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embarquer, débarquer & appareiller, & il empeche que les matelots ne s’en écartent lorsqu’ils vont à terre.

Maître mateur, (Marine.) Il assiste à la visite & recette des mâts, a soin de leur conservation, qu’ils soient toûjours assujettis sous l’eau dans les fosses, & qu’ils ne demeurent pas exposés à la pluie & au soleil. Il fait servir les arbres du Nord aux beauprés & mâts de hune, & autres mâtures d’une seule piece. Il fait faire les hunes, barres & chouquets, des grandeurs & proportions qu’ils doivent être, &c.

Maître valet, (Marine.) c’est un homme de l’équipage qui a soin de distribuer les provisions de bouche, & qui met les vivres entre les mains du cuisinier selon l’ordre qu’il en reçoit du capitaine. Son poste est à l’écoutille, entre le grand mât & l’artimon. Il a un aide ou assistant qu’on appelle maître valet d’eau, qui fait une partie de ses fonctions lorsqu’il ne peut tout faire, & qui est chargé de la distribution de l’eau douce.

Maître en fait d’armes, (Escrime.) celui qui enseigne l’art de l’Escrime, & qui, pour cet effet, tient salle ouverte où s’assemblent ses écoliers.

Les maîtres en fait d’armes composent une des cinq ou six communautés de Paris qui n’ont aucun rapport au commerce : elle a ses statuts comme les autres.

Maîtres écrivains, (Art. méch.) la communauté des maîtres experts jurés écrivains, expéditionnaires & arithméticiens, teneurs de livres de comptes, établis pour la vérification des écritures, signatures, comptes & calculs contestés en justice, doit son établissement à Charles IX. roi de France en 1570. Avant cette érection, la profession d’enseigner l’art d’écrire étoit libre, comme elle est encore en Italie & en Angleterre. Il y avoit pourtant quelques maîtres autorisés par l’université, mais ils n’empêchoient point la liberté des autres. Ce droit de l’université subsiste encore ; il vient de ce qu’elle avoit anciennement enseigné cet art, qui faisoit alors une partie de la Grammaire. Pour instruire clairement sur l’origine d’un corps dont les talens sont nécessaires au public, il faut remonter un peu haut & parler des faussaires.

Dans tous les tems, il s’est trouvé des hommes qui se sont attachés à contrefaire les écritures & à fabriquer de faux titres. Suivant l’histoire des contestations sur la diplomatique, pag. 99, il y en avoit dans tous les états, parmi les moines & les clercs, parmi les séculiers, les notaires, les écrivains & les maîtres d’écoles. Les femmes mêmes se sont mêlées de cet exercice honteux. Les siecles qui paroissent en avoir le plus produit, sont les sixieme, neuvieme & onzieme. Dans le seizieme, il s’en trouva un assez hardi pour contrefaire la signature du roi Charles IX. Les dangers auxquels un talent si funeste exposoit l’état, firent réfléchir plus sérieusement qu’on n’avoit fait jusqu’alors sur les moyens d’en arrêter les progrès. On remit en vigueur les ordonnances qui portoient des peines contre les faussaires, & pour qu’on pût les reconnoître, on forma d’habiles vérificateurs : Adam Charles, secrétaire ordinaire du roi Charles IX. & qui lui avoit enseigné l’art d’écrire, fut chargé par ce prince de faire le choix des sujets les plus propres à ce genre de connoissances. Il répondit aux vûes de son prince en homme habile & profond dans son art, & choisit parmi les maîtres qui le professoient ceux qui avoient le plus d’expérience. Ils se trouverent au nombre de huit, qui sur la requête qu’ils présenterent au roi, obtinrent des lettres patentes d’érection au mois de Novembre 1570, lesquelles furent enregistrées au parlement le 31 Janvier 1576.

Ces lettres patentes sont écrites sur parchemin en lettres gothiques modernes, très-bien travaillées ; la premiere ligne qui est en or a conservé toute sa fraîcheur ; elles peuvent passer en fait d’écriture, pour une curiosité du seizieme siecle. Ces lettres établissent les maîtres écrivains privativement à tous autres, pour faire la vérification des écritures & signatures contestées dans tous les tribunaux, & enseigner l’écriture & l’arithmétique à Paris & par tout le royaume.

Telle est l’origine de l’établissement des maîtres écrivains, dont l’idée est dûe à un monarque françois ; il convient à présent de s’étendre plus particulierement sur cette compagnie.

Cet établissement fut à peine formé, qu’Adam Charles qui en étoit le protecteur, qui visoit au grand, & qui par son mérite s’étoit élevé à une place éminente à la cour, sentit que pour donner un relief à cet état naissant, il lui falloit un titre qui le distinguât aux yeux du public, & qui lui attirât son estime & sa confiance. Il supplia le roi d’accorder à chacun des maîtres de la nouvelle compagnie, dont il étoit le premier, la qualité de secrétaire ordinaire de sa chambre, dont sa majesté l’avoit décoré. Comme cette qualité engageoit à des fonctions, Charles IX. ne la donna qu’à deux des maitres écrivains qui étoient obligés de se trouver à la suite du roi, l’un après l’autre par quartier.

Les maitres écrivains vérificateurs, ou du moins les deux qui étoient secrétaires de la chambre de sa majesté, ont été attachés à la cour jusqu’en 1633 ; voici le motif qui fit cesser leurs fonctions à cet égard. Rien de plus évident que l’établissement des maitres écrivains avoit procuré aux écritures une correction sensible ; il avoit même déja paru sur l’art d’écrire quelques ouvrages gravés avec des préceptes. Cependant malgré ces secours, il régnoit encore en général un mauvais gout, un reste de gothique qu’il étoit dangereux de laisser subsister. Il consistoit en traits superflus, en plusieurs lettres quoique différentes qui se rapprochoient beaucoup pour la figure ; enfin en abréviations multipliées dont la forme toujours arbitraire, exigeoit une étude particuliere de la part de ceux qui en cherchoient la signification. On peut sentir que le concours de tous ces vices, rendoit les écritures cursives aussi difficiles à lire que fatiguantes aux yeux. Pour bannir absolument ces défauts, le parlement de Paris qui n’apportoit pas moins d’attention que le roi aux progrès de cet art, ordonna aux maitres écrivains de s’assembler & de travailler à la correction des écritures, & d’en fixer les principes. Après plusieurs conférences tenues à ce sujet par la société des maitres écrivains, Louis Barbedor qui étoit alors secrétaire de la chambre du roi & syndic, exécuta un exemplaire de lettres françoises ou rondes, & le Bé un autre sur les lettres italiennes ou bâtardes ; ces deux artistes avoient un mérite supérieur. Le premier, homme renommé dans son art, étoit savant dans la construction des caracteres pour les langues orientales. Le second, qui ne lui cédoit en rien dans l’écriture, avoit eu l’honneur d’enseigner à écrire au roi Louis XIV. Ces deux écrivains présenterent au parlement les pieces qu’ils avoient exécutées : cette cour après en avoir fait l’examen, décida par un arrêt du 26 Février 1633 ; qu’à l’avenir on ne suivroit point d’autres alphabets, caracteres, lettres & forme d’écrire, que ceux qui étoient figurés & expliqués dans les deux exemplaires. Que ces exemplaires seroient gravés, burinés & imprimés au nom de la communauté des maitres écrivains vérificateurs. Enfin, que ces exemplaires resteroient à perpétuité au greffe de la cour, & que les pieces qui se tireroient des gravures seroient distribuées par tout le royaume, pour servir sans doute