Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/508

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

intervint à ce sujet plusieurs jugemens & déclarations pour la compatibilité de ces offices, ou des fonctions civiles & criminelles.

Henri II. trouvant qu’il y avoit en cela de grands inconvéniens, par un édit du mois de Mai 1552, ordonna que l’édit de 1522 seroit exécuté selon sa forme & teneur, en conséquence que dans chaque bailliage, sénéchaussée, prevôté & jurisdiction présidiale, il y aura un juge & magistrat criminel, lequel avec le lieutenant particulier, & les conseillers établis en chaque présidial, qu’il appellera selon la gravité & poids des matieres, connoîtra privativement à tous autres juges, de toutes affaires criminelles, sans qu’il puisse tenir aucun office de lieutenant général, civil ni particulier, ni assister au jugement d’aucun procès civil ; cependant depuis on a encore uni dans quelques sieges les fonctions de lieutenant criminel à celles de lieutenant général.

L’édit de 1552 déclare que le roi n’entend pas priver les prevôts étant ès villes où sont établis les sieges présidiaux, de l’exercice & autorité de la justice civile & criminelle qui leur appartient au-dedans des limites de leur prevôté.

Henri II. fit le même établissement pour la Bretagne, par un autre édit daté du même tems.

La déclaration du mois de Mai 1553, portant réglement sur les différends d’entre les lieutenans criminels & les autres officiers des présidiaux, leur attribue privativement à tous autres, la connoissance des lettres de rémission & pardon, des appellations en matiere criminelle interjettées des juges subalternes, des procès criminels où les parties sont reçues en procès ordinaire, ce qui a été confirmé par plusieurs autres déclarations.

Lorsque les prevôts des maréchaux provinciaux furent supprimés par l’édit de Novembre 1544, on attribua aux lieutenans criminels établis dans les présidiaux, & aux lieutenans particuliers des autres sieges, la connoissance des délits dont connoissoient auparavant ces prevôts des maréchaux.

Le même édit ordonne que les lieutenans criminels feront tous les ans des chevauchées avec leurs lieutenans de robe-courte, archers & sergens extraordinaires, pour la recherche des malfaiteurs.

Sur les fonctions des lieutenans criminels, Voyez Joly, tom. I. liv. iij. tit. 10. le traité de la police, par Delamare ; le recueil des ordonnances de la troisieme race, Neron, Fontanon. Voyez aussi l’article Lieutenant criminel de Robe-courte. (A)

Lieutenant Criminel de Robe courte du châtelet de Paris, est un des quatre lieutenans du prevôt de cette ville. Il est reçu au parlement comme le prevôt & les autres lieutenans ; & c’est le doyen des conseillers de la grande chambre qui va l’installer au châtelet, où il siege l’épée au côté, & avec une robe plus courte que la robe ordinaire des magistrats.

Il seroit assez difficile de fixer le tems de sa création, son établissement étant fort ancien. Cette charge n’a été d’abord exercée que par commission ; ce fut Henri II., qui par un édit de 1554, la créa en titre d’office ; il n’y eut originairement que vingt archers pour l’exercice de cette charge ; mais par la suite des tems le nombre des officiers & archers en a été considérablement augmenté. Il paroît par un édit de François I. de 1526, & différens autres de Henri II. & sur-tout celui de 1554, que le nombre des habitans de Paris qui étoit considérable dès ce tems-là, est ce qui a donné lieu à la création de cette charge. Par ces différens édits, il est enjoint au lieutenant criminel de robe courte de faire des chevauchées dans les rues, & de visiter les tavernes, & mauvais lieux de la ville & faubourgs de Paris ;

& enfin d’arrêter tous gens malvivans pour en être fait justice.

La compagnie du lieutenant criminel de robe courte est spécialement attachée au parlement pour lui prêter main forte dans l’exécution de ses arrêts, en matiere criminelle ; c’est par cette raison que la garde de Damiens lui fut remise le jour de son exécution.

Le lieutenant criminel de robe courte du châtelet de Paris, n’est point de la même classe que les lieutenans criminels de robe courte qui furent créés par la suite. Il existoit long-tems avant eux, & ces derniers ne furent créés que pour remplacer les prevôts criminels provinciaux, qui furent supprimés, & auxquels on n’accordoit d’autre attribution que celle des prevôts supprimés. L’on ne voit rien de semblable dans les différens édits de création du lieutenant criminel de robe courte du châtelet de Paris. Ses fonctions sont illimitées ; il paroît être chargé de la poursuite de toutes sortes de crimes & délits ; il instruit ses procès sans assesseur, & les juge à la chambre criminelle du châtelet. Il n’y a point de procureur du roi particulier pour lui ; c’est celui du châtelet qui en fait les fonctions, comme procureur du roi de cette jurisdiction : aussi les lieutenans criminels de robe courte ayant été supprimés, & les prevôts retablis, il fut dit par l’édit de Henri II. de 1555, que la suppression des lieutenans criminels de robe courte ne regardoit point celui du châtelet de Paris ; & il fut par le même édit maintenu & conservé dans ses fonctions ; il y fut même augmenté : car cet édit le charge de tenir la main à la punition des contrevenans aux arrêts, réglemens & ordonnances faits pour la police de Paris, & sur les abus, malversations & monopoles qui pourroient avoir été commis, tant par les débardeurs & déchargeurs de foin, de bois, & autres denrées qui se descendent & amenent par eau & par terre en cette ville, que sur les particuliers qui les conduiront ; & ce par concurrence avec les juges à qui la connoissance en appartient.

Lors de la rédaction de l’ordonnance criminelle de 1670, le lieutenant criminel de robe courte étoit dans la jouissance de connoître à la charge de l’appel de toutes sortes de crimes & délits qui se commettoient dans l’étendue de la ville, prévôté & vicomté de Paris ; il y a même des arrêts rendus sur l’appel de ses jugemens dans toute espece de cas ; & comme cette ordonnance déterminoit la matiere des fonctions des prevôts des maréchaux & lieutenans criminels de robe courte, en les resserrant dans de certaines bornes. Il sembloit que le lieutenant criminel de robe courte du châtelet de Paris par sa seule dénomination devoit être enveloppé dans cette modification ; néanmoins il en fut excepté, & par l’article 28 du titre deuxieme de ladite ordonnance, il est dit : « entendons rien innover aux droits & fonctions de notre lieutenant criminel de robe courte du châtelet de Paris ».

L’édit de 1691 portant réglement entre le lieutenant criminel du châtelet, & celui de robe courte, fixe les cas dont celui-ci peut connoître à charge de l’appel, ensorte qu’il semble être devenu différent de ce qu’il étoit auparavant ; cependant depuis cet édit, l’on a vu le lieutenant criminel de robe courte connoître & juger, à la charge de l’appel, dans des cas de toutes autres especes que ceux déterminés par cet édit ; & les arrêts qui sont intervenus en conséquence ont confirmé sa procédure, suivant cet édit.

Le lieutenant criminel de robe courte doit commettre tous les mois un exempt & dix archers pour exécuter les decrets décernés par le lieutenant criminel, & même un plus grand nombre s’il étoit nécessaire.

En cas d’absence du lieutenant criminel de robe courte, ou légitime empêchement, c’est un des lieu-