Page:Diogène Laërce - Vies et doctrines des philosophes de l’Antiquité, trad. Zévort.djvu/150

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tueuse de sa table, mais toujours sans succès. Un jour qu’il y dînait, il lui donna, sans dire mot, une excellente leçon en ne mangeant que des figues.

Sa franchise faillit l’exposer à un grand danger, lui et son ami Asclépiade, à Cypre, chez Nicocréon. Ce prince les ayant invités avec beaucoup d’autres philosophes à une fête mensuelle, Ménédème dit que si cette réunion de savants était utile, elle devait se renouveler tous les jours ; et que, dans le cas contraire, c’était déjà trop d’une fois. Le tyran lui répondit qu’il n’avait que ce jour de libre pour entendre les philosophes ; mais il n’en soutint que plus vivement son opinion et s’obstina jusqu’au bout à dire qu’il fallait en tout temps écouter les leçons des philosophes. Heureusement un joueur de flûte vint les interrompre ; sans cela les deux amis couraient risque de la vie. Aussi, lorsqu’ils furent en mer, battus par les flots, Asclépiade dit-il que les accords du joueur de flûte les avaient sauvés, mais que la hardiesse de Ménédème les avait perdus.

Peu soucieux de l’usage, il n’établissait dans son école aucun ordre ni aucune disposition particulière : les bancs n’y étaient pas rangés en rond ; les auditeurs se plaçaient au hasard, s’asseyant ou se promenant à leur gré ; lui-même en faisait autant.

Il était en même temps timide et vaniteux : ainsi il avait commencé avec Asclépiade par servir un maçon en qualité de manœuvre ; son compagnon ne craignait pas de porter tout nu du mortier au toit, mais lui se cachait dès qu’il apercevait un passant. Quand il fut arrivé aux affaires, il était si timide et si distrait, qu’une fois en versant l’encens il se trompa et le jeta à côté de l’encensoir.

Importuné par Cratès, qui s’était attaché à ses pas