Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov, trad. Mongault, tome 2.djvu/211

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semble que Catherine Ivanovna n’a rien à voir là-dedans, ce secret doit sûrement se rapporter à autre chose. En attendant, adieu ! »

Aliocha lui serra la main. Grouchegnka pleurait toujours. Il voyait bien qu’elle ne croyait guère à ses consolations ; néanmoins, cette effusion l’avait soulagée. Cela lui faisait de la peine de la laisser dans cet état, mais il était pressé, ayant encore beaucoup à faire.


II

Le pied malade

Il voulait d’abord aller chez Mme Khokhlakov, et avait hâte d’en finir, pour ne pas arriver trop tard auprès de Mitia. Depuis trois semaines, Mme Khokhlakov était souffrante ; elle avait le pied enflé, et, bien qu’elle ne gardât pas le lit, elle passait les journées à moitié étendue sur une couchette, dans son boudoir, en déshabillé galant, d’ailleurs convenable. Aliocha avait observé une fois, en souriant innocemment, que Mme Khokhlakov devenait coquette, malgré sa maladie : elle arborait des nœuds, des rubans, des chemisettes. Durant les deux derniers mois, le jeune Perkhotine s’était mis à fréquenter chez elle. Aliocha n’était pas venu depuis quatre jours et, sitôt entré, il se rendit chez Lise, qui lui avait fait dire la veille de venir immédiatement la voir « pour une affaire très importante », ce qui l’intéressait pour certaines raisons. Mais tandis que la femme de chambre allait l’annoncer, Mme Khokhlakov, informée de son arrivée, le demanda « rien que pour une minute ». Aliocha jugea qu’il valait mieux satisfaire d’abord la maman, sinon elle l’enverrait chercher à chaque instant. Elle était étendue sur la couchette, habillée comme pour une fête, et semblait fort agitée. Elle accueillit Aliocha avec des cris d’enthousiasme.

« Il y a un siècle que je ne vous ai vu ! Une semaine entière, miséricorde ! Ah ! vous êtes venu il y a quatre jours, mercredi passé. Vous allez chez Lise, je suis sûre que vous vouliez marcher sur la pointe des pieds, pour que je n’entende pas. Cher Alexéi Fiodorovitch, si vous saviez comme elle m’inquiète ! Ceci est le principal, mais nous en parlerons