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158 LES FRERES KARAMAZOV.

chambre voisine, Alioscha, sans se déshabiller, s'étendit sur un étroit divan couvert de cuir, où il passait depuis longtemps les nuits. Mais avant de s'endormir, il se jeta à genoux et fit de longues prières. Dans sa ferveur, il demandait à Dieu de dissiper ses troubles , de lui rendre la paix dont il jouissait naguère. Tout à coup, il sentit dans sa poche la petite enveloppe rose que Katlierina Ivanovna lui avait fait remettre. Il tressaillit, mais termina sa prière; puis, après quelques hésitations, il déchira l'enveloppe. Elle contenait un petit billet à lui adressé, et signé : Liza; c'était de cette même jeune fille, mademoiselle Khokhla- kov, qui se moquait de lui, dans la matinée, devant le starets.

« Alexey Fédorovitch, je vous écris en secret de tout le monde, même de maman, et je sais que cela est mal; mais je ne peux plus vivre sans vous faire savoir ce qui est né dans mon cœur, et ce que personne autre que nous deux ne doit savoir, au moins pendant quelque temps. Mais comment vous dire ce que je veux vous dire? On dit que le papier ne rougit pas; je vous jure que c'est faux, et que lui et moi nous sommes tout rouges. Cher Alioscha, je vous aime ; je VOUS aime depuis notre enfance, depuis Moscou, alors <iue vous étiez bien différent de ce que vous êtes , et je vous aime pour toute la vie. Vous êtes l'élu de mon cœur. Il faut que nous passions notre vie ensemble jusqu'à nos vieux jours, à condition, bien sûr, que vous quittiez le monastère. Quant à notre âge , nous attendrons autant que la loi l'exige. Alors je serai guérie , je marcherai , je danserai, il n'y a pas de doute à cela. Vous voyez qu.» j'ai tout calculé. La seule chose que je ne puisse prévoir, c'est

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