Page:Diogène Laërce - Vies et doctrines des philosophes de l’Antiquité, trad. Zévort.djvu/349

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On reprochait à Polémon d’annoncer une question et d’en traiter une autre ; Zénon reprit avec humeur : « À quel prix mettait-il ce qu’il vous donnait[1] ? »

Il disait qu’il faut dans la discussion avoir la voix bonne et la poitrine forte, comme les comédiens, mais ne pas trop ouvrir la bouche comme font les grands parleurs qui ne débitent que des fadaises. Il ajoutait que les bons orateurs doivent ressembler aux bons ouvriers qui ne quittent pas leur travail pour regarder autour d’eux, et que les auditeurs de leur côté doivent être tellement attentifs qu’ils n’aient pas le temps de faire des remarques.

Entendant un jeune homme bavarder outre mesure, il lui dit : « Tes oreilles ont passé dans ta langue. »

Un beau garçon lui disait qu’à son avis le sage ne pouvait être amoureux. « Alors, reprit-il, il n’y a rien de plus misérable que vous autres beaux garçons. »

Il prétendait que la plupart des philosophes connaissent bien l’ensemble des choses[2], mais ignorent les petits détails de la pratique. Il citait souvent le bon mot du musicien Caphésius, qui, voyant un de ses disciples souffler à perte d’haleine, lui dit : « Le grand n’est pas le bien, mais le bien est grand. »

Fatigué par un jeune homme qui discutait avec une liberté déplacée, il lui dit : « Jeune homme, je ne te dirai pas ce que je pense. »

Un jeune Rhodien, beau et riche, mais fort nul du reste, était venu se mettre au nombre de ses disciples ; Zénon ne voulant pas de lui, commença par le faire asseoir sur des bancs pleins de poussière ; il le relégua ensuite à la place des pauvres pour le rebuter par le

  1. L’enseignement de Polémon était gratuit
  2. Je lis : τὰ μὲν πολλὰ σοφοὺς εἶναι.