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moigner qu’on pense avantageusement. La louange devroit toujours être l’expression de l’estime. Louer délicatement, c’est faire croire à la louange. Toute louange qui ne porte pas avec elle le caractere de la sincérité, tient de la flaterie ou du persifflage, & par conséquent indique de la malice dans celui qui la donne, & quelque sotise dans celui qui la reçoit. L’homme de sens la rejette & en ressent de l’indignation. Rien ne se prodigue plus entre les hommes que la louange ; rien ne se donne avec moins de grace. L’intérêt & la complaisance inondent de protestations, d’exagérations, de faussetés ; mais l’envie & la vanité viennent presque toujours à la traverse, & répandent sur la louange un air contraint qui la rend insipide. Ce seroit peut être un paradoxe que de dire qu’il n’y a point de louange qui ne peche ou par le défaut de mérite en celui à qui elle est adressée, ou par défaut de connoissance en celui qui la donne ; mais je sais bien que l’écorce d’une belle action, séparée du motif qui l’a inspirée, n’en fait pas le mérite, & que la valeur réelle qui dépend de la raison secrette de celui qui agissoit, & qu’on loue d’avoir agi, nous est souvent inconnue, & plus souvent encore déguisée.

Le louangeur éternel m’ennuie ; le railleur impitoyable m’est odieux. Voyez l’article Louange.

Louer, (Comm.) prendre ou donner à louage des terres, des vignes, des maisons & autres immeubles. Il se dit aussi des meubles, des voitures, des bestiaux, & encore des personnes & de leur travail.

Dans tous ces sens on dit dans le commerce louer une boutique, un magasin, une échope dans les rues, une place aux halles, une loge à la foire.

Louer des meubles, des habits chez les Tapissiers & Fripiers ; louer un carosse, une litiere, un cheval, une place dans une voiture publique ; ce qui appartient aux voituriers, messagers, carossiers, loueurs de chevaux, maquignons, &c.

Enfin louer des compagnons, des garçons, des gens de journée, manouvriers, &c. ce que font les maîtres des communautés des arts & métiers, & les particuliers qui ont quelques travaux à faire faire. Dictionn. de commerce.

LOUER un cable, ou ROUER un cable, (Marine.) c’est mettre un cable en rond en façon de cerceaux, afin de le tenir prêt à filer lorsqu’il faut mouiller. Les cables doivent toujours être loués dans le vaisseau, parce qu’ils tiennent alors moins de place : lorsqu’on met les cables en bas, il faut les tenir séchement ; pour cet effet on met dessous quelques pieces de bois, afin que s’il entre de l’eau dans le lieu où ils sont loués, elle ne les touche pas. C’est le contremaître qui en est chargé.

Autrefois on disoit louer une manœuvre, mais présentement on dit rouer des manœuvres. Voy. Rouer.

LOUEUR, s. m. (Comm.) celui qui donne quelque chose à louage ; on le dit particulierement des loueurs de chevaux, des loueurs de carrosses.

LOUGH LENE, (Hist. nat.) le mot lough en irlandois signifie lac ; ainsi lough-Lene veut dire lac de Lene. C’est un lac singulier d’Irlande dans le comté de Kerry, à la partie méridionale de cette île, qui contient environ trois mille arpens quarrés ; on le divise en supérieur & en inférieur. Il est commandé par des montagnes ; au haut de l’une, qui s’appelle Mangerton, est un lac dont on ne connoît pas le fond, & qu’en langue du pays on nomme pour cette raison poulle iferon, c’est-à-dire trou d’enfer. Ce lac est sujet à se déborder ; alors il en sort des torrens très considérables qui retombent dans le lac inférieur, & qui forment des cascades ou des chûtes d’eau, dont l’aspect est très-singulier. On dit qu’il se trouve des pierres précieuses dans ce lac, & dans son voisinage on rencontre des mines de cuivre & d’argent.

LOUGH-NEAGH, (Hist. nat.) ce mot signifie lat de Neagh. C’est le nom d’un lac fameux d’Irlande, situé au nord de cette île, entre les comtés d’Antrim, de Tyrone & d’Ardmach. Il a environ trente milles, c’est-à-dire dix lieues de longueur ; & quinze milles, c’est-à-dire cinq lieues de largeur. Il est remarquable par la propriété que quelques auteurs lui ont attribuée de pétrifier & de changer même en fer les corps que l’on y jette. On a, dit-on, observé qu’en enfonçant des pieux de bois dans ce lac, ils étoient au bout d’un certain tems pétrifiés dans la partie qui avoit été enfoncée dans l’eau, tandis que la partie qui étoit restée hors de l’eau, restoit combustible, & dans l’état d’un vrai bois. M. Barron a examiné ce phénomene avec une attention particuliere, & il a trouvé que ce n’est point une incrustation ou un dépôt qui se fait à l’extérieur du bois, comme M. de Buffon l’a cru, mais toute la substance est pénétrée du suc lapidifique & changée en pierre. Les bois pétrifiés que l’on tire de ce lac, sont de deux especes ; il y en a qui se changent en une pierre blanche, légere, poreuse & propre à aiguiser les outils. On trouve d’autres bois changés en une pierre noire, dure, pesante, dans laquelle il y a souvent soit à sa surface, soit à son intérieur, des parties ligneuses qui n’ont point été changées en pierre. Ces deux especes de bois pétrifiés conservent le tissu ligneux, & font feu lorsqu’on les frappe avec de l’acier ; elles soutiennent le feu le plus violent sans se calciner ni se changer en verre ; la seconde espece, après avoir été calcinée, devient blanche, légere & poreuse comme la premiere. On croit que c’est du bois de houx qui a été ainsi pétrifié ; mais il paroît que c’est plûtôt un bois résineux, car on dit qu’il répand une odeur agréable lorsqu’on le calcine. Quelques gens ont cru que cette pétrification se faisoit en sept ans de tems, mais ce fait ne paroît point constaté.

La pétrification ne se fait pas seulement dans le lac de lough Neagh, mais encore elle se fait dans la terre qui en approche jusqu’à huit milles de distance, & l’on y trouve des amas de bois enfouis en terre, & parfaitement pétrifiés. Voyez Barton, philosophical lectures.

Boyle dit dans son traité sur l’origine des pierres précieuses, que dans le fond du lac de Neagh, il y a des rochers où sont attachées des crystallisations de différentes couleurs.

LOUGNON, (Géogr.) riviere qui prend sa source dans les montagnes de Vauge, aux confins de la Bourgogne, traverse une partie de ce comté, & se jette dans la Sône à trois lieues au-dessous de Grey.

LOUNIGUIN, s. m. terme de relation, nom donné par les Sauvages d’Amérique, au trajet de terre qui fait la distance du passage d’une riviere à une autre, pendant lequel trajet on est obligé de porter son canot sur la tête ou sur les épaules. Il se trouve aussi des endroits dans les rivieres, où la navigation est empêchée par des sauts, par des chûtes d’eau entre des rochers, qui retrécissent le passage, & rendent le courant si rapide, que l’on est forcé de porter le canot jusqu’à l’endroit où le cours de la riviere permet qu’on en fasse usage ; quelquefois le portage du canot est de quelques lieues, & se répete assez souvent ; mais ce portage ne fatigue ni n’arrête les Sauvages, à cause de la légéreté de leurs canots. Nous indiquerons ailleurs leur fabrique & leur forme.

LOUIS d’argent, (Monnoie.) piece de monnoie de France qu’on commença de fabriquer sous Louis XIII. en 1641, peu de tems après les louis d’or.

L’ordonnance porte que les louis d’argent seront fabriqués les uns de soixante sols, les autres de trente sols, de quinze sols & de cinq sols, tous au titre de onze deniers de fin, au remede de deux grains. Les louis d’argent de soixante sols, pesant