Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/362

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pas me vanter, mais je crois que je vous offrirai quelque chose ! Je vous en donne ma parole !

Au milieu de ces actions de grâces, Nastenka s’approcha de Foma Fomitch et, sans plus de paroles, l’embrassa de toutes ses forces.

— Foma Fomitch, dit-elle, vous êtes notre bienfaiteur ; vous nous avez rendus si heureux que je ne sais comment nous pourrons jamais le reconnaître ; ce que je sais, c’est que je serai pour vous la plus tendre, la plus respectueuse des sœurs...

Elle ne put aller plus loin ; les sanglots étranglèrent sa voix. Foma la baisa sur le front. Il avait aussi les larmes aux yeux.

— Enfants de mon cœur, s’écria-t-il, vivez, épanouissez-vous et, aux moments de bonheur, souvenez-vous du pauvre exilé ! À mon sujet, laissez-moi vous dire que l’adversité est peut-être la mère de la vertu. C’est Gogol qui l’a dit, je crois. Cet écrivain n’était pas fort sérieux, mais, parfois, on rencontre en son œuvre des idées fécondes. Or l’exil est un malheur ! Désormais, je serai le pèlerin parcourant la terre appuyé sur son bâton et, qui sait ? il se peut qu’après tant de souffrances, je devienne encore plus vertueux ! et cette pensée sera mon unique consolation.