Page:Doin - Le conscrit ou le Retour de Crimée, 1878.djvu/10

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Criquet.

Ah ! bonjour, Robert, bonjour, Julien, bonjour, les amis… Hein ? Robert, ça fait mal, n’est-ce pas, de quitter comme ça les connaissances ?

Robert.

Voyons, Criquet, mauvais conscrit !… On prend du courage, que diable !… Est-ce qu’on se laisse abattre comme ça ?

Criquet.

Du courage… du courage… c’est bon à dire, ça !… T’en as donc, toi, Robert, du courage ?

Robert.

Je m’en flatte !… Est-ce que ce n’est pas glorieux, d’abord quand nous nous verrons un bel uniforme, et surtout de combattre pour la gloire de notre belle patrie !

Criquet.

Ouitche !… tout ça c’est bel et bon, mais tiens, voisin, Robert, moi, l’courage peut pas m’entrer dans la tête… j’ai là… tiens… sus l’estomac, comme deux galettes chaudes de sarrasin !

Julien.

Mon pauvre Criquet, faut tâcher de te remonter un peu le moral ; c’est vrai que ça fait de la peine, et je crois bien que tu n’es guère fait pour être soldat, et, sur ma parole, je te plains.

Criquet.

Ah ! toi, Julien, t’es ben heureux… te v’la exempt de c’te diable d’engeance militaire !… Diable de Carmée, va !… J’vous d’mande un peu si c’est jouer de malheur !… J’arrive à la mairie avec toi, avec Robert, Jobin, Jean Claude, Mathurin !… Bon !… Vous attrapez tous un bon numéro, moi j’mets la main dans ce sac de malheur et vlan ! j’attrape le numéro Un…!!!… Tiens ! j’en r’viens pas…

Lefuté.

Console-toi, va, mon pauvre filleul, j’penserai à toi et je t’écrirai souvent.