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JOURNAL D’UN ÉCRIVAIN

mées par deux journaux européens, d’idées absolument dissemblables, sont des plus intéressantes. Au fond, elles se rencontrent presque. Le Daily News ne s’indigne que parce que le prétendant a donné une preuve de faiblesse en semblant faire une concession. Louis Veuillot affirme qu’il n’y a eu aucune concession et que les plénipotentiaires viennent d’eux-mêmes chez l’héritier du trône, pour lui arracher une promesse imprudente, mais que le « Roi se tait ». On assure que Louis Veuillot serait mieux informé que les autres.

L’alliance de toutes les fractions de la Droite, terrifiée par l’attitude de la portion républicaine de l’Assemblée Nationale, qui a manifesté l’intention de résister avec une énergie surhumaine aux menées des monarchistes, — cette union des Droites a nommé une commission définitive sous la présidence du général Changarnier. La commission est chargée d’élaborer le texte des dernières propositions à adresser au comte de Chambord, et de recevoir sa réponse désormais irrévocable. Les travaux de cette commission sont naturellement tenus dans le secret le plus absolu, mais on arrive quand même à en connaître les résultats. On sait, par exemple, que l’entente demeure complète entre la Droite et le Centre droit. On n’ignore pas davantage que la dernière députation chargée des suprêmes propositions adressées au comte de Chambord est déjà en route pour la résidence de ce dernier et qu’elle hâtera son retour le plus possible. Elle doit apporter une réponse définitive. On dit de la façon la plus sérieuse et dans les milieux les plus autorisés que même dans le cas où le comte de Chambord refuserait péremptoirement le drapeau tricolore, l’entente entre les diverses parties de la Droite demeurera inébranlable. On ajoute — et ceci nous paraît bien peu raisonnable — que, dans cette occurrence, on proclamera quand même la monarchie en prenant pour roi le comte de Paris. Une autre version, peut-être plus vraisemblable, veut qu’en présence d’une fin de non-recevoir du comte de Chambord, les Chambres, dès leur prochaine réunion — (le 5 novembre) — prorogent les pouvoirs du maréchal de Mac-Mahon, en évitant, bien entendu, de proclamer immédiatement la