Page:Diogène Laërce - Vies - tome 2.djvu/460

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le plaisir depend du sentiment, & qu'elle n'est rien que la privation de ce même sentiment.

C'est une belle découverte que celle qui peut convaincre l'esprit, que la mort ne nous concerne en aucune maniere; c'est un heureux moyen de passer avec tranquillité cette vie mortelle, sans nous fatiguer de l'incertitude des tems, qui la doivent suivre; & sans nous repaître de l'esperance de l'immortalité.

En effet, ce n'est point un malheur de vivre, à celui qui est uine fois persuadé que le moment de sa dissolution n'est accompagné d'aucun mal, & c'est être ridicule de marquer la crainte que l'on a de la mort, non pas que sa vuë, dans l'instant qu'elle nous frappe, donne aucune inquietude; mais parce que dans l'attente de ses coups l'esprit se laisse accabler par les tristes vapeurs du chagrin? Est-il possible que la presence d'une chose étant incapable d'exciter aucun trouble en nous, nous puissions nous affliger avec tant d'excès par la seule pensée de son approche?

La Mort encore un coup, qui paroit le plus redoutable de tous les maux, n'est qu'une chimere, parce qu'elle n'est rien tant que la Vie subsiste & lorsqu'elle arrive, la vie n'est plus: ainsi elle n'a point d'empire ni sur les vivans ni sur les morts; les uns ne sentent pas encore sa fureur, & les autres qui n'existent plus, sont à l'abri de ses atteintes.