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Page:Dieu, par Victor Hugo, 1891.djvu/196

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Pourquoi bats-tu ton âne à grands coups de bâton ?
Quel est son lendemain ? Ton âne est-il Caton ?
Pourquoi le héron gris, qui s’enfuit dans les brumes,
Sent-il le noir faucon fouiller du bec ses plumes ?
Pourquoi, troussant ta manche et tachant tes habits,
Plonges-tu les couteaux aux gorges des brebis ?
Pourquoi bois-tu le sang ayant tondu la laine ?
Pourquoi vas-tu traînant tes buffles dans la plaine
Par cet anneau de fer qui perce leurs naseaux ?
Qu’est-ce que l’hydre doit penser au fond des eaux ?
Vois ce saumon d’argent : vers ses pauvres ouïes
Les flammes du brasier montent épanouies ;

Il était fait pour fuir sous l’eau des bleus ruisseaux.
Vois. Juge. Quoi ! la carpe est coupée en morceaux,
Elle est jetée à l’huile ardente, toute vive !
Quoi !.l’huître vit et souffre aux dents de ton convive !
Et c’est, tout !.Te voilà satisfait dans ta chair
Quand, devant un grand tas de fagots, vif et clair,
Ta broche plie, offrant les lièvres et les cailles.
À la bûche qui rit, monstre aux rouges écailles,
Et livrant l’humble essaim qui jouait, qui volait,
Le hallier, et la sauge avec le serpolet,
L’alouette et les prés, l’étang et la macreuse,
Aux mâchoires de feu de l’âtre qui se creuse !
Les charbons dans la cendre ouvrent leurs sombres yeux.