Page:Diogène Laërce - Vies et doctrines des philosophes de l’Antiquité, trad. Zévort.djvu/100

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philosophie, que ton sort sera glorieux à Athènes et parmi tous les Grecs ! Tu as de la mémoire, de l’esprit ; tu ne fais consister le mal que dans l’opinion ; tu ne te fatigues point, que tu sois debout ou que tu marches ; tu es insensible au froid, aux plaisirs de la table ; tu n’aimes ni le vin, ni la bonne chère, ni les autres frivolités de ce genre.

Amipsias le représente affublé d’un vieux manteau et l’apostrophe ainsi :

Ô Socrate, le meilleur des hommes si tu étais seul au monde, mais le plus vaniteux entre tous ! Toi aussi tu viens donc parmi nous ; tu as ce courage ? Mais d’où te vient ce manteau ? Ce sont les corroyeurs qui t’ont fait ce mauvais cadeau pour se moquer de toi.

— Pourtant cet homme, dévoré par la faim, n’a jamais flatté[1].

Cette fierté de caractère et cette grandeur d’âme de Socrate résultent également des vers suivants d’Aristophane[2] :

Tu arpentes fièrement nos rues en promenant les yeux de tous côtés ; tu vas nu-pieds, sans t’inquiéter de la douleur et étalant majestueusement ton visage.

Cependant il savait aussi s’accommoder aux circonstances : on le vit quelquefois élégamment vêtu, par exemple lorsqu’il alla trouver Agathon, comme le rapporte Platon dans le Banquet. Il possédait au même degré le talent de convaincre et celui de dissuader ; c’est ainsi qu’au dire de Platon un discours qu’il prononça sur la science fit de Théétète un homme presque divin. Eutyphron ayant intenté un procès à son père pour le meurtre d’un étranger, quelques paroles de Socrate sur la piété filiale suffirent pour le détour-

  1. C’est Socrate qui répond.
  2. Nuées, v. 381 et suiv.