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DIOGÈNE.

invité les amis de Denys, Diogène entra chez lui, et dit, en foulant ses tapis : Je foule aux pieds la vanité de Platon ; à quoi celui-ci répondit : Quel orgueil ne fais-tu point voir, Diogène, en voulant montrer que tu n’en as point! D’autres veulent qui Diogène dit : Je foule l’orgueil de Platon, et que celui-ci répondit : Oui, mais avec un autre orgueil. Sotion, dans son quatrième livre, rapporte cela avec une injure, en disant que le Chien tint ce discours à Platon. Diogène ayant un jour prié ce philosophe de lui envoyer du vin, et en même temps des figue, Platon lui fit porter une cruche pleine de vin ; sur quoi Diogène lui dit : « Si l’on vous demandait combien font deux et deux, vous répondriez qu’il font vingt. Vous ne donnez point suivant ce qu’on vous demande, et vous ne répondez point suivant les questions qu’on vous fait, » voulant par là le taxer d’être grand parleur. Comme on lui demandait dans quel endroit de la Grèce il avait vu les hommes les plus courageux : Des hommes? dit-il, je n’en ai vu nulle part ; mais j’ai vu des enfants à Lacédémone[1]. Il traitait une matière sérieuse, et personne ne s’approchait pour l’écouter. Voyant cela, il se mit à chanter ; ce qui ayant attiré beaucoup de gens autour de lui il leur reprocha, qu’ils recherchaient avec soin ceux qui les amusaient de bagatelles, et qu’ils n’avaient aucun empressement pour les choses sérieuses. Il disait aussi qu’on se disputait bien à qui saurait le mieux faire des fosses et ruer[2] ; mais non pas à qui se rendrait le meilleur et le plus sage. Il admirait les grammairiens, qui recherchaient avec soin quels avaient été les malheurs d’Ulysse, et ne connaissaient pas leurs propres maux ; les musiciens, qui accordaient soigneusement les cordes de leurs instruments, et ne pensaient

  1. Cela regarde le courage des enfants, qui se faisaient battre à l’envi devant l’autel de Diane. Ménage
  2. Cela porte sur les jeux de combats, où l’on se donnait des coups de pied, et où l’on faisait des fosses pour les vaincus. Idem