Page:Diogène Laërce - Vies, édition Lefèvre,1840.djvu/475

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

est aussi certain que nous voyons et que nous entendons, qu’il est certain que nous sentons de la douleur ; de sorte qu’il faut juger des choses que nous n’apercevons point, par les signes que nous en donnent celles que nous découvrons. On doit encore convenir que toutes nos idées viennent des sens, et se forment par incidence, par analogie, ressemblance et composition, à l’aide du raisonnement, qui y contribue en quelque sorte. Les idées même des gens qui ont l’esprit troublé, et celles qui nous naissent dans les songes, sont réelles, puisqu’elles se trouvent accompagnées de mouvement, et que ce qui n’existe pas n’en peut produire aucun. »

[33] Par ce que les épicuriens appellent notions antécédentes, ils entendent une espèce de compréhension, soit opinion vraie, soit pensée ou acte inné et universel de l’entendement, c’est-à-dire le souvenir d’une chose qui s’est souvent représentée à nous extérieurement, comme dans cette proposition : « L’homme est disposé de cette manière. » En même temps que le mot d’homme se prononce, l’idée de la figure de l’homme se représente à l’esprit en vertu des notions antécédentes, dans lesquelles les sens nous servent de guidé. Ainsi l’évidence d’une chose est liée avec le nom qu’elle porte originairement. En effet, nous ne saurions rechercher une chose, sans nous être formé auparavant l’idée de l’objet qui fait le sujet de notre recherche. Par exemple, pour juger si une chose qu’on voit de loin est un cheval ou un bœuf, il faut avoir premièrement l’idée de ces deux animaux ; et nous ne pourrions nommer aucune chose, sans en avoir auparavant acquis l’idée par les notions antécédentes, d’où s’ensuit que ces notions sont évidentes.

Il faut encore remarquer que toute opinion que l’on conçoit dépend d’une chose antécédente déjà connue comme évidente, et à laquelle nous la rapportons, comme dans cette question : « D’où savons-nous que c’est là un homme, ou non ? » [34] Les épicuriens donnent aussi à ces opi-