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LES FRERES KARAMAZOV. 151

dire, quelque chose de très-joli, de très-joli. C'est pour toi que j'ai organisé cette petite comédie. Allons, viens, ma colombe, tu ne t'en repentiras pas.

Alioscha se détourna en faisant craquer ses doigts. Grouschegnka éclata de rire et sortit en courant.

Katherina Ivanovna avait une crise de nerfs. Elle pleu- rait, les spasmes l'étouflaient.

— Je vous avais prévenue, lui disait sa tante, je vous déconseillais cette démarche, vous êtes trop vive... Vous ne connaissez pas ces femmes-là, et celle-ci est pire que

' toutes.

— C'est un tigre! vociféra Katherina Ivanovna. Pour- quoi m'avez-vous retenue, Alexey Fédorovitch? je l'aurais assommée! Il faut qu'elle soit fouettée par le bourreau, devant la foule!...

Alioscha fit quelques pas vers la porte.

— Dieu! s'écria-t-elle en joignant les mains, et lui! comment peut-il être si malhonnête, si cruel! Il lui a raconté, à cette ignoble créature, ce qui s'est passé durant ce jour fatal, ce jour maudit... maudit I c Vous êtes allée vendre votre beauté, barichnia... » Elle le sait!... Votre frère est un misérable, Alexey Fédorovitch !

Alioscha voulut parler, mais il ne trouva pas un mot ; son cœur se serrait d'angoisse.

— Allez-vous-en, Alexey Fédorovitch! J'ai honte... Dieu!... Demain... je vous en conjure, venez demain... Ne méjugez pas, pardonnez-moi, je ne sais pas encore ce que je vais faire de moi.

Alioscha sortit. Il chancelait comme un homme ivre. Tout à coup la bonne le rejoignit.

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