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monies de leurs sacrifices toutes leurs liturgies  ; à l’exacte observation desquelles ils étoient, comme on le sait, très-scrupuleusement attachés.

Jean-Gaspard Suicer, savant grec, fait une remarque qui mérite qu’on y fasse attention dans son trésor de la langue grecque au mot λειτουργὶς, qui munus aliquod publicum obiit, minister publicus, sed peculialiter usurpatur de bello  ; en effet, ce mot dans Isocrates signifie un héraut d’armes, & sans doute que λειτουργία étoit ou sa commission, ou la harangue qu’il prononçoit dans les déclarations de guerre  ; dans cette supposition toute naturelle, il faut convenir que les liturgies ont assez bien soutenu leur primitive destination, puisqu’elles ont causé je ne sais combien de guerres sanglantes, d’autant plus cruelles que leur source étoit sacrée. Que de sang n’ont pas fait répandre les doutes sur ces questions importantes dont les premieres notions parurent dans les liturgies ! La consubstantiabilité du verbe, les deux volontés de Jesus-Christ, la célebre question, si le saint Esprit procede du Pere ou du Fils ?

Mais, pour parler d’évenemens plus rapprochés de notre siecle, ne fut-ce pas une question de liturgie qui abattit, en 1619, la tête du respectable vieillard Barneweldt ? Et trente ans après, l’infortuné roi d’Angleterre Charles I. ne dut-il point la perte ignominieuse & de sa couronne & de sa vie, à l’imprudence qu’il avoit eue quelques années auparavant, d’envoyer en Ecosse la liturgie anglicane, & d’avoir voulu obliger les presbytériens écossois à recevoir un formulaire de prieres différent de celui qu’ils suivoient.

Conclusion. Les liturgies nécessaires sont les plus courtes, & les plus simples sont les meilleures  ; mais sur un article aussi délicat, la prudence veut qu’on sache respecter souvent l’usage de la multitude quelque informe qu’il soit, d’autant plus que celui à qui on s’adresse entend le langage du cœur, & qu’on peut, in pettò, réformer ce qui paroît mériter de l’être.

LITUUS, s. m. (Littér.) bâton augural recourbé par le bout comme une crosse, & plus gros dans cette courbure qu’ailleurs.

Romulus, dont la politique demandoit de savoir se rendre les dieux favorables, créa trois augures, institua le lituus pour marque de leur dignité, & le porta lui-même, comme chef du collège, & comme très-versé dans l’art des présages : depuis lors, les augures tinrent toujours en main le lituus, lorsqu’ils prenoient les auspices sur le vol des oiseaux ; c’est par cette raison qu’ils ne sont jamais représentés sans le bâton augural, & qu’on le trouve communément sur les médailles, joint aux autres ornemens pontificaux.

Comme les augures étoient en grande considération dans les premiers tems de la république, le bâton augural étoit gardé dans le capitole avec beaucoup de soin ; on ne le perdit qu’à la prise de Rome, par les Gaulois, mais on le retrouva, dit Ciceron, dans une chapelle des Saliens sur le mont-Palatin.

Les Romains donnerent aussi le nom de lituus à un instrument de guerre courbé à la maniere du bâton augural, dont on sonnoit à peu près comme on sonne aujourd’hui de la trompette ; il donnoit un son aigu, & servoit pour la cavalerie. (D. J.)

LIVADIA, (Geog.) ville de la Turquie Européenne, en Livadie. Les anciens l’ont connue sous le nom de Lebadia, Lebadea, & il y subsiste encore des inscriptions dans lesquelles on lit πόλις λεϐαδεῶν. Elle est partagée par une riviere que Wheeler nomme Hercyna, qui sort par quelques passages de l’Hélicon, & qui se rend dans le lac de Livadie. Cette ville est habitée par des Turcs, qui y ont des mosquées, & des Grecs qui y ont des églises. Son trafic

consiste en laine, en blé & en ris. Elle est située à 23 lieues N. O. d’Athènes, & 25 S. E. de Lépante. Long. 41. 4. lat. 38. 40. (D. J.)

LIVADIE la, (Géog.) ce mot pris dans un sens étendu, signifie tout le pays que les anciens entendoient par la Grece propre, ou Hellas ; mais la Livadie proprement dite, n’est que la partie méridionale de la Livadie prise dans le sens le plus étendu, & comprend ce que les anciens appelloient la Phocide, la Doride & la Locride. Elle a au levant le duché d’Athènes & la Stramulipa, & est entre ces deux pays, la Macédoine, la basse Albanie, & le golphe de Lépante ; la ville de Livadia donne son nom à cette contrée. (D. J.)

Livadie, lac de, (Géog.) lac de Grece, connu des anciens sous le nom de Copays, ou plutôt sous autant de noms qu’il y avoit de villes voisines ; car on l’appelloit aussi Haliartios, de la ville d’Haliarte, qui étoit sur le rivage occidental ; Pausanias le nomme Cephissis, parce que le fleuve Cephisse le traversoit. Alien l’appelle le marais d’Onchestos, à cause d’une ville de ce nom, qui étoit au midi du lac. Son nom moderne est chez les Grecs d’aujourd’hui Limnitis Livadias, λίμνη της λιϐαδιας le marais de Livadie, & plus particulierement Lago di Topoglia.

Il reçoit plusieurs petites rivieres qui arrosent cette belle plaine, laquelle a environ une quinzaine de lieues de tour, & abonde en blé & en pâturages. Aussi étoit-ce autrefois un des quartiers les plus peuplés de la Béotie.

Mais l’eau de cet étang s’enfle quelquefois si fort, par les pluies & les neiges fondues, qu’elle inonde la vallée jusqu’à plusieurs lieues d’étendue. Elle s’engoufre ordinairement sous la montagne voisine de l’Euripe, entre Négrepont & Talanda, & va se jetter dans la mer de l’autre côté de la montagne. Les Grecs modernes appellent ce lieu Tabathra ; voy. Spon & Wheeler. (D. J.)

LIVARDE, s. f. terme de Corderie, est une corde d’étoupe autour de laquelle on tortille le fil pour lui faire perdre le tortillement, & le rendre plus uni. Voyez l’art. Corderie.

LIVECHE, s. f. (Hist. nat. Bot.) Ligustrum, genre de plante à fleur, en rose & en umbelle, composée de plusieurs pétales disposés en rond, & soutenus par le calice qui devient un fruit composé de deux semences oblongues, plates d’un côté, convexes & cannelées de l’autre. Tournefort. Inst. rei herb. Voyez Plante.

Tournefort compte huit especes de ce genre de plante umbellifere ; la plus commune cultivée dans les jardins de médecine, est le ligusticum vulgare, foliis agii ; en anglois, common lovage ; en françois, liveche à feuilles d’ache ; nous allons la décrire.

Sa racine est charnue, épaisse, durable, noirâtre en-dehors, blanche en-dedans. Ses tiges sont ordinairement nombreuses, épaisses, creuses, cannelées, partagées quelquefois en plusieurs rameaux. Ses feuilles sont longues d’un pié & plus, découpées en plusieurs lobes, dont les dernieres divisions approchent en quelque maniere de celles de l’ache de marais, mais sont bien plus grandes, dentelées profondément à leur bord, fort lisses, luisantes, d’un verd foncé, & d’une odeur forte. Les rameaux & les sommets des tiges portent de grands parasols de fleurs en rose, composées de cinq pétales, jaunes le plus souvent, placés en rond & soutenus sur un calice. Ce calice se change ensuite en un fruit, composé de deux graines, oblongues, plus grosses que celles d’ache, convexes, canelées d’un côté, applaties de l’autre, & de couleur obscure. Toute cette plante, sur-tout sa graine, répand une odeur forte, aromatique & de drogue. (D. J.)

Liveche, (Mat. méd.) ou Ache de monta-