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BION.

Un homme qui parlait beaucoup l’importunait pour qu’il lui rendit un service : Si tu veux, lui dit-il, que je te serve en quelque chose, envoie-m’en prier par un autre. Étant sur mer avec des gens impies, le vaisseau tomba entre les mains des corsaires : C’est fait de nous, s’écrièrent-ils, si nous sommes reconnus, et moi, dit Bion, je suis perdu si on ne me reconnaît pas. Il regardait la présomption comme mettant obstacle aux progrès dans les sciences. il disait d’un riche avare, qu’au lieu de posséder ses richesses, il en était possédé; et que les avares qui gardent avec soin leurs trésors n’en jouissent pas plus que s’ils n’étaient pas à eux. Il avait encore coutume de dire que, quand nous sommes jeunes, nous nous appuyons sur nos forces, et que, lorsque nous commençons à vieillir, nous nous réglons par la prudence; que cette vertu est aussi différentes des autres que la vue l’est des autre sens; qu’il ne faut reprocher la vieillesse à personne comme un défaut, puisque tout le monde souhaite d’y parvenir. Un envieux lui paraissant avoir l’air triste et rêveur, il lui demanda s’il s’affligeait d’un malheur qui lui était arrivé, ou du bonheur d’autrui. Il appelait l’impiété une mauvaise compagne de la sécurité, qui trahit l’homme le plus fier. Il conseillait de conserver ses amis, de peur qu’on ne fît accusé d’avoir cultivé les mauvais et négligé les bons.

D’abord il méprisa les institutions de l’école académicienne, étant alors disciple de Cratès, et choisit la secte des cyniques, en prenant le manteau et la besace : car qu’Est-ce qui lui aurait sans cela inspiré l’apathie? Ensuite il se mit dans la secte théodorienne, sous la discipline de Théodore, qui ornait ses sophismes de beaucoup d’éloquence. Enfin il s’adressa à Théophraste, philosophe péripatéticien, dont il prit les préceptes. Il était théâtral, aimait à faire rire, et employait souvent les quolibets; mais comme il variait beaucoup sa manière d’enseigner, de là vient qu’Ératosthène a dit que Bion avait le pre-