Page:Diogène Laërce - Vies, édition Lefèvre,1840.djvu/450

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constances des choses, ni fonder ses règles sur la nature, se faisaient eux-mêmes des règles sur tout, sans prendre garde que ce qui paraît est tel par les circonstances qui l’environnent et par la matière dont il est disposé; de sorte, concluaient-ils, qu’il faut dire, ou que tout est vrai ou que tout est faux : car si l’on avance qu’il y a seulement certaines choses vraies, comment les discernera-t-on? Les sens ne peuvent être caractère de vérité pour ce qui regarde les choses sensibles, puisqu’ils les envisagent toutes d’une manière égale. Il en est de même de l’entendement par la même raison; et outre les sens et l’entendement, il n’y a aucune voie par laquelle on puisse discerner la vérité. Celui donc, continuent-ils, qui établit quelque chose, ou sensible, ou intelligible, doit premièrement fixer les opinion qu’on en a; car les uns en ôtent une partie, les autres une autre. Il est donc nécessaire de juger, ou par les sens, ou par l’entendement. Mais tous les deux sont un sujet de dispute; ainsi on ne peut discerner la vérité entre les opinions, tant à l’égard des choses sensibles que par rapport aux choses intelligibles. Or si, vu cette contrariété qui est dans les esprits, on est obligé de rendre raison à tous, on détruit la règle par laquelle toutes choses paraissent pouvoir être discernées, et il faudra regarder tout comme égal.

Ils poussent plus loin leur dispute par ce raisonnement: Une chose vous paraît probable. Si vous dites qu’elle vous paraît probable, vous n’avez rien à opposer à celui qui ne la trouve pas telle; car comme vous êtes croyable en disant que vous voyez une chose de cette manière, votre adversaire est aussi croyable que vous en disant qu’il ne la voit pas de même. Que si la chose dont il s’agit n’est point probable, on n’en croira pas non plus celui qui assurera qu’il la voit clairement et distinctement. On ne doit pas prendre pour véritable ce dont on est persuadé, les hommes n’étant pas tous, ni toujours, également persuadés des mêmes choses. La