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Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 1.djvu/146

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c’est toi qu’elle préfère. C’est une fausse, une vile créature. Non, ne va pas chez elle, il ne le faut pas.

— Ce ne serait en effet pas bien, mon père, pas bien du tout.

— Où t’envoyait-il tout à l’heure, quand il s’est sauvé ?

— Chez Katherina Ivanovna.

— Pour lui demander de l’argent ?

— Non.

— Il n’a pas d’argent, pas un kopek, et à ce propos, je… Alioscha, je passerai la nuit à réfléchir. Va-t’en… tu la rencontreras peut-être. Viens chez moi demain matin, j’ai un mot à te dire. Viendras-tu ?

— Je viendrai.

— Tu feras comme si tu venais prendre de mes nouvelles ; ne dis pas que je t’ai appelé… Pas un mot à Ivan !

— C’est bien.

— Adieu, mon ange. Tout à l’heure tu m’as défendu, je ne l’oublierai jamais. Je te dirai quelque chose demain, mais il faut que j’y réfléchisse.

— Comment vous sentez-vous maintenant ?

— Demain, dès demain je me lèverai et je marcherai. Je suis tout à fait rétabli !…

En sortant, Alioscha aperçut Ivan assis sur un banc près de la porte cochère : il écrivait sur son carnet. Alioscha lui dit que Fédor Pavlovitch avait repris connaissance et qu’il l’envoyait passer la nuit au monastère.

— Alioscha, je désire beaucoup te voir demain matin, dit Ivan d’un ton affectueux, si affectueux qu’Alioscha en fut surpris.