pié.

Plusieurs lithotomistes prennent pour liens des ceintures de laine en réseau, dont les couriers se serrent le ventre. On met cette ceinture en double : on fait dans l’anse un nœud coulant dans lequel on engage le poignet ; les deux chefs servent à fixer la main & le pié par différens croisés, & l’on en noue les extrémités. Cette ligature molette & épaisse peut être serrée assez fermement, & elle ne laisse aucune impression comme les bandes de fil. J’en ai introduit l’usage à l’hôpital de la charité de Paris en 1758.

On ne lie point les petits enfans : il suffit de les contenir de la façon que le représente la fig. 4. Planche XII.

On donne aussi le nom de liens à des rubans de fil larges d’un pouce ou environ, dont on se sert pour contenir les fanons dans l’appareil d’une fracture. Nous en avons parlé au mot Fanon, terme de Chirurgie. (Y)

Lien d’assemblage, outil de Charron. Voyez Bride.

Lien, terme de Chapelier, se dit du bas de la forme du chapeau, ou de l’endroit du chapeau jusqu’où ils font descendre la ficelle.

Liens, (Charpente.) est une piece de bois qui se met en angle sous une autre piece pour la soutenir & l’allier avec une autre, comme les jambes de force avec les entraits, &c. Voyez nos Pl. de Charpente & leur explic. tom. II. part. I.

Lien, (Serrurerie.) c’est une piece qui, dans les grilles, rampes, & autres ouvrages de cette nature, lie les rouleaux ensemble dans les parties où ils se touchent, & fait solidité & ornement aux panneaux. Le lien à cordon est celui au milieu du champ duquel on a pratiqué l’ornement appellé cordon.

Le lien est fait d’une lame de fer battue, épaisse d’une ligne ou deux, suivant l’ouvrage, large de sept à huit ; on tourne cette lame sur un mandrin ; on laisse aux deux bouts de quoi former des tenons qui recevront la quatrieme partie du lien, qui sera percée à ses extrémités de trous où les tenons entreront & seront rivés.

Les liens à cordons s’estampent ; ils sont de quatre pieces : on déformeroit le cordon en les pliant, s’ils n’étoient que de deux.

Liens, (Vitrier.) sont de petites bandes de plomb d’une ou deux lignes de large sur une d’épaisseur, qui sont soudées sur le plomb des panneaux, & qui servent à attacher les verges de fer pour entretenir lesdits panneaux.

Moule à liens est un moule à deux branches comme un gauffrier, qui sert à faire plusieurs liens à-la-fois.

LIENNE, s. f. terme de Tisserand ; ce sont les fils de la chaîne dans lesquels la treme n’a point passé, parce qu’ils n’ont pas été levés ou baissés par les marches.

LIENTERIE, s. f. (Medecine.) λειεντερία. Ce nom est composé de deux mots grecs, λεῖον, qui signifie glissant, poli ; & ἔντερον, intestin. On s’en sert pour désigner un flux de ventre alimenteux, dans lequel on rend par les selles les alimens indigérés tels qu’on les a pris. L’étymologie de ce nom vient de l’idée fausse qu’avoient les anciens, regardant cette maladie comme une suite nécessaire du poli contre nature des intestins ; ils l’appelloient lienterie, comme s’ils eussent dit λειότης τῶν ἐντέρων, polissure des intestins. Le symptôme principal, univoque, nécessaire, seul diagnostic, est cette excrétion fréquente des alimens inaltérés ; à ce symptôme se joignent quelquefois des nausées, vomissemens, pesanteur d’estomac, ptialisme, &c. d’autres fois des douleurs, tranchées ; les selles sont sanguinolentes. Assez souvent la lienterie est précédée, mais rarement accompagnée de κυνορεξία, faim canine, à la suite de laquelle vient l’anorexie ou défaut d’appétit, & enfin la lienterie se déclare ; la maigreur, la foiblesse, l’exténuation ne