Page:Diogène Laërce - Vies et doctrines des philosophes de l’Antiquité, trad. Zévort.djvu/612

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qui vivait dans un chaste veuvage, entourée de ses enfants, sous le même toit que lui, Plotin se borna à examiner avec soin tous les serviteurs qu’on avait fait paraître devant lui, puis il dit, en montrant l’un d’eux : « Voici le voleur. » Celui-ci nia d’abord énergiquement, même sous le fouet ; mais à la fin il avoua et rapporta l’objet volé. Il avait aussi prédit la destinée de chacun des enfants confiés à sa garde : par exemple, il avait annoncé que Potamon aurait les passions vives et que sa vie serait courte, ce que l’événement vérifia. Moi-même il pénétra le dessein que j’avais formé de me suicider. Un jour que j’étais resté chez moi, il se présenta tout à coup et me dit : « De pareilles pensées ne partent pas d’une intelligence saine, mais d’un esprit malade et en délire ; » puis il m’ordonna de voyager. Je suivis son conseil et je me rendis en Sicile, à Lilybée, où je savais qu’habitait un homme fort distingué, du nom de Probus. Je me délivrai en effet des folles pensées qui m’assiégeaient ; mais ce voyage m’empêcha de rester avec Plotin jusqu’à sa mort.

XII.

L’empereur Galien et sa femme Salonine environnaient Plotin de témoignages d’estime et de respect. Fort de leur amitié, il songea à rétablir une ville de Campanie, habitée anciennement, disait-on, par des philosophes, et détruite depuis. Il voulait, la ville rebâtie, lui faire concéder le territoire environnant, y établir les lois de Platon, et lui donner le nom de Platonopolis. Il s’engageait à s’y installer lui-même avec ses compagnons, et il eût facilement réalisé ce dessein, si quelques-uns des familiers de l’empereur ne