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sant avec la puissance publique et la grandeur de l’État, contribuaient à grossir la capitale et à faire refluer sa population jusqu’au dehors de son enceinte, les souverains, d’accord avec la municipalité, s’efforçaient, mais en vain, de contenir ce mouvement progressif !

Il serait trop long d’analyser et même de citer tous les documents qui révèlent cette disposition constante de l’autorité publique, et dont la multiplicité même accuse l’impuissance.

Parmi les moins anciens, un édit de novembre 1549 avait interdit de bâtir au delà du bornage de la ville ; mais la défense était restée sans effet, car une ordonnance du 15 janvier 1638 prescrivit aux Trésoriers de France de poser de nouvelles bornes autour de la ville et des faubourgs, et défendit de construire ou de réparer aucune maison en dehors de ce périmètre, sans la permission du Roi, donnée pardevant le Prévôt de Paris, le Prévôt des Marchands et les Échevins appelés. On n’en tint nul compte.

Une semblable ordonnance, rendue le 26 avril 1672, ne fut pas mieux observée.

Comme ces interdictions ne s’appliquaient pas à une bande de territoire, à une zone déterminée, il était très-difficile qu’elles fussent efficaces. D’ailleurs, par une sorte d’inconséquence, tandis qu’on semblait redouter l’accroissement de la population à Paris, on y avait successivement établi un système de contributions de nature à y appeler de nouveaux habitants[1]. Le territoire et les dépendances de la ville étaient affranchis de la taille, impôt direct assis, d’une part, sur la propriété foncière, et d’autre part, sur le revenu présumé du contribuable[2], dont le mode de perception aggravait le poids. On payait à Paris, sous le nom d’aides, une contribution indirecte résultant de la réunion d’anciennes impositions très-diverses, et consistant en droits d’entrée ou de vente établis sur un certain nombre d’objets, et particulièrement sur les boissons. On acquittait, en outre, sous la même forme, des droits d’octroi, créés depuis 1551, et accrus par plusieurs actes de date postérieure, pour subvenir aux dépenses de la Ville et au revenu des hospices.

La charge totale, pour chaque contribuable parisien, était fort considérable, supérieure a celle de la plupart des contribuables sujets à la taille[3] ; mais la

  1. Delamare. – Traité de la Police, 1, 79, 80.
  2. De Parieu. – Histoire des impôts généraux sur la propriété et le revenu, p. 261, note 1.
  3. La totalité des impôts, tant manuels que pécuniaires, supportés par la France, avant la révolution, est évaluée à 880,000.000 de livres (Bailly, Histoire financière de la France, II, 263), ce qui formait, pour chacun des 21,800,000 habitants, un contingent moyen de 35 livres 9 sols, environ. Or, Paris payait 34 millions de livres, sous forme de droits d’entrée et d’octroi, non compris les frais de régie, ce qui donne pour chaque individu une moyenne de 56 livres 13 sols, en supposant une population de 600,000 habitants (Statistique de France) ou de 50 livres 15 sols, on admettant une population de 670,000 âmes (Procès-verbaux de l’Assemblée-Nationale, XLVI, Rapport sur les Taxes, 2). En outre, les Parisiens étaient grevés de divers autres impôts jusqu’à concurrence de 6 à 7 millions de livres (Mathon de la Cour, Collection de comptes rendus concernant les Finances de France, 188, 224).